Magazine Le Mensuel

Nº 3074 du vendredi 3 février 2017

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Sarah Himadeh. Une Libanaise à Hollywood

En tête d’affiche du film The Miller Prediction, Sarah Himadeh vit à Los Angeles, où elle poursuit une carrière d’actrice et de comédienne, entre le cinéma, le théâtre et la télévision. Magazine l’a rencontrée.

«Je n’ai jamais voulu d’une existence normale», confie Sarah Himadeh, même si l’envie lui prend souvent d’abandonner, parce que la vie d’acteur est un combat permanent, notamment lors des auditions. A New York, où elle a étudié au William Esper Studio, spécialisé dans la technique Meisner, elle prend part à quelques pièces off-Broadway, et à quelques films. Plus tard, à Los Angeles, la galère et une rude compétition l’attendent. «Il y a dix mille acteurs qui s’installent à L.A. tous les mois. Neuf mille qui repartent», indique-t-elle. Là-bas, il lui a été difficile de trouver un agent la représentant. Avec son style atypique, ni blonde, ni aguicheuse, ni plastique, et munie de son passeport canadien, elle avait besoin d’un permis de travail, d’autant plus que certains agents, appâtés par la perspective de gains rapides, oublient l’authenticité du travail. Plus de 300 formulaires envoyés, de multiples auditions, avant qu’elle parvienne à trouver un agent et un manager.
Un jour, elle reçoit un appel urgent de son agent: «Tu dois aller tout de suite à cette audition». Pas le temps de répéter, elle le fera en attendant son tour, dans l’antichambre. Immédiatement, elle se sent connectée avec le personnage qu’on lui demande d’interpréter: une femme introvertie, émotionnelle, solitaire, silencieuse, souvent en prière. Durant l’audition, on lui fait jouer la scène de plusieurs manières, pour la tester, pour voir comment elle réagirait sur le plateau de tournage où tout peut changer d’un moment à l’autre. Toute en flexibilité, comme dans une improvisation de jazz où les bases et la liberté se côtoient, Sarah Himadeh obtient le rôle de Parisa, dans The Miller Prediction, aux côtés de Jesse Woodrow et Tala Delvarani.
Réalisé par Javier Ronceros, ce film est un drame d’époque, un western historique persan. Le tournage d’un mois, à New Mexico, s’avère difficile pour Sarah, en raison du caractère de son personnage. Pour se fondre dans son rôle, elle a dû couper les liens avec sa famille au Liban. Cette séparation, elle y avait souvent recours, jusqu’à ce que le jeu lui fasse comprendre que «même si chacun croit être particulier, nous sommes tous similaires, malgré nos circonstances différentes».

L’appel de la vocation. Comme souvent chez les artistes, Sarah Himadeh est maladivement perfectionniste. «En tant qu’artiste, on est continuellement dans l’autocritique, on sent qu’on peut toujours faire mieux, à l’image de cette 'divine insatisfaction' qu’évoquait la chorégraphe Martha Graham, qui constitue une forte motivation, difficile à accepter. Mais je l’accepte», souligne-t-elle.
C’est à un âge relativement avancé que Sarah s’est lancée dans les arts de la scène. Dans une autre vie, elle aura été banquière, après avoir étudié la biotechnologie, et aspirait à devenir médecin. Taraudée par l’angoisse et l’insomnie, elle détestait son travail. «Je savais que ce n’était pas moi. Je savais que je voulais devenir actrice, depuis l’école primaire, quand j’ai participé à une représentation de Hansel et Gretel. Mais en tant que femme au Moyen-Orient, je n’ai jamais senti que j’avais le droit de le faire. Quand j’ai changé de carrière, mon père ne m’a plus adressé la parole pendant quelques temps. Maintenant je le comprends, c’est une sale industrie, où avoir du talent et travailler dur ne sont pas une garantie de succès. C’est essentiellement une question de chance, il faut être au bon moment au bon endroit». Et son père? «Aujourd’hui, il est tellement enthousiaste, dès que je me sens un peu déprimée, il me remonte le moral et m’encourage».

Un combat permanent. Sarah se rappelle d'une rencontre avec Adrien Brody, lors d’un gala organisé par Leonardo DiCaprio. Alors qu’elle évoque avec lui la brutalité des auditions, l’acteur lui conseille de se trouver, en parallèle de son métier d’actrice, une autre voie créative, comme lui, qui peint à ses heures perdues. Elle crée alors l’entreprise Fait main, grâce à laquelle elle expose des colliers et accessoires d’artistes de différents pays en voie de développement, afin d’avoir un impact positif sur la société.

www.faitmain.co

Nayla Rached

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