Magazine Le Mensuel

Nº 3014 du vendredi 14 août 2015

Confidences Liban

Confidences Liban

Un million et demi de réfugiés syriens au Liban
Quatre ans après le déclenchement de la guerre en Syrie, le nombre des syriens au Liban a atteint un million et demi. La seule nouveauté c’est la limitation des entrées des ressortissants syriens au pays du Cèdre, contribuant à la stabilisation de leur nombre auprès du Haut-commissariat des réfugiés à 1,2 million. Le problème reste le même et au contraire risque de s’aggraver et de devenir incontrôlable dans un proche avenir si les batailles se déplacent vers la région de Damas et sa périphérie. A ce moment, les mesures prises à la frontière libanaise seront sans effet et le Liban pourrait faire face à une crise humanitaire, politique et sécuritaire sans précédent.

Conseils américains
Le Liban a reçu trois conseils des Américains portant sur trois lignes rouges à ne pas dépasser. La première consiste à conserver une stabilité sécuritaire minimale, la seconde à ne pas toucher à la livre libanaise afin de préserver la sécurité sociale et économique des Libanais. En dernier lieu, ne pas pousser le gouvernement de Tammam Salam à la démission tant que la présidence demeure vacante. Ces conseils ont été prodigués à tous les responsables libanais de tout bord, sans aucune distinction. Par ailleurs, l’ambassadeur des Etats-Unis, David Hale, a quitté Beyrouth pour une visite de dix jours à Washington, au cours de laquelle il informera l’Administration américaine de la situation au Liban. Des informations ont fait état d’une rencontre entre Hale et John Kerry au Caire.  

Président: ni du 14 ni du 8 mars
Selon le président du Conseil national du 14 mars, Samir Frangié, la solution serait l’élection d’un président de la République qui ne fasse partie ni du 8 ni du 14 mars. Plusieurs noms sont avancés dont ceux de l’ancien ministre Jean Obeid, du gouverneur de la Banque centrale Riad Salamé et de l’ambassadeur du Liban au Vatican Georges Khoury, ainsi que du représentant de la Ligue arabe à Paris, Boutros Assaker. Il a également estimé que le choix du président de la République n’est pas une décision chrétienne.

 

Pas de retour au Futur
Quelques mois après son départ du Courant du futur, Khaled Daher indique qu’il est libre désormais de défendre la rue qu’il représente sans aucune contrainte. Il a indiqué que le contact avec Fouad Siniora est maintenu et que ce dernier l’avait appelé pour s’enquérir de sa santé après son hospitalisation. A son tour, Daher avait rappelé Siniora et l’avait rencontré. Il a également ajouté qu’Ahmad Hariri lui avait rendu visite au domicile familial dans le cadre de sa dernière tournée au Akkar. En revanche, il n’existe aucun contact entre Saad Hariri et Daher qui a affirmé qu’il n’a aucune intention de revenir au Courant du futur.
 
400000 élèves syriens au Liban   
Le ministre de l’Education, Elias Bou Saab, a soulevé le dossier des élèves syriens scolarisés au Liban dont le nombre a atteint 400000 dans les écoles publiques, alors que le nombre des écoliers libanais s’élève à 250000. Selon Bou Saab, il faudrait ajouter à ces chiffres 37000 écoliers palestiniens à la suite de la décision de l’Unrwa de fermer 58 écoles. «Que faire? La communauté internationale qui a payé des milliards pour financer la guerre en Irak et en Syrie rechigne aujourd’hui à payer quelques millions pour assurer l’enseignement de ces écoliers qu’elle a poussés elle-même vers l’exode», s’interroge Bou Saab.

Pas de président dans un proche avenir
Des sources diplomatiques européennes et arabes s’accordent à assurer que la crise de la vacance présidentielle ne verra pas de dénouement rapide avant la fin de l’été. L’heure de la solution, sur laquelle travaillent les instances internationales en coordination avec le Vatican, n’a pas encore sonné. Les efforts français auprès de Téhéran pour dissocier le dossier de la présidentielle des autres crises dans la région ont échoué, car l’Iran n’est pas prêt à passer du nucléaire aux dossiers de la région, qui sont reportés à l’année prochaine. La France misait sur une percée dans le dossier de la présidentielle pour refroidir l’atmosphère, mais elle s’est heurtée aux priorités iraniennes. Seuls les Etats-Unis peuvent mener les négociations avec l’Iran mais, pour le moment, les Américains cherchent à arracher l’accord du Congrès sur le dossier nucléaire.

Une décision sunnite-chiite  
Interrogé sur une éventuelle évocation du dossier présidentiel au cours de leur dialogue avec le Hezbollah, un membre du Bloc du futur a précisé que la seule fois où ce dossier fut abordé sérieusement, c’était à la suite du discours de Saad Hariri à l’occasion de la commémoration du 14 février. Les conditions posées par le parti de Dieu répondaient au profil du général Michel Aoun et les négociations se sont arrêtées sur ce point. Des sources du Courant du futur indiquent qu’il existe un accord sunnite-chiite basé sur le refus de tout changement sécuritaire, militaire ou politique dont le résultat n’est pas garanti. Aoun aurait dû réaliser ceci le jour où il n’a pas pu s’opposer à la décision de proroger le mandat du général Jean Kahwagi.

