Deux jours après l’attentat, les plus hautes autorités libanaises et ses frères d’armes des FSI ont fait leurs adieux à Wissam el-Hassan et à son compagnon, l’aspirant chef Ahmad Sahyouni. Une cérémonie solennelle, empreinte de tristesse.
Lorsque les deux cercueils enveloppés du drapeau frappé du Cèdre apparaissent aux premières notes de la marche funèbre, jouée par la fanfare de la gendarmerie nationale, le temps se fige. Les sirènes et les cloches des églises environnantes retentissent. Les représentants de l’Etat ont le visage fermé. Les familles des défunts sont présentes, dignes et sobres. L’ensemble des forces de police, droit comme la justice. Dans la cour intérieure du quartier général des FSI à Sayyar, à quelques encablures du lieu de l’attentat, les drapeaux sont en berne. Les bâtiments tiennent d’immenses portraits du général Wissam el-Hassan. Au premier rang, le président de la République Michel Sleimane, le Premier ministre Najib Mikati, le ministre de l’Intérieur Marwan Charbel, le commandant en chef de l’armée, le général Jean Kahwaji, le directeur de la Sûreté générale, le général Abbas Ibrahim et le directeur général des FSI, le général Achraf Rifi, sont présents. L’émotion transpire. C’est à un proche, à un chef charismatique, à un grand serviteur de l’Etat libanais que l’on est venu rendre un dernier hommage.
Le chef des services de renseignements des FSI n’était pas qu’un superflic aux responsabilités tentaculaires. Il était surtout l’un des personnages centraux de l’histoire récente du pays, celui autour duquel gravitaient toutes les tensions. L’homme de l’ombre était en première ligne et se savait menacé. Les forces obscures, qui voulaient déstabiliser le Liban, avaient mis son nom en tête de la liste noire des hommes à abattre. Le chef de l’Etat a expliqué que « les services de renseignements des FSI ont réussi, sous le commandement de leur chef, à démanteler un réseau de collaborateurs, à identifier des réseaux terroristes, à les empêcher de sévir et de semer la discorde, en saisissant des quantités d’explosifs et en arrêtant la personne qui les transportait. C’est comme si Wissam el-Hassan avait réussi, par son martyre, à faire échec au complot et à épargner au pays ses conséquences néfastes ». Aux premiers rangs, sa femme Anna et ses deux enfants Mazen et Majd pleurent leur mari, leur père.
Visiblement affecté, le président conclura son allocution en prenant à témoin l’ensemble du pays. «Faites que l’homme de sécurité et que le juge se considèrent réellement couverts, a martelé le président. Faites que le criminel sente qu’il n’est pas couvert. C’est notre devoir et celui de toutes les autorités politiques. Travaillez à résoudre les crimes. Cela suffit! Rafic Hariri, d’autres personnalités libanaises et d’autres tentatives d’assassinat dont certaines ont échoué. Wissam Eid, le général François Hajj et les dernières tentatives ratées avant l’assassinat des deux martyrs».
Achraf Rifi a, lui, tenu un discours très personnel de reconnaissance, avec de l’émotion dans la voix. «Notre héros martyr, tu as réchappé de la mort le 14 février 2005, mais aujourd’hui, tu fais partie du cortège des martyrs. Mon cher Wissam, je suivais ton travail au quotidien, tu travaillais au bord du précipice, tu n’avais pas peur des dangers et ta seule ligne rouge était ton amour pour la patrie. Tu as suivi l’enquête internationale, joué un rôle de taille dans le dossier criminel et découvert des réseaux d’espionnage. Tu as aussi découvert 24 explosifs qui étaient prêts à exploser».
A la fin de la cérémonie, le président de la République lui a remis, à titre posthume, les insignes de Grand commandeur de l’ordre national du Cèdre. Une bien maigre consolation pour sa famille.
Julien Abi Ramia
Qui est Imad Othmane?
Imad Mahmoud Othmane est un proche de Wissam al-Hassan. Ce dernier avait indiqué que s’il devait prendre la tête des FSI, Othmane serait le mieux à même de le remplacer à la tête des services de renseignements. Après être entré au service de la police en 1984, ce célibataire a passé ses premières années professionnelles dans les quartiers sunnites de Beyrouth avant de rentrer, au début des années 2000, à la protection personnelle du Premier ministre Rafic Hariri. Wissam al-Hassan était déjà alors son supérieur hiérarchique. Othmane a, par la suite, été nommé chef du cabinet de Hassan Sabeh, lorsqu’il occupait la fonction du ministre de l’Intérieur, avant de diriger la garde du Premier ministre, du temps de Saad Hariri. Responsable jusque dernièrement des enquêtes spéciales de la police judiciaire, il succède donc à Wissam el-Hassan, après des concertations entre Achraf Rifi, Marwan Charbel et Najib Mikati.