Magazine Le Mensuel

Nº 2914 du vendredi 13 septembre 2013

Presse étrangère

Attente insoutenable

Balancée entre intervention militaire aux conséquences désastreuses et peur de l’embrasement de la poudrière libanaise, la presse internationale s’inquiète pour le Pays du Cèdre.

La Croix
Le quotidien catholique La Croix s’inquiète pour le Liban et titre Tout le monde s’attend au pire.
Oui, il y a eu un mouvement de panique lié aux déclarations des Etats-Unis portant sur une intervention militaire. D’après le bureau du Centre des migrants situé à Masnaa, à la frontière syrano-libanaise, 20 000 personnes sont entrées au Liban pour la seule journée de jeudi dernier avec des pics de 1 000 personnes certaines heures, ce qui représente plus de dix fois la moyenne habituelle. Au Liban aussi, la population est très inquiète. Une intervention militaire en Syrie aurait d’énormes répercussions sur la région, notamment au Liban où des vagues de Syriens viendraient chercher refuge dans le pays qui commence à être saturé.
«Nous sommes face à une grave crise humanitaire à laquelle il est de plus en plus difficile de faire face car les fonds manquent», explique une humanitaire. Même le HCR va être obligé de réduire son aide: avant, 100% des personnes enregistrées recevaient une assistance. A partir d’octobre, seuls 70% des réfugiés, les plus vulnérables, en bénéficieront.
«Il y a de plus en plus de gens et de moins de moins de places», poursuit l’humanitaire. «Les conditions de vie sont donc de plus en plus difficiles. Dans les camps notamment, les conditions d’hygiène sont très mauvaises. Beaucoup de maladies se propagent comme la gale, la leishmaniose et toutes celles liées à l’eau insalubre ou problèmes d’hygiène comme les poux. Et puis, les réfugiés savent qu’on ne pourra pas contenir tout le monde et sont inquiets pour l’avenir.

L’Express
L’hebdomadaire L’Express décrit le Liban comme «l’autre bastion des rebelles syriens».
Les impacts de balles dans les murs d’immeubles de la ville témoignent de combats assez récents. Dans la région sunnite de Tripoli, très majoritairement opposée au dictateur syrien, les rebelles sont chez eux. En témoigne le drapeau de la rébellion exposé dans les rues à côté du drapeau islamique, ou ces affiches montrant les photos de jeunes gens tués au combat en Syrie ou à Tripoli.
On soigne les combattants blessés sur le front syrien dans des hôpitaux de fortune. Blessés au combat et directement amenés ici par des filières très bien organisées, les souvent jeunes combattants sont soignés en sécurité et repartent au combat. C’est le cas d’Hussein, combattant de 20 ans rencontré alors qu’il s’apprête à repartir lutter contre le régime de Bachar el-Assad. «J’ai peut-être 150 ou 200 éclats d’obus dans mon corps. Aux jambes, aux épaules… J’ai dû subir trois ou quatre opérations, je suis là depuis six mois, mais malgré cela, je vais rentrer en Syrie très facilement. Ici, il y a des combattants de mon unité, ils connaissent les routes pour m’emmener jusqu’à la frontière. Là, ils me donneront 200 dollars et, une fois de l’autre côté, je vais récupérer une arme et je monterai dans une autre voiture pour aller jusqu’au front».
Une myriade de brigades fait cause commune pour tenter de déloger le dictateur Assad. Souvent, les groupes de rebelles, plutôt modérés, font alliance avec des groupes extrémistes liés à al-Qaïda. C’est cette complexe coalition que les Occidentaux hésitent à armer massivement, mais qui peut, en attendant, trouver de l’approvisionnement à Tripoli.

 

