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Nº 2978 du vendredi 5 décembre 2014

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Le dernier adieu à Sabah. «La ville, en fête et en délire»

Par-delà la mort, son souhait s’est réalisé. Ses funérailles étaient une fête, une fête nationale et populaire. Une ville, un pays en liesse et en pleurs a dit, chanté, dansé, pleuré et crié son dernier adieu à sa Sabouha, le dimanche 30 novembre.
 

 

«Ils sont venus, ils sont tous là, dès qu’ils ont entendu ce cri, elle (est morte) la mama». Ces célèbres paroles de Charles Aznavour se sont matérialisées dimanche dernier, le 30 novembre, journée de funérailles de la diva disparue, Sabah. Ce nom porteur en arabe de tellement de significations, cette artiste, cette légende, cette femme au sourire large et à la bonté de cœur flagrante. Cette même bonté, cette simplicité d’être qui transparaissaient dans sa présence, dans ses chansons, dans sa voix, dans son amour de la vie. La bonté naturelle, sans artifice, sans faux-semblant. Authentique, c’est exactement cela. Et c’est justement ce don de soi à la vie, sans comptes et sans compter, dans la fraîcheur d’une jeunesse perpétuelle, qui a incité la foule, les citoyens lambda, à investir les rues du centre-ville pour lui rendre l’hommage qu’elle mérite, au-delà de toute célébration officielle et figée. Celui qu’elle mérite même si, comme pour tous les grands du pays, cela se fait souvent quand il est trop tard.
Elle, qui souhaitait que ses funérailles soient une fête, eh bien, soit, le peuple a répondu présent. Des sourires, des larmes, des fleurs, du riz, des youyous, des pas de danse, des pas de dabké, des milliers de Libanais se sont rassemblés au cœur de la ville pour ce dernier adieu, une grande partie des citoyens ayant décidé, spontanément, naturellement, seuls ou en groupes, de la célébrer, à sa mort comme de son vivant, en faisant résonner bien haut ses chansons. Et c’est une foule compacte qui accueille le cercueil de Sabah, recouvert du drapeau libanais, de Hazmié, où elle a rendu son dernier souffle, au centre de Beyrouth où a été célébrée la messe présidée par le patriarche maronite Béchara Raï en l’église Saint-Georges.

 

«Dabké, dabké, ya chabab»
Retransmises en direct par les télévisions locales en un geste d’union de circonstance, les funérailles de Jeannette Gergi Féghali ont scotché les gens devant leurs petits écrans quand ils n’étaient pas dans la rue. Musiciens, danseurs, citoyens, l’ambiance était à la fête, larmes et sourires alternaient chez le peuple qui a rendu son amour à Sabah. Et c’est là le plus important: les officiels, cette fois, n’ont tenu qu’une place restreinte. Même s’ils étaient très nombreux à venir, des personnalités de tous bords, des politiques et des artistes, acteurs, chanteurs, musiciens, du Liban, mais aussi d’Egypte. Magida el-Roumi, Haïfa Wehbé, Najwa Karam, Madona, Salah Tizani, alias Abou Salim, Elias Rahbani, Ihsan el-Mounzer, Walid Toufic et sa femme Georgina Rizk… aux côtés des actrices et acteurs égyptiens qui ont fait le déplacement à Beyrouth, certains ayant partagé l’écran avec l’artiste disparue qui a joué dans plus d’une centaine de films, à l’instar de Yousra, Elham Chahine, Loublouba, Samir Sabri… Chacun, à son tour, a tenu à évoquer la disparue d’un mot d’amour, de tendresse et de tristesse. D’éternité surtout. Intacts, son sourire toujours pétillant, sa beauté, sa fraîcheur, sa voix. Toutes ces réalités, tous ces souvenirs émanant de ses photos placardées, brandies par la foule, de ses chansons résonnant dans les rues et ruelles du centre-ville.
Dès la fin de la cérémonie, c’est la dernière ligne droite, jusqu’à Bdedoun, où depuis dimanche soir, Sabah repose désormais en paix, dans le tombeau familial aux côtés de son père et de son oncle. Au son de la chanson Tallou Hbabna (Ceux qu’on aime sont arrivés), le cercueil de Sabah est arrivé sur le parvis de l’église Notre-Dame de Bdedoun, au moment où fusaient les applaudissements et les youyous, signe de deuil et de joie, comme il est de coutume dans les villages libanais où le cercueil, haussé sur les bras, ondoie encore une dernière fois, au son du glas, ultime danse avant qu’il ne soit porté en terre. Adieu Sabah!

Nayla Rached

 

 

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