Inquiétudes diplomatiques
Des diplomates européens et arabes ont interrogé les responsables libanais sur la hausse de la criminalité et l’augmentation du nombre d’incidents individuels. Ceci est un indice qui marque clairement un recul dans l’autorité de l’Etat. Certains ont attribué ce fait aux divisions politiques aiguës, à l’augmentation du nombre des réfugiés syriens, ainsi qu’à la possession d’armes de la part de particuliers et le sentiment de pouvoir se faire justice soi-même.

Les chiites boycottent toujours al-Jadeed
Le directeur d’un centre de statistiques a déclaré qu’un sondage d’opinion a montré la persistance de la tension entre les téléspectateurs chiites et la chaîne de télévision al-Jadeed. L’agressivité manifestée à l’égard de sayyed Hassan Nasrallah a fortement indisposé les téléspectateurs neutres qui se sont détournés de la chaîne surtout après la fuite d’informations selon lesquelles il existerait des intérêts personnels entre son propriétaire et des responsables libyens. La chaîne avait lancé sa campagne contre Nasrallah à la demande d’un Etat du Golfe avant que la réponse ne vienne personnellement de la part du fils de Nasrallah. D’un autre côté, le défaut de réponse claire de la part des dirigeants libyens sur le sort de l’imam Moussa Sadr embarrasse les responsables chiites dans la relation Liban-Libye surtout après la confirmation par la justice italienne que l’imam Sadr n’est jamais parvenu en Italie et qu’il a disparu en Libye.

L’Iran plus dangereux qu’Israël
On s’attend à ce que le Liban assiste bientôt à une escalade dans le conflit politique et médiatique entre le Comité des ulémas de la résistance, présidé par le cheikh Khaled Hammoud, et le Comité des ulémas musulmans, présidé par le cheikh Ahmad el-Oumri. Des sources islamiques informées indiquent que cette prévision est fondée sur l’échec des tentatives de réconciliation entre Téhéran et l’organisation des «Frères» mondiale après que sa direction eut choisi de faire revivre son alliance avec l’Arabie. La source a précisé que le Comité des ulémas est devenu une tribune de réserve pour les «Frères» et a pris une série de positions rigoureuses dans lesquelles il affirme que «l’Iran est plus dangereux qu’Israël», ce qui a fortement indisposé les milieux sunnites libanais les appuyant. Le cheikh Hammoud a décrit certains membres du comité comme des voix israéliennes coiffées de turbans. Ceci signifie que le mouvement islamique arabe, dominé actuellement par la pensée takfiriste, a adopté la stratégie de se battre contre l’ennemi proche, c’est-à-dire les gouvernements arabes, laissant Israël massacrer les Palestiniens et attaquer les lieux saints musulmans et chrétiens à Jérusalem.  

Rendre à César ce qui est à César
Des sources proches du Futur indiquent que l’influence de l’Egypte sur le parti n’est plus un secret pour personne. Elles ont révélé que celle-ci est axée sur la préservation du sunnisme modéré de ce parti et de sa base populaire, ainsi que sur l’affaiblissement des symboles de l’extrémisme confessionnel dans sa direction. C’est dans ce cadre que s’inscrit l’opération visant à réduire l’influence de Fouad Siniora qui a monopolisé des ressources financières énormes appartenant initialement au Futur. Cet assouplissement a commencé par la levée de la mainmise de Siniora sur les finances de Dar el-Fatwa après le ressentiment des Emirats de sa gérance de leurs avoirs, jusqu’à la société Sukleen. Ces sources ont révélé que Siniora, qui a réussi à partager avec Maysara Sukkar la moitié des revenus et à obtenir des biens et un financement, est soumis aujourd’hui à de fortes pressions qui l’obligent à se rétracter en faveur de l’entrepreneur Jihad Arab, soutenu par Saad Hariri. Elles ont également dévoilé des informations selon lesquelles Hariri aurait demandé à Siniora de rendre la direction du duty free du port et de l’aéroport à la famille Hariri. Ces droits devraient être restitués à leurs propriétaires, Fouad Siniora les ayant détournés à un moment où la famille traversait des circonstances difficiles. Des fuites laissent entendre que le «représentant» est devenu associé dans la production du cigare, alors que le «représenté» ne trouve plus d’argent pour aider ses partisans et les soutenir.

Les dessous de la prorogation de la Chambre
Les observateurs pensent que l’interview accordée par le président Nabih Berry au quotidien égyptien al-Ahram a révélé le secret de la prorogation du mandat de la Chambre. Ils se sont arrêtés au récit de Berry disant qu’il appuyait la tenue d’élections législatives «mais le Courant du futur, un parti politique principal, a refusé d’y participer. J’ai rencontré Saad Hariri pour le convaincre, mais il a menacé de présenter sa démission du Parlement. La prorogation était devenue impérative surtout que le Bloc du Futur est le plus grand bloc parlementaire. Aurais-je dû laisser la voie aux extrémistes? Si j’avais fait des élections sans le Futur, les extrémistes seraient arrivés au Parlement». Les observateurs ont constaté que la prorogation était l’alternative réaliste à l’accession des extrémistes à la Chambre.  

 

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