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Nº 2853 du vendredi 13 juillet 2012

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A play entitled Sehnsuchtde Badran Roy Badran. Le cinéma comme dialogue national

A play entitled Sehnsuchtest le premier long métrage de Badran Roy Badran. Un film expérimental et artistique, le premier du genre au Moyen-Orient, qui sera projeté durant deux semaines au Cinéma Métropolis, à l’Empire Sofil.

Le 12 juillet, commence la projection du film A play entitledSehnsuchtau cinéma Métropolis. 12 juillet. Une date-clé dans l’histoire du Liban. C’est le 12 juillet 2006 que la guerre des 33 jours a éclaté. Badran Roy Badran, le réalisateur et le scénariste, soulève l’importance de ce point. Un point qui correspond entièrement à son film, sa vision, son approche du pays.
Sehnsucht est un mot allemand, intraduisible dans une autre langue et qui signifie «la nostalgie d’un temps aujourd’hui disparu à jamais. La seule manière de retrouver le contact avec cet idéal est à travers la mort, le feu. Goethe dit que ce moment idéal n’était peut-être pas tellement idéal, mais étant petit, on se rappelle que ce sentiment était très beau. Et c’est ce qui reste», selon Badran Roy Badran.
L’histoire de Sehnsuchtn’est pas à proprement parler une histoire simple à narrer. C’est l’approche expérimentale et artistique du film qui fait toute la différence. A play entitled Sehnsucht suit le personnage de Bernard Zeidan, un astronome libanais qui prétend avoir vu une planète exploser en 1975. Il passe quatorze années de sa jeunesse à essayer d’écrire les détails de cette explosion. En 1989, il achève son ouvrage qu’il intitule Sehnsucht. C’est l’échec total. Bernard sombre dans son obsession qui le conduit directement à la folie. Mais son ouvrage est découvert par un jeune hypnotiseur allemand, Dr. Ulrich, intrigué par le fait qu’un Libanais utilise un mot tellement allemand. Dr. Ulrich arrive au Liban le 19 mai 1998. Direction l’asile où Bernard est interné. Après avoir gagné sa confiance et son attention, il l’hypnotise et pénètre son esprit jusqu’à l’inconscient. Il applique son traitement particulier qui consiste à diviser l’esprit de Bernard en quatre personnages: l’intellectuel, le philosophe, l’introverti, le clown. Ces quatre personnages qui forment la psyché de l’astronaute vont jouer une pièce qui s’intitule Sehnsucht, du titre de l’ouvrage de Bernard. Avec Vartan Meguerditchianas, Christian Ghazi, Gianni Fau, Adony Maalouf, Cyril Bassil, Ghadi Yaghi et Ziad Najjar
Mais commençons par le commencement. Qui est Bernard Zeidan? Et a-t-il réellement existé? «Je préparais un documentaire sur les effets ressentis après la guerre, répond Badran. Parmi les personnes que j’ai rencontrées dans un asile de fous, j’ai vu un astronome qui ne cessait de griffonner sur les murs. Je me suis très attaché à lui, à tel point que j’en ai oublié le documentaire. Il est devenu un personnage à part entière. Je voulais savoir ce qu’il pensait, ce qu’il dessinait, ce qu’il voyait». Durant deux ans, Badran va tous les jours à l’asile voir Bernard, dont il changera le patronyme par respect à la personne et à sa famille. «Après sa mort, j’ai senti que je devais parler de lui. La seule manière de pouvoir parler, vivre, penser et sentir comme lui était de créer une fiction» sur cette «fuite d’une réalité qui n’est pas belle et qu’on vit, sur la nostalgie d’un paradis qui n’existe plus, et dont le seul moyen d’y parvenir est à travers la mort». Dans le cas de Bernard Zeidan, ce paradis perdu est tout simplement «ce tout petit moment avant que la guerre n’éclate et qui ne reviendra jamais».

