Magazine Le Mensuel

Nº 2864 du vendredi 28 septembre 2012

Expositions

L’islam des lumières se dévoile au Louvre. Une balade dans la civilisation islamique

Le mythique musée parisien braque les projecteurs sur mille ans d’histoire des arts de l’islam. L’occasion de découvrir d’un autre œil une brillante civilisation islamique née en 622, avec la révélation du Coran au Prophète Mahomet. Une exposition nécessaire en ces temps troublés.

Rarement une exposition ne pouvait tomber autant à pic. Alors que le monde musulman est en ébullition à cause d’un film inepte et sans valeur artistique, à Paris, le musée du Louvre décide, lui, d’offrir à voir l’islam des lumières. Une belle initiative qui mérite d’être saluée, d’autant que le musée a fait les choses en grand.
Parvenus dans la cour Visconti, les visiteurs aperçoivent une immense verrière dorée, signée par Rudy Ricciotti et Mario Bellini. Pour les uns, elle évoque un gigantesque tapis volant. Pour les autres, de bien mystérieuses dunes de sable. Chacun son interprétation. En dessous de cette verrière lourde de 135 tonnes, c’est rien moins que 3000 mètres carrés de nouveaux espaces qui accueillent le nouveau Département des Arts de l’islam du Louvre.
A l’intérieur, les visiteurs cheminent sur un sol de dalles noires, incrustées de copeaux de laiton. L’exposition, qui rassemble pas moins de 3000 objets, met à l’honneur une civilisation islamique qui s’épanouit sur plusieurs continents, de l’Espagne à l’Inde. Elle témoigne également de l’opulence et du raffinement présents dans les cours royales et princières de l’époque, que l’on se trouve à Damas, Bagdad, Le Caire ou encore à Ispahan, Samarcande, Cordoue, Agra ou Constantinople. Les arts du métal, de la céramique, du verre, du tapis mais aussi de la calligraphie apparaissent ici dans leur plus parfaite expression.
L’exposition se scinde en quatre temps chronologiques. D’abord de 632 à l’an 1000, de la fondation à l’Empire, puis de l’an 1000 à 1250, avec la rupture et la recomposition du monde islamique. Vient ensuite le deuxième souffle de l’Islam, de 1250 à 1500, puis de 1500 à 1800, les trois empires de l’Islam.
Comme pour toute exposition, celle-ci dispose d’œuvres maîtresses, incontournables de la visite, choisies par Sophie Makariou, la directrice du département. L’aiguière du Trésor de Saint-Denis a eu un parcours plus que mouvementé. Taillé dans du cristal de roche en Egypte, vers l’an 1000, à la cour des Fatimides, elle fut récupérée en Sicile par Thibaut de Blois-Champagne, puis offerte à l’abbaye royale, avant d’être confisquée durant la Révolution française.
Le baptistère de Saint-Louis mérite aussi que l’on s’y arrête. Ce bassin mamlouk, en cuivre ciselé d’or et d’argent, livre un récit figuratif sans doute en allusion aux croisades, avec des dignitaires en armure, des combats sanglants, des animaux et des créatures aquatiques. Ce baptistère servit d’ailleurs au baptême des enfants de France, dont le futur roi Louis XIII.
Enfin, la fameuse pyxide d’al-Mughira, une boîte ronde à parfums, mérite que l’on s’y arrête. Réalisée dans un seul bloc d’ivoire ciselé pour le dernier fils du calife de Cordoue, cette pyxide s’avère être, plus qu’une simple boîte à parfums. Selon Sophie Makariou, il s’agit en effet d’une «allégorie aux luttes de pouvoir, qui se terminent par la mort du jeune prince, étranglé au lendemain du décès du calife auquel il devait succéder».
Bien sûr, bien d’autres objets enseigneront beaucoup aux visiteurs sur l’islam des lumières. Un islam mal connu en Occident et qu’il convient de valoriser. La promenade au sein du Département rénové des Arts de l’islam se déroule sur deux niveaux. Mais il paraît parfois difficile de s’y retrouver et l’on peut s’égarer entre deux époques bien distinctes. A voir également, le Lion de Monzon, en bronze, qui servait de bouche de fontaine et dont la date de fabrication reste assez floue, entre le XIIe et le XIIIe siècle. Le département livre aussi un impressionnant mur ottoman de 12 mètres de long, restauré.
A voir aussi, des relevés à l’aquarelle de somptueuses mosaïques de la mosquée de Damas, datant des années 30 et accrochés pour la première fois sur un même mur. Figurent également dans l’exposition, des stèles du Caire, ainsi que le matériel des fouilles françaises de Suse, dans le sud-ouest de l’Iran.
Heureusement, pour guider les visiteurs dans leur balade de la civilisation islamique, le Louvre a mis en place un dispositif de panneaux et de cartes pour résumer le contexte géopolitique de chaque époque. Les cartes s’éclairent afin de donner vie aux différents mouvements de population ou de colonisation. Par endroits, des vidéos permettent de se plonger dans certaines thématiques, comme celle sur les soldats mamelouks. Les techniques employées par les artistes de l’époque sont aussi mises en lumière. Et pour clore l’exposition, une dernière salle en forme de rotonde permet de s’asseoir autour de plusieurs écrans pour la lecture de contes traditionnels. Enfin, une vidéo retrace de manière très pédagogique les principales caractéristiques de l’islam.

