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Nº 3028 du vendredi 20 novembre 2015

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Culture

Leila Buck présente Hkeelee. La mémoire écartelée de l’identité

Sur les planches…
Dans le cadre de l’échange culturel américano-libanais, les planches du théâtre Gemmayzé ont accueilli, le 10 novembre, la performance Hkeelee de Leila Buck.

Hkeelee, talk to me, parle-moi. Ou plus justement raconte-moi. Raconte-moi ce que tu étais, ce que fut toi, peut-être qu’ainsi je retrouverai mes racines. Hkeelee, c’est ce que disait Leila Buck à sa grand-mère maternelle d’origine libanaise, qui a émigré aux Etats-Unis, presque malgré elle, peu après 1975; tant d’émotions et d’histoires contenues en ce simple mot Hkeelee.

Une pièce interactive, une performance qui est loin de ressembler au «one man (ou woman) show» de plus en plus répandu, mais plutôt une sorte de hakawati à plusieurs visages, Leila Buck qui tente de rassembler la mémoire de sa grand-mère au moment où elle devient de plus en plus fragmentée, de plus en plus floue. Pour ne pas la perdre, pour ne pas perdre ses origines, ce pays qu’est le Liban et qui fait partie de son identité.

Avec assurance et une envie flagrante de partager ses histoires, celles de sa grand-mère, cette grande histoire commune, de vivre au même rythme que le public libanais une identité partagée, Leila Buck se révèle sur scène, sans aucune fausse pudeur. Parfois tout près des larmes, entraînant souvent le public dans l’instantanéité répétée de ses émotions côtoyant à la fois le sourire et la gorge nouée, Hkeelee émousse à la surface une toile de fils spatio-temporels qui finissent par se tisser étroitement et par sceller, au cœur d’une même problématique, celle de l’identité, des aires géographiques et l’humain dans ce qu’il a de plus fragile et de plus fort: la mémoire.

Entre son anglais paternel, sa langue maternelle, l’arabe, qu’elle a réappris plus tard au prix d’efforts monstres, et le français qui a émaillé la jeunesse de sa grand-mère, là-bas dans la montagne du Liban, Leila Buck nous fait voyager sur des nappes d’un citoyen du monde où Feyrouz chante avec Piaf et s’accorde aux paroles de Gebran Khalil Gebran sur les rythmes de l’Amérique profonde. Parce qu’avant de perdre sa téta, elle sentait qu’elle perdait sa mémoire, elle a décidé de l’en faire sienne et de l’offrir à qui veut l’entendre, en hakawati des temps modernes. Pour qu’un contact s’établisse par les mots, contenant et contenu. Hkeelee et l’identité deviennent une en assimilant sa multiplicité.

 

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