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Nº 2935 du vendredi 7 février 2014

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Le 8 mars se solidarise avec Aoun. Le gouvernement Salam sera mort-né

Si le gouvernement formé par Tammam Salam ne satisfait pas les exigences de Michel Aoun, alors les ministres du CPL et ceux du tandem Hezbollah-Amal démissionneront, laissant ainsi la place à de nouvelles consultations parlementaires et à la désignation d’un nouveau Premier ministre plus conciliant.   
 

Au bout de dix mois de gestation, un record, la montagne va-t-elle accoucher d’une souris? Dimanche, après s’être entretenu avec Hussein Khalil, conseiller politique du secrétaire général du Hezbollah, Tammam Salam a rencontré Gebran Bassil, sur les conseils de Walid Joumblatt et de Nabih Berry, emmurés dans un silence de façade, comme pour laisser faire l’inéluctable. Jusque-là, le Premier ministre désigné comptait sur la force de conviction du tandem chiite pour conduire Michel Aoun à rentrer dans le rang. La rencontre entre les deux hommes fut sommaire. Chacun est resté sur ses positions. Salam a proposé à son interlocuteur de choisir deux entre les Affaires étrangères, l’Education et les Travaux publics. Bassil rejette l’offre. «Pouvez-vous m’expliquer les raisons qui, selon vous, justifient la rotation au niveau des portefeuilles? Pour notre part, nous avons présenté nos arguments sur les méfaits de ce principe. Pouvez-vous me convaincre du contraire ou bien s’agit-il seulement d’un règlement de comptes politique avec le CPL?», répondra-t-il. La discussion tourne court. Leurs désaccords viennent d’enterrer la formation d’un gouvernement d’union nationale, pensent-ils alors.
 

Le passage en force
Quelques minutes plus tard, Tammam Salam, lunettes vissées sur son crâne nu, d’habitude visage sérieux mais jovial, est à Aïn el-Tiné, les traits tirés. Lui aussi est placé devant le fait accompli. Doit-il sacrifier l’une des conditions exigées par le Courant du futur pour qu’il accepte de siéger aux côtés du Hezbollah et satisfaire le CPL? Reprendre sa formule gouvernementale, fruit d’un savant équilibre, après dix mois d’attente, est hors de question. Pas question non plus de former un gouvernement sans l’une des composantes essentielles de la voix chrétienne. Mais il doit faire vite. Michel Sleiman le lui répète à chacun de ses entretiens, l’élection présidentielle approche et pour assurer la continuité des institutions, un gouvernement doit être formé pour éviter un éventuel vide à la tête de l’Etat. Autre contrainte temporelle, un rien peut enrayer la détente entre l’Iran et l’Arabie saoudite, pilotée par les Etats-Unis.
Salam, le seul piston dans cette affaire car il est celui qui a le plus à perdre, a l’intention de prendre les devants. Dans son esprit, l’hypothèse d’un gouvernement d’union nationale, formé sans l’accord du CPL, semble être la dernière carte qu’il puisse encore jouer. Il fait part de tous ces sentiments à Nabih Berry qui lui répond d’abord par des généralités comme l’importance du Pacte national et l’impératif de ménager la voix chrétienne. D’autant que le patriarcat maronite (voir encadré) a indiqué qu’il n’accordera pas sa couverture à un gouvernement qui ne compte pas dans ses rangs des «représentants authentiques des chrétiens». Surtout, il lui fait comprendre qu’il est inutile de se précipiter et de forcer les choses car il lancerait un engrenage institutionnel qui alimenterait les tensions. Mais Tammam Salam sait que Nabih Berry aussi est engagé auprès du Hezbollah qui a annoncé, quelques heures auparavant, que ses ministres seraient solidaires et démissionneraient si ceux du CPL venaient à le faire. Au sein de la coalition du 8 mars, on prépare déjà la suite.           