Jenny Saleh
 

Infos pratiques
Billet à 11 euros pour les collections permanentes. Gratuit pour les moins de 26 ans. Le musée du Louvre est ouvert tous les jours de 9h à 18h, sauf le mardi.

18000 objets à exposer!
Le Département rénové des Arts de l’islam du musée du Louvre est en projet depuis de nombreuses années. En effet, depuis la fin des années 70, pas un seul objet n’avait été exposé. Alors qu’au total, le musée du Louvre associé à celui des arts décoratifs n’en détient pas moins de 18000 dans ses réserves!
L’ouverture de ce département au public aura nécessité un investissement de 100 millions d’euros, en partie financé par le mécénat de l’Arabie saoudite, du Maroc, du Koweït, d’Oman et de l’Azerbaïdjan.
 


 

Serge Najjar
Lines within
Jusqu’au 19 octobre à la Galerie Kettaneh Kunigk.
 

Serge Najjar est avocat et s’est découvert dernièrement un talent de photographe et pas des moindres! Il a photographié des vues d’architectures urbaines. Un an et demi plus tard, le voilà qui expose une trentaine de très belles œuvres. Des compositions architecturales, de magnifiques images qui dévoilent une sensibilité certaine. Serge Najjar immortalise la seconde, l’instant, en noir et blanc. Ses silhouettes ont l’air d’être solitaires et sont atemporelles. Pour lui, tout a commencé quand il a pris des cours à l’Université pour tous. Ces cours vont être un tremplin pour débuter une carrière artistique. «J’ai toujours aimé la photo et, ayant eu la chance de grandir dans un environnement propice, en matière d’art j’avais l’œil, mais je n’aurai jamais pensé pouvoir faire, moi-même, une quelconque création artistique», explique-t-il. Depuis, dès l’aube, Serge, sa caméra au poing, parcourt les rues de Beyrouth, mais aussi de Paris et de Berlin… Le résultat est superbe. Une exposition à voir! C.T.D.

 

Hussein Baalbaki
Four season’s songs.
Jusqu’au 29 septembre à la Marina Bay

La galerie Agial présente une vingtaine de toiles de grand format de Hussein Baalbaki à la Marina Dbayeh. Né en 1974, à Beyrouth, c’est un artiste de la mouvance contemporaine. Ses œuvres présentent actuellement des réinterprétations innovantes de l’expressionnisme abstrait. Diplômé de l’Institut des Beaux-arts de l’Université Libanaise en 2002, il expose au Liban depuis 1999. En 2008, il fait ses débuts en solo à la Galerie d’art Agial à Beyrouth avec l’exposition «L’accumulation du temps», qui a retenu l’attention de la critique. A travers ses œuvres, il cherche à édifier un monde dont la forme, la construction et les couleurs dépassent le réel, le temps et  l’espace. Sa production met en valeur le geste pictural. Dans toutes ses peintures, il offre une esthétique dont il a lui-même découvert les principes et les moyens. C.T.D.
 

Agenda

Houssam Sarriedine. Beaux jours!
Jusqu’au 30 septembre à la Galerie Zamaan.

White wall. Grafittis street art.
Jusqu’au 3 novembre au Beirut Art Center

Angelika Von Schwedes.
Jusqu’au 14 octobre au Beirut Exhibition Center.

Soraya Obeid et Paula Salem. Musical colors.
Jusqu’au 4 octobre à la Galerie Joanna Saikaly.

Eric Serafini. Peintures
Jusqu’au 30 septembre à la Galerie Aïda Cherfane.

Ghassan Ghazal. (In) tolérance
Jusqu’au  22 septembre à la Galerie Janine Rubeiz

Mahmoud Hojeij.We need to talk.
Jusqu’au 29 septembre à la Galerie Agial.

Khalil Saleeby.
Jusqu’au 30 novembre à l’AUB art Gallery.

Gabriel Kuri.
Jusqu’au 17 novembre à la Galerie Sfeir-Semler.


 

Related

Pop art au Whitney Museum de New York. Inspiration cruciale

Tammam Azzam. Moi, le Syrien

Edgard Mazigi

Laisser un commentaire


The reCAPTCHA verification period has expired. Please reload the page.