Magazine Le Mensuel

Nº 2867 du vendredi 19 octobre 2012

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Syrie-Liban. Les premiers conflits

Syrie-Liban
Les premiers conflits


En 1955, l’affaire Adib el-Chichakli a provoqué un conflit entre le Liban et la Syrie. Tous les efforts de rétablir un dialogue entre les deux pays sont voués à l’échec. Le passage en toute liberté par Beyrouth vers Paris de Chichakli, recherché par les Syriens, est vivement critiqué par Damas.  

Le président syrien Adib el-Chichakli était le premier chef d’Etat arabe à rendre visite au président Camille Chamoun aussitôt après son élection en 1952. Il aborde à l’occasion une possible union économique syro-libanaise, un projet qui ne fait pas l’unanimité au Liban.
A partir d’octobre 1952, des pourparlers difficiles sont engagés entre les gouvernements syrien et libanais alors qu’au Liban une vive querelle oppose les partisans de l’union économique et ses détracteurs. Le 10 mars 1953, la Chambre des députés ratifie un accord provisoire limité  à un an. Le texte instaure le libre-échange de la production nationale agricole et animalière. Le 25 mars 1954, l’accord est prolongé de six nouveaux mois. En Syrie, aucune mesure n’est prise vu la situation interne et le renversement du président Chichakli. C’était le troisième coup d’Etat après celui de 1949 par lequel Husni al-Zaïm destitue fin mars Chukri al-Kouatli lequel est renversé à son tour et exécuté le 14 août de la même année par Sami al-Hinnaoui. Hachem al-Atassi accède alors à la tête de l’Etat. En décembre 1949, Adib Chichakli renverse Sami al-Hinnaoui et le remplace en 1951. Le 25 février 1954, Adib Chichakli est victime d’un coup d’Etat qui rétablit Hachem al-Atassi.
Chichakli se réfugie au Liban mais il est toujours menacé. Il s’exile au Brésil en partant via le Liban le 13 août 1955. Les informations circulent sur une nuit qu’il a passée au Liban avant de se rendre en Syrie dont il est revenu pour aller à Paris. Interrogé à ce sujet, le Liban précise que Chichakli est détenteur d’un passeport saoudien. Le directeur de la Sûreté à l’aéroport de Beyrouth le reconnaissant lui donne le choix entre repartir ou être livré à la Syrie. Il retourne à Paris. La Syrie n’est pas satisfaite de la réponse libanaise et ordonne l’ouverture d’une enquête. Il s’avère que Chichakli voyageait avec son cousin Wadih Chichakli sous des noms d’emprunt et étaient vêtus à la mode arabe. Un communiqué officiel précise qu’une jeep s’était arrêtée au pied de l’avion à bord duquel se trouvait Chichakli. Ce dernier et son cousin sont accueillis par un officier syrien. Ils passent la nuit en montagne avant de se diriger vers la Syrie. La jeep passe la frontière sans difficultés. Chichakli reste en Syrie pour quelque temps avant de revenir au Liban et de retourner à Paris.
Des rumeurs ont circulé faisant état de préparatifs effectués par Chichakli en vue d’un coup d’Etat. Il aurait rencontré Khaled el-Azem à Damas. Toujours est-il que cette affaire a jeté un froid dans les relations entre le Liban et la Syrie et les négociations engagées par les deux pays pour une nouvelle phase de coopération échouent. La Syrie tient le Liban responsable de ce qui s’était tramé. Selon Damas, le gouvernement libanais aurait donné son aval pour l’entrée de la jeep syrienne dans l’enceinte de l’aéroport.
Une affaire qui ne devait prendre fin que des mois plus tard.

A.K.
 

NB: Informations tirées du Mémorial du mandat de Camille Chamoun de Joseph Chami.

Qui est-il?
Adib Chichakli (1909-1964) naît dans une famille kurde dans la ville de Hama en Syrie. Il sert l’armée française sous l’ère du mandat puis fait des études à l’Académie militaire de Damas, où il devient membre du Parti social nationaliste syrien, fondé par Antoun Saadé. Après l’indépendance de la Syrie, Chichakli dirige un des régiments de l’Armée de libération arabe qui combat les forces sionistes lors de la guerre israélo-arabe de 1948.
En 1949, Chichakli lance un autre coup d’Etat et accède à la présidence  de la République en 1951. En août 1952, il fonde un parti politique pro-gouvernemental, le Mouvement de libération arabe. Le pays passe, pour la première fois, sous le régime de parti unique. Il entretenait de très bonnes relations avec la famille royale d’Arabie saoudite, le roi Abdel- Aziz Ben Saoud, ainsi qu’avec le roi Talal de Jordanie. Il a adopté une politique syrienne panarabe. Chichakli quitte la Syrie pour le Liban en 1954, puis pour le Brésil. Il est assassiné le 27 septembre 1964 au Brésil.

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