La Presse
Le quotidien canadien La Presse brosse le portrait du cheikh Salem el-Raféï.
Virulent contre le régime syrien, le cheikh Salem el-Raféï était particulièrement visé dans le double attentat de Tripoli qui a fait 42 morts, soit l’attaque la plus importante depuis la fin de la guerre civile. Cet imam salafiste dérange le pouvoir en place en réclamant l’instauration d’un Etat islamique depuis sa villa sur les hauteurs de Tripoli, entourée de grands murs d’enceinte et surveillée par une quinzaine de caméras de vidéosurveillance qui fonctionnent 24/24. «Aujourd’hui, le peuple syrien a le droit, il a la liberté de choisir le dirigeant qu’il souhaite. Si les Syriens veulent un Etat islamique, c’est leur droit; il faut que la communauté internationale les aide à aller dans ce sens. Aujourd’hui, l’Occident s’oppose et a peur d’un Etat islamique en Syrie. On ne peut pas emmener le peuple syrien là où il n’a pas envie d’aller; s’il demande l’islam comme régime, pourquoi la communauté internationale le refuserait? Je pose la question».
Ce personnage connu dans tout le monde arabe est soupçonné d’être l’un des principaux soutiens financiers de la rébellion syrienne. S’il affirme que les fonds qu’il distribue proviennent exclusivement de la quête qu’il fait tous les vendredis auprès des fidèles de sa mosquée, des indices laissent penser que des fortunes privées du Qatar, d’Arabie saoudite ou du Koweït, y contribuent largement.

 

Slate
Le site Slate fait le point sur «les potentielles cibles françaises d’Assad au Liban».
De par sa proximité géographique et ses liens historiques avec la France, le Liban, où résident 2 000 Français et 20 000 binationaux, apparaît comme la cible idéale. La Finul comporte quelque 900 soldats français. Symbole militaire par excellence, elle pourrait faire l’objet d’éventuelles attaques. Beyrouth abrite plusieurs bâtiments, écoles et missions françaises; la résidence des Pins, située au niveau de l’ex-ligne de démarcation durant la guerre du Liban. A quelques centaines de mètres de la résidence se trouvent côte à côte, dans la rue de Damas, l’ambassade de France, le Centre culturel français, le Lycée franco-libanais, l’Institut français du Proche-Orient, ainsi que trois facultés de l’Université Saint-Joseph. Toujours dans le même secteur, siège l’Hôtel-Dieu de France. A Hamra, dans le quartier musulman de Beyrouth, se situent en outre l’Ecole supérieure des Affaires, ainsi que le Collège protestant français. Le vaste réseau d’écoles françaises ou homologuées au Liban témoigne de cette forte présence française. Une quarantaine d’établissements sont répartis sur l’ensemble du territoire, dont certains sont localisés dans des villes et zones «chaudes».

 

Le Monde
Même angle éditorial choisi par le journal Le Monde à quelques jours d’intervalle. Le contraste est saisissant.
Les Libanais, collés à leurs téléviseurs, ont accueilli avec surprise le report de frappes qu’ils croyaient imminentes après le départ de la mission des experts des Nations unies. Après quelques jours de stupeur, les habitants ont finalement repris leur routine. Les bouchons se sont à nouveau formés aux quatre coins de la ville et les gens se sont pressés aux terrasses des cafés et dans les bars. Beyrouth a retrouvé un peu de la douceur de vivre et de la désinvolture qui font sa réputation dans toute la région. Le répit pourrait être de courte durée. Beyrouth retient son souffle. «Barack Obama est en train de jouer avec nos nerfs. Il ne se rend pas compte du stress et de la détresse dans lesquels il met des millions de gens au Liban et en Syrie. On est au bord de l’attaque cardiaque ici», critique Nadine, une jeune trentenaire de Beyrouth.
«Dans toutes les guerres, on connaît le début mais jamais la fin. Il y a le risque de tomber dans une guerre totale», explique Fadi, plus inquiet encore que la Syrie et le Liban ne tombent aux mains des jihadistes. Des inquiétudes qui ont été renforcées par les menaces de représailles et de déstabilisation régionale brandies par Damas et ses alliés, le Hezbollah et l’Iran. n J. A. R.

 Inrocks
 Martyrs à l’affiche
Un petit encart lisible dans Les Inrocks:
Un keffieh autour du cou, le regard droit sous un chapeau mou militaire, Jassour Ismaïl, qui porte un collier de barbe, est un combattant du Hezbollah mort en Syrie. En août, lors de ses funérailles, dans la plaine de la Békaa, son portrait a été affiché 
sur son 
cercueil. Dans les régions libanaises où le Hezbollah est influent, les affiches de «martyrs» se sont multipliées depuis l’engagement public, en avril, de la formation armée dans la guerre en Syrie, aux côtés du régime. Produits de montage sur Photoshop, objets de retouches parfois flagrantes, ces portraits soulignent le rôle central de l’image dans la stratégie du Hezbollah et rejoignent les photos aux couleurs parfois délavées des combattants tués lors du conflit de 2006 contre Israël ou lors des décennies précédentes.

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