Magazine Le Mensuel

Nº 2848 du vendredi 8 juin 2012

LES GENS

Wafaa Sleiman. Première dame et conseillère

 

Wafaa Sleiman
Première dame et conseillère

 

On a beau avoir l’habitude de rencontrer des personnalités et de visiter des résidences officielles, le palais présidentiel de Baabda possède une grande solennité qui ne peut laisser personne indifférent. Ce sentiment de malaise qui vous saisit à l’arrivée est aussitôt dissipé par la chaleur de l’accueil. Le sourire et l’amabilité de la Première dame vous mettent tout de suite à l’aise. L’entrevue, qui a lieu dans l’aile privée, dans un salon qu’elle a elle-même décoré avec beaucoup de goût, prend des allures d’une conversation amicale autour d’un café.

 

Rien ne prédestinait Wafaa Sleiman, née à Jbeil le 20 juin 1952, à occuper un jour les fonctions de Première dame. La jeune fille de 20 ans qui épousait le lieutenant Michel Sleiman, âgé alors de 24 ans, reconnaît avoir vu en lui un commandant en chef de l’armée un jour, mais pas un président de la République. Une tâche difficile dans des conditions délicates, pourtant la Première dame reconnaît que celle-ci devient plus facile après avoir passé de nombreuses années dans le service public, où elle a été très active. «Mais il existe quand même une grande différence entre les deux, la première étant loin de la politique alors que la seconde y est directement liée», confie Wafaa Sleiman. Epouse d’un officier, la Première dame a été habituée à assumer de lourdes responsabilités. Elle a connu des périodes difficiles, où son mari était absent. L’assassinat de Rafic Hariri, la vague d’attentats qui a secoué le pays, la guerre de Nahr el-Bared, le sit-in du centre-ville, ont tous eu lieu à un moment où le président Sleiman était encore commandant en chef de l’armée. «C’était l’enfer à la maison durant ces années», se souvient la Première dame. La peur, l’angoisse… Elle a connu tout cela. C’est d’ailleurs ce qui lui a donné la force d’affronter sa nouvelle charge.

