Magazine Le Mensuel

Nº 2923 du vendredi 15 novembre 2013

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Patrick Poivre d’Arvor. Le succès d’un surdoué

Personnage incontournable du paysage audiovisuel français, il fut pendant plus de vingt ans le roi du Journal télévisé de TF1. A son actif, plus d’une soixantaine de livres et, aujourd’hui, il se consacre principalement à sa passion première: l’écriture. Il est très souvent connu par ses initiales, PPDA. Portrait de Patrick Poivre d’Arvor.

Nous avons rencontré Patrick Poivre d’Arvor, dans le cadre du Salon du livre. Entouré d’admirateurs et d’admiratrices papillonnant autour de lui, il se livre à la signature de son dernier ouvrage Seules les traces font rêver. Entre deux rencontres avec des journalistes, il prend une pause pour une photo avec ses fans ou pour répondre à quelques questions. Le peu de temps dont nous disposons ne nous empêche pas de nous arrêter aux étapes importantes de sa vie et de survoler la carrière brillante de ce journaliste, qui s’est toujours voulu d’abord écrivain.
 

La rage de vivre
Un signe du destin? C’est à 20h que Patrick Poivre d’Arvor naît à Reims, en France. Bachelier à 15 ans, il intègre l’Institut d’études politiques de Strasbourg puis de Paris. Il apprend le russe, le polonais et le serbo-croate à l’Ecole des Langues orientales. Il est diplômé du Centre de formation des journalistes et licencié en droit. Jack Lang, son professeur de droit, se souvient d’un élève brillant. «En fait, je l’ai rencontré le jour même de l’examen sans avoir suivi ses cours. Mais disons qu’il a suivi mon parcours de près tout comme j’ai suivi le sien», souligne Patrick Poivre d’Arvor.
Il a 17 ans lorsqu’il écrit son premier roman, Les enfants de l’aube, dans lequel il parle de la maladie qui l’a frappé à 13 ans. «C’était une expérience douloureuse que j’ai romancée dans ce livre. J’ai vu mourir des camarades autour de moi. Je suis un survivant. Cela a créé en moi une rage de vivre beaucoup plus importante que si tout avait été facile dans ma vie», confie l’écrivain. Mais ce livre ne sera publié qu’en 1982 après l’évocation de sa maladie dans une émission télévisée. «J’ai raconté mon histoire en changeant les noms des protagonistes. Pourtant, ce livre n’était pas censé être publié, il le fut bien des années plus tard. Quand j’en avais parlé, cette histoire était déjà derrière moi. Une fois que les choses sont dites, on se sent mieux avec son passé».
Au départ, c’est écrivain que Patrick Poivre d’Arvor voulait être. «Le reste est devenu mon métier, mais mon envie principale était de devenir écrivain. Je suis heureux d’avoir été au bout de mes rêves. Auparavant, lorsque je lisais des livres d’autres auteurs, je n’imaginais pas qu’un jour mes ouvrages seraient aux côtés des leurs dans les devantures des librairies».
En 1970, il fait ses débuts dans la presse écrite. Un an plus tard, il est lauréat du concours Envoyé spécial de France Inter. Au terme d’une année de reportages à travers le monde, il entame sa carrière de journaliste en tant que présentateur des journaux du matin et de la revue de presse, puis en qualité de grand reporter. En 1975, il intègre Antenne 2, devenue France 2 où il devient chef du service politique, économique et social et présente son premier journal télévisé le 13 septembre 1975. Il en sera alors le présentateur jusqu’en 1983.
En 1984, il quitte Antenne 2 pour Canal +. Ce n’est qu’en 1986 qu’il fait son entrée à TF1, à l’époque chaîne publique. Il y présente tous les dimanches après-midi l’émission A la folie pas du tout. Avec la privatisation de la chaîne, l’année suivante, il fait le choix de la fidélité et présente pendant vingt et un ans le Journal de 20h, un rendez-vous quotidien pour plus de dix millions de Français. Il occupera très vite le poste de directeur-adjoint, puis directeur délégué de l’information. En parallèle, prépare les émissions littéraires Ex-libris, Vol de nuit  −qui dure dix ans − ou encore Place au livre, Le droit de savoir, qu’il présente pendant cinq ans, Droit de Cité avec Jean-Marie Colombani et des émissions politiques telles que Répondez-nous, Face à la Une et J’ai une question à vous poser. En 2007, il arbitre avec Arlette Chabot le face-à-face Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy. De 1999 à 2008, vice-président de la chaîne bretonne TV Breizh. Patrick Poivre d’Arvor présente son dernier journal télévisé de 20h le 10 juillet 2008. Sur cette éviction, «non journalistique» et qui manquait d’élégance, il confie: «Quand les gens manquent d’élégance, il faut en faire soi-même preuve. Ceci ne fait que mettre en valeur encore plus leur manque d’élégance». D’ailleurs, depuis ce jour, Patrick Poivre d’Arvor n’a plus jamais remis les pieds à TF1. «De toute façon, je n’y ai pas été invité, même pas pour parler de mes livres», dit-il.
Lorsqu’on lui demande s’il y a une vie après la télé, lui, qui fut pendant si longtemps le roi incontestable du 20h00, sa réponse est catégorique. «Oh que oui», s’exclame-t-il.