La culture de la guerre
Progressivement les idées commencent à germer jusqu’à avoir le film, son histoire, son côté fictionnel, son côté artistique, cette entrée de plain-pied dans l’inconscient de Bernard. «On ne peut traiter un cas aussi extrême de manière superficielle ou comme un documentaire. Je dois sentir avec le personnage. Et pour pouvoir le faire, je dois vivre avec lui. Mais comment puis-je vivre avec lui, comment l’audience pourra-t-elle comprendre ce sentiment si elle ne sait pas comment il pense. L’inconscient n’est pas juste un monde de rêves, mais un ensemble d’images et d’idées qui grandissent avec nous depuis l’enfance».
Pour Badran Roy Badran, Bernard Zeidan n’a été que le déclencheur pour qu’il puisse parler de la guerre libanaise. «Je suis né durant la guerre. Et tous les sentiments et toutes les images que j’ai portés en moi depuis, c’est ce qui a donné ce résultat, qui a créé ce film. Comme tous les autres jeunes Libanais, je me disais que je ne voulais pas faire un film sur la guerre. Mais il faut parler de la guerre, il faut dire à quel point elle était douloureuse, horrible, à quel point elle a détruit le Liban. Le pays ne sera plus jamais comme avant. C’est fini. Il va rester comme il est». Il s’agit donc de donner corps à un sentiment que vit aujourd’hui tout Libanais. «Notre culture c’est la guerre. Pourquoi fuir? Il faut en parler. Les Libanais ne se sont pas encore retrouvés autour de la même table pour discuter du passé. La guerre s’est terminée et le lendemain tout était oublié. C’est inacceptable. Le pays se dirige vers le chaos du fait qu’on ne discute pas, qu’on n’en parle pas. Le cinéma est capable de cela, d’engendrer ce dialogue».
C’est pour cette raison que le film Sehnsuchttourne autour de dates-clés de l’histoire du pays. En 1975, Bernard Zeidan voit une planète exploser. Et c’est le début de la guerre libanaise. En 1989, il achève l’écriture de son livre. Et c’est la fin de la guerre. Le film est projeté en salles dès le 12 juillet. Et c’est la date qui marque le début de la guerre de 2006. «Sehnsuchtest un film sur le sentiment de la guerre et non la guerre en elle-même. C’est à propos du traumatisme que je vis aujourd’hui, que nous vivons tous aujourd’hui».
Dès l’âge de 23 ans, Badran commence à écrire le scénario du film, qui prendra plus de cinq ans de travail, entre l’écriture du scénario et le tournage, aux côtés de sa productrice Céline Abiad et de Beiroots Productions, qui avaient placé toute leur confiance en lui. Et en soi, c’est déjà un défi. Un défi qu’ils ont fièrement relevé, parce qu’ils n’avaient qu’un seul adage en tête, qu’ils ont tenu à appliquer jusqu’au bout: pas de compromis. «Ce n’était pas juste une question de budget serré. Même avec plus de liquidités, j’aurai fait le même film. On essayait de réaliser quelque chose en partant de rien. C’est ce qui pousse l’artiste à aller encore plus loin». D’autant plus que pour Badran, il s’agit avant tout d’un travail d’équipe où personne n’impose à l’autre une manière de travailler.
Badran a confiance que le film Sehnsuchts’adresse à tous les Libanais. Même si «l’audience aujourd’hui n’est pas habituée à ce genre de films, préférant plutôt les films commerciaux. Ce film est comme de la musique. Chaque éventuel spectateur aura à accepter l’idée qu’il doit sentir le film, non le regarder. Il s’agit de percevoir un sentiment et non de suivre une histoire».

Nayla Rached

 

Les DOFF du rire
Du 4 au 7 juillet, le Théâtre Monnot a accueilli le spectacle Yass & Les DOFF du rire. L’humoriste français d’origine libanaise, Yass, a voulu créer à Beyrouth le premier festival du rire pour, comme il dit, «s’éclater avec (ses) potes de la scène parisienne», Donel Jacksman, Djal et Saidou Abatcha. Durant deux heures, c’était une véritable «explosion de rire». Les quatre humoristes se sont succédé sur scène, ayant chacun sa touche particulière, entre poésie, humour débridé, improvisation, interaction spontanée avec le public, blagues, mouvement du corps, rythmes chaloupés, mimiques et musique. Tout le public libanais vibrait avec eux. C’est qu’ils se sont amusés notamment à décortiquer les habitudes et la réputation des Libanais, entre esprit commerçant, hommos national, nuits chaudes, chirurgie esthétique, corps toujours ondoyants… Yass et ses compères ont prouvé leur attachement à Beyrouth, provoquant rires incontrôlés, fous rires, rires, sourire et nostalgie. Deux heures de spectacle qui vous rendent légers, joyeux, qui vous libèrent, vous font sortir hors du temps et de l’espace. Deux heures de spectacle qu’on garde en tête.

N.R.

 

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