Magazine Le Mensuel

Nº 2892 du vendredi 12 avril 2013

Hommage

Thatcher n’est pas morte, elle a arrêté de vivre. Lorsque le monde perd sa Dame de fer

Le 8 avril, emportée par une crise cardiaque à l’âge de 87 ans, Margaret Thatcher s’en va. Entre adoration et rejet, les Britanniques ont connu une personnalité fascinante qui a façonné le royaume.

Née en 1925 d’une modeste famille, diplômée de la prestigieuse Université d’Oxford en chimie, Margaret Thatcher, première femme devenue Premier ministre, de 1979 à 1990, dans une Grande-Bretagne frappée d’instabilité, a su imposer sa méthode, son ordre, sa précision et sa rigueur dans un pays imprégné de précarité au niveau économique, baignant dans une crise de chômage, de grèves et d’inflexibilité. Sa figure reste cependant très emblématique et ambiguë, à la fois abhorrée et idolâtrée. Prônant la liberté individuelle de l’homme et de la femme, cherchant à redresser l’économie sur des bases de réformes libérales radicales, suscitant la souveraineté britannique auprès de son peuple, à la tête du Parti conservateur, Margaret Thatcher a réussi, en onze ans de mandat, à révolutionner le monde.
L’époque avant-Thatcher se caractérise par un profond déclin aux niveaux économique, politique et culturel. La Grande-Bretagne est alors surnommée «L’homme malade de l’Europe», et ce, à cause des taux de fiscalité élevés que les Beatles ont notamment dénoncés dans leur chanson Taxman, et de la forte désindustrialisation qui brusqua le pays.
L’après-Thatcher est défini, quant à lui, par une mise en place de politiques économiques puisant leurs sources des valeurs «victoriennes de travail, d’ordre et de self-help», de l’école monétariste de Chicago, de l’école de l’offre d’Arthur Laffer et de l’Ecole autrichienne connue à travers Friedrich Hayek. Dès la fin des années 70, elle lutta fortement contre l’inflation en réduisant les impôts et les dépenses publiques, mais aussi en favorisant l’ouverture aux politiques et à l’économie étrangère. Ainsi, le thatchérisme qu’elle avait instauré constitua un tournant majeur, ramenant ainsi le pays à la croissance.
C’est dans ce sens que le film The Iron Lady, réalisé par Phyllida Lloyd, avec Meryl Streep incarnant le rôle de Margaret Thatcher, a provoqué la critique de ses enfants Mark et Carol Thatcher. Ces derniers ont indiqué: «Cela sonne comme une fantaisie de gauche». Quant au titre, La Dame de fer, il s’explique par le surnom attribué à Margaret Thatcher, en 1976, par le journal soviétique L’Etoile Rouge, à une époque où cette dernière affirma sa fermeté face aux grévistes de la faim en 1981 ou aux mineurs-grévistes en 1984-1985, dans le but de stigmatiser son anticommunisme. Le film fonctionnant sur le principe de flash-back, met en scène une Margaret Thatcher âgée et sénile, qui se souvient de ses grandes heures. Toutefois, vers la fin du film, nous ne pouvons que nous poser des questions: qu’est-ce qui a engendré ses convictions? Pourquoi a-t-elle mené la guerre des Malouines? Quelles furent les conséquences humaines d’une telle politique?
Cela n’empêche que les positions populaires restent divisées quant au départ de cette Dame de fer.

Natasha Metni

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