 

La plus belle trace
«La télévision n’était pas pour moi un graal ou un désir frénétique d’enfance, alors que la littérature l’était. J’ai eu la chance d’avoir plusieurs livres à mon actif, c’est pourquoi j’ai toujours su que, quoi qu’il arrive, je pourrai toujours m’en tirer. J’ai adoré mon métier, mais je savais que j’avais autre chose à faire après. J’ai fait de l’opéra, de la mise en scène et j’ai continué à écrire des livres. J’aime passionnément le métier de journaliste et j’ai eu le sentiment de connaître l’âge d’or de ce métier, les belles années de la télévision. Ce métier m’a permis également de rencontrer des personnes formidables».
Discret de nature, PPDA n’aime pas parler de sa vie privée. Il est père de quatre enfants: Dorothée, Arnaud, Morgane et François. Tiphaine, Solenn et Garance ne sont plus de ce monde. «Les enfants sont la plus belle trace que l’on peut laisser de son passage sur terre. Avoir des enfants, c’est comme les livres que vous laissez derrière vous». Il est très attaché à ses enfants et fait toujours en sorte de les voir, ou de se faire accompagner par l’un d’eux dans ses voyages. D’ailleurs, c’est son plus jeune fils de dix-huit ans, François, qui l’a accompagné dans son voyage à Beyrouth. Quant aux femmes, il confie se sentir bien avec elles. «J’aime ce rapport avec les femmes, qui est souvent celui de la séduction moins que celui d’un rapport de force comme c’est le cas avec les hommes. Parfois émouvant et toujours enrichissant». PPDA se dit très heureux d’être à Beyrouth, une ville qu’il a déjà visitée plus d’une vingtaine de fois. «Je continue à y revenir. Donc, forcément, j’aime cette ville. Il y a quelque chose qui m’attire dans cette alchimie très particulière du Liban».
La devise de PPDA, on la retrouve dans son livre Tenir et se tenir, un entretien où le journaliste se révèle à Nathalie Duplan et Valérie Raulin. «Tenir bon et se tenir bien. Entre la ténacité et la rigueur, se tenir bien pour affronter la vie et ses tracas. Il vaut mieux affronter les problèmes de la vie avec sagesse. Je ne suis pas un homme sage, mais je cherche la sagesse». 

Joëlle Seif
Photos Milad Ayoub-DR

Les Guignols de l’info
Depuis 1988, la marionnette de PPDA 
présente le journal satirique dans le cadre de l’émission Les Guignols de l’info. Sur cette célèbre marionnette, Patrick Poivre d’Arvor porte un regard très détaché. «Je vis ma vie, elle vit la sienne. Ce n’est pas moi qui l’ai créée et je n’ai pas cherché à l’interdire. On ne se croise que lorsque je suis sur le plateau de Canal + et je ne regarde pas cette émission. Je ne suis pas narcissique à ce point», dit-il amusé.

Toujours plus loin
Patrick Poivre d’Arvor est un grand sportif. «J’aime les défis, j’aime toujours aller plus loin et m’imposer chaque fois de nouveaux challenges. Il y a un an, en compagnie de mon fils, j’ai escaladé le Kilimandjaro, le plus haut sommet d’Afrique». Pour les besoins de la campagne La montagne à l’Etat pur, il a effectué l’ascension du Mont-Blanc en 2005. En 1996, il participe à la Transat Québec-
St Malo sur le catamaran d’Yvan Bourgnon. Depuis quarante ans, il participe à toutes les éditions du Tournoi des journalistes. Il y a gagné le double mixte en 1985 aux côtés d’Isabelle Girard et le simple vétéran en 2003. Il s’est aligné au départ du marathon de New York en 2001 (4h53) et en 2006.

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