C’est aux côtés de son père qu’il a commencé très jeune à faire de la politique. A 19 ans, il connaissait déjà les habitants de la région et lorsqu’il est élu pour la première fois député en 2005, alors qu’il est âgé de 30 ans à peine, rien ne change vraiment pour lui. La politique, il s’y était impliqué depuis de longues années. Portrait de Hady Hobeiche, député du Akkar.
C’est dans sa résidence à Adma que Hady Hobeiche nous reçoit. Depuis la tentative d’assassinat de Boutros Harb et pour des raisons de sécurité, ses réunions se font chez lui. Sur la terrasse donnant sur la magnifique baie de Jounié. Ponctué par les rires et la présence de la petite Christina, notre entretien a lieu. Fils de l’ancien ministre et député Fawzi Hobeiche, Hady Hobeiche est probablement l’un des rares enfants d’un responsable à faire de la politique du vivant de son père. «Ceci dénote beaucoup de grandeur chez mon père, qui a renoncé à la chose publique en ma faveur alors qu’il était encore en pleine force de l’âge», confie Hady Hobeiche, qui est le plus jeune de la famille composée de trois enfants : Lina, Ziad et Hady. «J’ai des amis qui ont plus de 50 ans et qui ne peuvent pas encore se présenter aux élections, car leurs pères ne veulent pas leur céder la place alors qu’ils sont déjà d’un âge bien avancé», raconte le député du Akkar. C’est avec fierté et reconnaissance qu’il parle de son père. «J’ai beaucoup appris de lui et jusqu'à présent je continue à compter sur lui et avoir recours à lui dans beaucoup de choses. Je profite pleinement de son expérience et de ses conseils, surtout sur le plan législatif», dit-il. Avec son frère aîné Ziad, il aidait son père dans ses fonctions de député et de ministre. Hady Hobeiche était très présent sur le terrain et c’est souvent lui qu’on appelait au lieu de son père. Puis, Ziad a dû voyager pour affaires, un certain temps et c’est Hady qui a continué, bien que maintenant les deux frères, avocats de formation tous les deux, collaborent ensemble dans le même cabinet. «Ziad est un grand support pour moi», affirme Hady Hobeiche. Il faut dire que chez les Hobeiche la politique est une affaire familiale. «Quand il y a des élections, toute la famille est mise à contribution et se sent directement concernée. Chacun prend des vacances et on se retrouve tous à Kobeyate», raconte le député.
C’est en 2005, après l’assassinat de Rafic Hariri, qu’un groupe de jeunes dont Hady Hobeiche faisait partie, s’est rassemblé autour de Saad Hariri, tous unis par les mêmes principes. «Séduit par cette idée, mon père m’a dit: tu prends ma place. Je me repose, mais je continue à t’aider», raconte le député du Akkar. Selon Hady Hobeiche, la fonction de député comprend trois volets : celui des services et des relations sociales, l’action politique à proprement parler et l’action de légiférer. «Chacun de ces volets est très prenant à lui seul. La plupart des députés se consacrent à l’un d’eux. Moi, je fais les trois en même temps et en cela mon père m’aide énormément», confie Hobeiche. C’est lui personnellement qui se rend dans les administrations pour poursuivre telle ou telle formalité. Il connaît la quasi-totalité des employés, du plus petit dans la hiérarchie au plus élevé, depuis le temps où il aidait son père. Les rouages de l’administration n’ont aucun secret pour lui. «Souvent, un simple employé peut être plus utile qu’un ministre et mon père m’a toujours appris à commencer la relation par le bas et non pas par le haut», explique Hady Hobeiche.
