Magazine Le Mensuel

Nº 2899 du vendredi 31 mai 2013

general

Tout en musique

Le piano de Ziad Rahbani
Et la pureté de la musique

Ce mercredi 22 mai, la ville d’Antelias était comme sous l’emprise d’une excitation bien visible. C’est qu’elle accueillait Ziad Rahbani pour une soirée musicale spéciale, en l’église Saint-Elias. «Taratil et Ziad Rahbani». Des chants liturgiques. Ziad Rahbani en a composé et arrangé quelques-uns durant sa jeunesse, pour la messe des jeunes, dont Nahnou sahiroun, qui ont été compilés dans un album intitulé Kiriyalayson.
Ce sont ces quelques chants qui figuraient au programme de ce concert particulier, ainsi que certaines chansons mythiques de Fairuz, anciennes et plus récentes. Pour ce concert particulier, Ziad Rahbani au piano, était entouré d’un florilège de musiciens; quelques-uns des musiciens avec qui il est habitué à jouer, ainsi que l’orchestre symphonique du Liban sous la direction de Karen Durgaryan. Et au chant, se sont succédé Samy Clark, Ghada Ghanem, Manale Semaan, Edgar Aoun accompagnés du chœur de Mar Elias.
Et la musique retentit, somptueuse, majestueuse, comme amplifiée par les voûtes de l’église. Fermer les yeux et se laisser aller à écouter chaque note, chaque son, chaque nuance. Fermer les yeux pour rejoindre Ziad Rahbani et ses musiciens dans ce monde privilégié dans lequel ils semblent retirés et qu’ils tentent d’offrir au public. Dans ce pays où chacun essaie de ramener l’autre dans son giron, où la religion, la politique pèsent à chaque moment du quotidien comme parti pris et source de conflit, Ziad Rahbani a distillé un brin d’espoir: un espoir en la musique, avant toute chose, la musique seulement et purement. La musique, cet art sacré, parce que pur. La musique où chaque note est pensée, étudiée, analysée, ressentie, tressaillie, et qui fait tressaillir tout le corps et l’esprit… Qu’importe l’endroit où l’on se trouve, qu’importe la réaction de certains, les sourires fiers qu’affichaient d’autres, les applaudissements des uns et des autres.
Figure publique, tellement adulée, et par conséquent ouverte à tous les vents, à toutes les interprétations, les explications, les supputations… Ziad Rahbani a tout dit. Par sa musique d’abord, par son silence ensuite face à la vague d’applaudissements qui a accueilli son arrivée sur scène. Les discours, ce sont les autres qui les ont prononcés, lui il règne par sa musique. Et quel bonheur de voir et d’entendre son piano vibrer au cœur d’un orchestre composé d’une cinquantaine de musiciens, d’instruments, de voix, dialoguant, se faisant écho, se répondant et se répercutant bien au-delà de l’instant présent, pour ce moment d’éternité. Merci Ziad Rahbani!

Dans les recoins de Beyrouth
From the Barn Sessions
La nuit, instants en musique

Une invitation lancée sur Facebook: Radio Beirut presents: From the Barn Sessions. Le rendez-vous est fixé au dimanche 19 mai, à 20h. 20h précise, nous précise-t-on, parce que, particularité de la place, comme son nom l’indique, le concert sera retransmis en direct sur le site Internet de Radio Beirut. www.radiobeirut.net
La salle se remplit. Et les musiciens enjambent la scène dans une ambiance où le sourire côtoie l’alcool et la nuit qui se fait plus pressante. Moe Shreif et Jonas Algers aux guitares et au chant, Zeina Aboul Hosn au glockenspiel, Zad aux percussions et Xavier à la flûte. La nuit peut commencer, le concert est lancé.
Les sons s’emmêlent, les notes se succèdent, les voix s’enclenchent. Et voilà que dans la nuit, les images se bousculent au moment même, pour disparaître, réapparaître, disparaître encore, à l’instant même, au moment même où les mots s’extériorisent, s’expriment, se font musique, instants en musique. «She stands outside the door and makes some gesture like she was real»…
Entre une voix baroudeuse et chargée, une voix, pure, juvénile, entre les sonorités puissantes des guitares et la nappe planante des autres instruments, entre un voyage et un rêve, le sourire se charge d’une telle schizophrénie d’ambiance, de sensations, de perceptions…