La famille, une priorité
Pour cette femme dont l’emploi du temps est toujours surchargé, une priorité, ses enfants. «La famille m’est très chère et bien que mes enfants soient devenus grands et n’aient plus besoin de mon aide, ils restent ma priorité», explique la Première dame. Elle est mère de trois enfants, deux filles, Rita et Lara et un garçon, Charbel. Rita, dentiste, est mariée et mère de trois enfants, deux garçons et une fille. Lara, architecte, est mère de trois garçons, alors que Charbel a achevé ses études de médecine et prépare actuellement un MBA. «Nos six petits-enfants sont une réelle source de bonheur pour nous et nous essayons toujours de les voir le plus souvent. Ils sont ma bouffée d’oxygène après une journée fatigante», dit-elle. Elle entretient de très bons rapports avec ses enfants. «Ma relation avec eux a toujours été basée sur le dialogue, l’écoute et l’amitié. Malgré les circonstances difficiles, le président et moi essayons de les suivre de près», raconte la Première dame. Sa relation avec son époux est basée sur l’amour et le respect mutuels. «C’est sur cette base que nous avons construit notre famille et c’est cela qui nous a aidés à surmonter les événements que le pays a connus», raconte Wafaa Sleiman. Après toutes ces années de vie commune, la complicité qui existe entre eux reste très forte, et le président la consulte très souvent. Avec lui, elle discute ouvertement de tous les sujets. «J’attire son attention sur beaucoup de choses car je suis en contact direct avec les gens. Je lui transmets leurs soucis, leurs demandes. Je suis un peu comme un conseiller. Mon influence provient des échanges de points de vue autour de sujets sociaux reflétant les préoccupations des gens», dit-elle.
Une expérien
ce unique qui a beaucoup apporté à la Première dame sur le plan personnel. «Cette expérience m’a appris la patience, la bonne volonté et l’écoute des autres. Ce sont des traits de caractère que j’avais, mais ils ont été développés. Avant, je faisais face à plus de difficultés, maintenant, j’ai plus de responsabilités», confie Wafaa Sleiman. Ses occupations et ses activités sont nombreuses. Elle travaille actuellement sur les derniers détails concernant la création de sa fondation qui sera lancée dans quelques mois. L’action de cette fondation sera centrée sur la santé de la femme, notamment sur les problèmes cardio-vasculaires. Sa présence aux côtés du président dans les voyages officiels lui a donné l’occasion de rencontrer d’autres épouses de chefs d’Etat. «J’entretiens de bonnes relations avec tout le monde, mais je suis plus proche des Premières dames arabes car nous avons des intérêts communs liés au rôle de la femme dans nos sociétés arabes. J’essaie également de maintenir ces relations en leur présentant mes vœux aux différentes occasions», affirme la Première dame. Elle cite par exemple les félicitations adressées à Carla Sarkozy à l’occasion de la naissance de sa fille. Quant à ses relations avec les épouses des hommes politiques libanais, la Première dame confie être à égale distance de toutes. «Je fais une dissociation entre les personnes et la politique. Je respecte les personnes, j’aime les gens», dit-elle.
La Première dame est également très engagée auprès de la Commission nationale de la femme libanaise qu’elle préside et dont le but est d’aider la femme à élargir ses capacités. «Notre action se situe à plusieurs niveaux: légal, financier et social. Nous avons plusieurs plans d’actions et des campagnes ont déjà été lancées. Nous travaillons actuellement sur l’amendement des lois à incidence économique comprenant des dispositions discriminatoires à l’égard de la femme, la loi sur la sécurité sociale, la loi relative à la taxe sur le revenu ainsi que celle liée au transfert de la propriété», explique Wafaa Sleiman. L’action de la commission porte également sur une augmentation de la particip
ation de la femme aux conseils représentatifs, qu’ils soient municipaux ou parlementaires. «Nous avons signé des protocoles d’accord avec la Chambre de commerce, de l’industrie et de l’agriculture de Beyrouth et du Mont-Liban ainsi qu’avec la LAU pour donner à la femme l’opportunité d’effectuer des stages de formation dans l’industrie et l’agriculture», précise la Première dame. Elle annonce également le lancement, au mois d’avril, d’une stratégie qui s’inscrit dans le cadre de la politique de l’Etat de renforcer le rôle de la femme dans le développement du pays dans tous les domaines ainsi que la réalisation de l’égalité de la femme et de l’homme devant la loi. A part son action et son engagement au sein de la commission, la Première dame est très active dans le domaine social. «J’essaie autant que possible d’être présente sur le plan social en effectuant des visites régulières aux différentes associations libanaises. Je les reçois aussi au palais ou bien j’effectue des visites de terrain afin de définir leurs besoins. Ces visites ont lieu généralement dans des régions reculées du pays et je tente de leur apporter mon support et mon soutien», confie Wafaa Sleiman. Ses occupations ne s’arrêtent pas  là. C’est elle qui gère le volet culturel de la présidence. «Je représente le président dans le parrainage de toutes sortes d’activités culturelles telles que les expositions, les festivals et autres», dit-elle. Un agenda bien chargé. Joëlle Seif

 

Quatre dates clés

Quatre évènements majeurs ont ponctué la vie de la première dame. «Celui qui m’a le plus marquée c’est la première fois où j’ai été maman, en 1975, puis la première fois où je suis devenue grand-mère, il y a six ans», dit avec émotion Wafaa Sleiman. Les deux grands autres évènements sont le jour où son mari a été nommé commandant en chef de l’armée, le 21 décembre 1998, et le jour où il a été élu président, le 25 mai 2008.

Ce qu’elle en pense

Ses loisirs: «J’aime la marche et la natation. Ce sont deux sports que je pratiquais régulièrement, mais malheureusement je n’ai plus le temps de le faire avec toutes mes occupations. J’aime également le cinéma. Le dernier film que j’ai vu est Maintenant on va où, de Nadine Labaki. On s’attendait à me voir arriver toute seule mais j’ai convaincu le président de m’accompagner». 

Ses lectures: «J’aime beaucoup les romans, mais je n’ai plus l’occasion de lire comme avant. Mes lectures actuelles portent plus sur des études et des documents de travail sur le statut de la femme».

Sa devise: «La sincérité, la loyauté et l’amour. Sans ces vertus la vie devient une simple comédie».

 

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