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Paul Khalifeh

Des murs et des pas mûrs

Au nom de la sécurité nationale et de la sauvegarde de l’emploi aux Etats-Unis, le président Donald Trump veut construire un mur fait d’un mélange de ciment et de lois protectionnistes. A peine a-t-il signé les premiers décrets pour l’édification de ces clôtures, censées être érigées aux frontières, que des barrières ont surgi à l’intérieur du pays. Ces décisions choquantes, prises par un président controversé, constituent un cocktail malodorant, qui n’a pas tardé à exploser en manifestations de colère dans les aéroports et les rues des villes américaines. La période de grâce est un luxe auquel Donald Trump n’a pas goûté.
D’aucuns jugeront déplacée la vague de condamnation soulevée dans le monde par les décisions du président américain. Il s’agit, somme toute, de mesures prises par un Etat souverain sur son territoire national. Cela aurait été vrai si les Etats-Unis avaient été un pays comme les autres. Or, ils ne le sont pas et ne l’ont jamais été. L’Amérique est une nation, dont le modèle a, de tout temps, inspiré les autres, dans le pire et le meilleur, dans le rêve et le cauchemar. Que d’autres dirigeants soient tentés de lui emboîter le pas est un danger réel, qui aboutira au cloisonnement du monde. A l’ère de l’Internet et de la mondialisation, celui-ci devrait plutôt se diriger vers davantage d’ouverture. Ce n’est pas de barrières dont le monde a besoin, mais de plus d’humanité dans les relations entre les Etats.
Ici au Liban, l’application de la «méthode Trump» risque de provoquer des catastrophes en chaîne, surtout que la classe politique se contorsionne pour tenter d’imaginer une loi électorale acceptée de tous. Le critère de la représentation est, certes, essentiel pour apaiser la vie politique. Il n’est plus permis, en effet, que les lois électorales soient confectionnées sur mesure afin de sauvegarder les intérêts personnels de certains dirigeants, au détriment d’autres composantes de la société. Mais, dans le même temps, si la juste représentation aboutit à la construction de murs entre les communautés, le résultat sera pire. Il faut s’entendre sur une formule susceptible en même temps d’assurer une représentation authentique de tous et de réduire, à leur plus simple expression, les cloisons entre les communautés religieuses. La tâche est difficile mais pas impossible. De nombreuses propositions allant dans ce sens existent et ont été débattues. Il suffit de les remettre sur la table.
Le seul inconvénient est que le temps manque. Non pas que les délais constitutionnels soient courts, car il y a toujours moyen de les rallonger. Le problème est que l’économie est plus que jamais tributaire de l’entente politique, sans laquelle les réformes urgentes et structurelles ne peuvent pas être lancées. Espérons que la classe politique ne ratera pas le coche une nouvelle fois, d’autant que les experts s’attendent à une relance de l’économie en 2017.    

 

Paul Khalifeh

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