Comme au cinéma
Cabriolet Film Festival
Dans l’espoir du changement

Il reste encore une dizaine de minutes, et ce sera 20h, l’heure fixée pour le début des projections du Cabriolet Film Festival. Mais la nuit n’a pas encore étalé son sombre voile sur les escaliers Saint-Nicolas. Il faudra attendre encore un peu, pour que l’écran soit bien visible. Entre-temps, les escaliers commencent à se remplir. Des deux côtés de Daraj el-Fann, on monte ou on descend, seul, en couple, entre amis, en famille. Citoyens et cinéphiles, cinéphiles inconditionnels, cinéphiles d’un soir, d’un week-end.
Cela fait cinq ans d’affilée que Laboratoire d’Art, fondé par Brahim Samaha, organise le Cabriolet Film Festival. Un festival en plein air, consacré aux courts métrages, qu’ils soient des fictions, des documentaires ou des animations. La durée du film ne dépassant pas la vingtaine de minutes, parce qu’au-delà, l’attention du spectateur risque de se perdre, le regard attiré par les mille et un détails de ce contexte exceptionnel qui a enveloppé les escaliers Saint-Nicolas, les 24, 25 et 26 mai. Le thème de chaque édition est choisi en fonction de l’actualité et des besoins du moment. Pour cette 5e édition, «Printemps arabe» oblige, le thème tourne autour du «changement», (change). Tout au long du week-end dernier, ont été projetés 47 films issus de 21 pays différents: du Liban évidemment, de Syrie, d’Egypte, du Mexique, de Russie, d’Espagne, d’Irak, d’Australie, d’Italie…
Les escaliers menant à la rue Sursock étaient bondés tous les soirs. Il y régnait une ambiance bon enfant, amicale, festive. Avant le début de la projection, des enfants se déplaçaient entre les spectateurs, offrant des bouchées de certains sponsors du festival. Et ils sont nombreux ceux qui croient en la réussite croissante de cet événement, l’un des rares à être célébrés en plein air dans la capitale. En plein air, une brise légère, entourés d’anciennes maisons, les spectateurs, dans un incroyable respect du silence où aucun murmure presque ne fuse, se laissent gagner par l’espoir du changement qui défile sur le grand écran, le regard souriant et le sourire généreux. A l’année prochaine, pour la 6e édition.

Sur les planches
Le roman d’un tricheur
La subtilité du mot

«Du divertissement. Mais quel divertissement!», avait dit Alain Plisson en évoquant sa nouvelle pièce, une adaptation du Roman d’un tricheur de Sacha Guitry, qui est présenté jusqu’au 2 juin encore, sur les planches du théâtre Tournesol, à 20h30. «On ne rit pas à gorge déployée à Guitry, on sourit tout le temps, tellement c’est fin, subtil, racé, élégant». Et le public est sous le charme, exactement pour les raisons mentionnées par Plisson. Séduction immédiate face à ce conteur qui égrène mots et jeux de mots, face à ce joueur, à ce tricheur, à ce personnage au prénom inconnu, campé par Michel Moppert qui a pris l’habitude depuis longtemps, semble-t-il, de s’attabler au bar-café d’un hôtel pour rédiger ses mémoires. Des souvenirs de vie qui débutent par 11 morts! Et l’histoire commence quand le héros, âgé alors de 8 ans, est consigné par son père pour avoir volé quelques sous. Sa punition: dormir sans dîner. Mais le dîner, lui, était composé de champignons qui se sont avérés vénéneux. Il n’est resté en vie que parce qu’il n’a pas été honnête. Histoire aussi macabre que drôle. Voilà bien l’esprit caractéristique de Guitry!
Soucieux du moindre détail, attaché à présenter une image complète de l’une des figures les plus importantes du siècle dernier, déterminé à toujours présenter un théâtre témoin de son époque, Alain Plisson s’est amusé, avec sérieux, à jouer entre le passé et le présent, entre les éléments de l’histoire et la vie de Sacha Guitry, entre l’éclairage et les costumes, entre les divers personnages qu’il met en scène, pour présenter au public une pièce fraîche et rafraîchissante, qui fait immanquablement sourire. Mais d’un sourire pensif dont les répercussions ne s’estompent pas, une fois la pièce terminée.

Une envie folle
Les planches du théâtre Monnot accueillent du 2 au 5 juin Une envie folle, signée par les auteurs de Ma colocataire est une garce, Fabrice Blind, Michel Delgado et Nelly Marre, et interprétée par Fabrice Blind, Cedric Clodic et Tania Assia. C’est avec cette nouvelle comédie dans l’air du temps que l’équipe parisienne terminera sa tournée théâtrale 2013 à Beyrouth.
Avoir un enfant pour certains c’est facile, pour d’autres c’est très compliqué surtout si on s’y met à trois… Jean et Quentin veulent adopter un enfant. Leurs recherches Internet les mènent jusqu’à Juliette. Mais la mère porteuse de leur rêve semble cacher un secret…
Une envie folle c’est du 2 au 5 juin, à 20h30.
Billets en vente à la Libraire Antoine et au théâtre Monnot.

 

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