 

Nouvel imbroglio
Lundi, lorsque Tammam Salam reçoit à Mousseitbé Roni Areigi, représentant le leader des Marada, Sleiman Frangié, et une délégation du Tachnag, il est déjà dans la justification de ce qu’il s’apprête à faire. A ses interlocuteurs, qui ont déjà leur portefeuille attitré, il veut donner l’impression d’avoir accordé toutes les facilités possibles, et que c’est le leader du CPL qui n’a pas répondu positivement à ses démarches. Sans doute croit-il que cette posture politique lui permettra, par la suite, de convaincre Nabih Berry et les deux composantes du bloc parlementaire du parti de Michel Aoun de rester dans le gouvernement, ou tout au moins de lui assurer une couverture politique après avoir fait assumer à Aoun la responsabilité de son exclusion. Salam a même subodoré aux Marada et au Tachnag l’idée de leur confier les portefeuilles dévolus au CPL.
La course est engagée depuis lundi car, en face, le CPL tente de mettre le 8 mars en ordre de bataille. Et de préparer tous les scénarios. Si, après signature du décret par le président de la République, Tammam Salam en venait à annoncer un cabinet du fait accompli, comment réagiront-ils? Mercredi, les leaders de la coalition étudiaient encore toutes les possibilités. Pas question pour les Marada, le Tachnag, voire le mouvement Amal, de jouer les bouche-trous et d’occuper les ministères attribués au CPL et au Hezbollah. Le 8 mars et le CPL parleront d’une seule et même voix. Autre barrage, Nabih Berry qui a déclaré qu’en tant que président du Parlement, il pourrait user de son pouvoir pour empêcher le vote de confiance d’un gouvernement du fait accompli.
A ce titre, en milieu de semaine, des tractations étaient en cours avec Berry et Joumblatt pour qu’ils fassent, tous deux, opposition à l’entrée en fonction d’un tel gouvernement. Autre possibilité évoquée, le refus du 8 mars et du CPL de céder leurs ministères à des successeurs illégitimes à leurs yeux.

 

Combler le vide présidentiel
Reste la question constitutionnelle, si plus d’un tiers des ministres du gouvernement Salam venaient à démissionner avant le vote de confiance, que deviendrait ce gouvernement?
Tant que les choses ne sont pas faites, tout reste possible. Mais les dernières déclarations de Michel Aoun ne laissent pas de place au doute. Mardi, il dénonçait «le danger que représente la formation d’un gouvernement après des consultations incomplètes, puisque la première force parlementaire chrétienne, et la deuxième du pays, a été ignorée». Il poursuit: «Si l’objectif caché de cet atermoiement est de paralyser l’échéance présidentielle, cela devient encore plus grave, a insisté le général Aoun. Car cette échéance fait aussi partie du pacte au niveau de l’Etat, à travers l’arrivée à la tête de la République d’une personnalité chrétienne forte».
Quelques heures plus tard, le président Michel Sleiman a réaffirmé hier qu’il n’est pas question pour lui d’accepter une prorogation de son mandat, en précisant qu’il a déjà donné ses instructions pour que son discours de départ soit préparé. «Je souhaite pouvoir donner lecture du discours de départ au palais de Baabda et passer la main normalement à mon successeur», a-t-il dit à la cinquième édition de la revue de la Sûreté générale.
Dans sa feuille de route lancée mercredi, l’Eglise maronite a expliqué qu’il fallait «privilégier l’intérêt national supérieur pour sortir de la crise, à travers un dialogue transparent. L’élection d’un président est une nécessité pour le Liban».

Julien Abi Ramia

La feuille de route de Bkerké
«Le but de la charte nationale est d’aider à sortir de la crise politique et à élire un nouveau président», a déclaré le patriarche Béchara Raï dans une conférence de presse, à l’issue de la réunion mensuelle des évêques au siège du patriarcat maronite.
«Alors que le Liban traverse des crises graves et qu’il subit les répercussions des développements régionaux, le patriarcat appelle toutes les parties à œuvrer pour la consolidation et l’édification d’un Etat fort et capable. La situation actuelle est très grave et menace l’essence même du Liban. L’Eglise ne peut rester les bras croisés face à cette crise. L’édification d’un Etat conformément à la Constitution peut nous aider à sauver le Liban», a souligné le patriarche.
Mettant en garde contre la paralysie des institutions constitutionnelles et le non- respect des échéances électorales, l’Eglise maronite a condamné les ingérences dans les crises étrangères et la politique des axes. «La meilleure solution pour préserver la diversité est la neutralité du Liban, sous la protection de l’armée et des forces de sécurité». Une charte unanimement saluée, notamment par Saad Hariri.


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