Pour lui, la députation est un moyen, le plus important c’est d’être un zaïim. Il ne croit à la politique en héritage qu’au cas où l’héritier le mérite. «Lorsque l’héritier est à la hauteur, il peut bénéficier des atouts et de l’expérience de son prédécesseur et passer d’une étape à l’autre rapidement puisqu’il a l’habitude de la politique, mais je suis totalement contre lorsque l’héritier n’en est pas digne», confie Hady Hobeiche. Pour avoir vécu dans une famille politique, le député du Akkar savait parfaitement à quoi s’attendre, et son entrée au Parlement ne lui a pas réservé des surprises. «Je n’ai pas été déçu, car je connaissais parfaitement la réalité. C’est la manière dont le pays est composé qui est en elle-même problématique et ne laisse pas aux gens beaucoup d’illusions. Les divisions qui existent ne nous permettent pas de réaliser toutes nos aspirations. Je fais tout ce que je peux et sans être totalement satisfait, je considère que je fais beaucoup, vu les circonstances», dit Hobeiche. Malgré tout, il continue à croire en ce pays. «Je veux que mes enfants grandissent et vivent ici», dit-il. Marié à Cynthia Karkafi depuis 2006, ils ont trois enfants : Christina (5ans), Tiffany (2 ans) et Charbel, né le 1er juillet 2012. Pour Hady Hobeiche le 1er juillet est une date mémorable. En effet le député est né le 1er juillet 1974, son épouse Cynthia et son fils Charbel sont également nés un premier juillet. «Charbel a été prénommé en hommage à Saint-Charbel, car après deux filles, on voulait un garçon». Pourtant, il ne cache pas sa peur. «La situation en Syrie est mauvaise et elle a forcément des retombées sur le Liban». Pour lui, depuis 1943, le problème réside dans le confessionnalisme. Chaque communauté veut détenir à elle seule le pouvoir et toutes les prérogatives. «Il faut revoir la formule et fonder de nouvelles bases pour l’avenir du pays. Le Liban est le seul pays au monde où il existe des équilibres communautaires et c’est pour cette raison qu’aucun pays ne connaît les problèmes que nous avons», affirme le député du Akkar. Il a bien l’intention de se représenter pour un troisième mandat en 2013. «La politique on y entre facilement, mais on n’en sort pas», dit-il. Il considère que sa fonction ne l’a pas changé et qu’il est resté le même. Il a beaucoup d’aisance à s’exprimer en public. Il se souvient encore de sa première entrevue télévisée sur la Future TV. «Nous étions 7 candidats qui devaient passer à l’antenne en direct. On avait tous le trac, alors je me suis lancé en premier. Je n’avais rien préparé et je ne savais même pas de quoi on allait parler. J’ai découvert à ce moment-là que j’étais très à l’aise devant la camera et depuis, j’ai de l’aisance à parler en public», confie le député.
Ses nombreuses occupations ne lui laissent pas beaucoup de temps libre. Totalement dévoué à sa tâche, il a tendance à négliger sa personne et ses affaires propres pour rendre service à quelqu’un d’autre. Même s’il tombe malade il ne prend pas la peine de consulter un médecin. Il a fallu qu’il soit à l’hôpital, au chevet de sa femme qui accouchait, pour accepter de passer une radio de son genou dont il souffrait après un match de volleyball. Résultat: il a dû garder la maison pendant 5 jours. «L’avantage, c’est que j’ai pu rester ces quelques jours en famille, auprès de mon fils qui venait de naitre», dit le député en souriant. Les voyages qu’il faits une à deux fois par an avec son épouse lui donnent l’occasion de se reposer et de se ressourcer, loin de l’agitation à laquelle il est habitué. «Cette année, nous pensons emmener avec nous Christina», confie-t-il en regardant sa fille faire de la bicyclette. Christina, un rayon de soleil dans la grisaille de la vie politique…
Joëlle Seif
L’armée au Akkar
La région du Akkar est connue pour être le réservoir humain de l’armée. Mais les derniers événements ne sont pas sans provoquer des remous dans la région, après la mort des deux cheikhs. Les propos tenus sur la présence de l’armée, ne représentent, selon le député, que des prises de position à chaud. «Le sang provoque des réactions instantanées qui ne reflètent pas forcément la réalité. D’ailleurs, quelques heures après, le communiqué officiel apportait son appui à l’armée. De toute façon la décision d’ouvrir de nouveau le dossier et d’élargir les investigations va calmer les esprits et détendre l’atmosphère. Nous ne voulons pas que ce dossier soit couvert et nous ne voulons pas attaquer l’armée. Mais il faut que la vérité soit faite autour de cette affaire, ceci est une garantie pour l’armée. Si les choses ne sont pas réglées, une forme d’hostilité régnera envers l’armée dans la région. Celui qui a commis une faute doit en payer le prix», explique Hobeiche.
Ce qu’il en pense
Ses loisirs: «Je n’ai pas le temps de faire du sport, mais après 15 ans d’arrêt j’ai décidé de m’y mettre. Je ne lis pas beaucoup non plus, faute de temps».
La technologie: «Je ne suis pas adepte de Facebook ni de Tweetter par manque de temps. Mais actuellement, je songe à créer une page sur Facebook qui sera gérée par quelqu’un d’autre».
Sa devise: «Servir les autres. Je le dis et je le pense vraiment. Je ne le fais pas pour des considérations politiques ou électorales, mais c’est pour moi un réel plaisir de pouvoir faire quelque chose pour les gens. Faire une bonne action et rendre service à quelqu’un me rendent tout simplement heureux».