Magazine Le Mensuel

Nº 2875 du vendredi 14 décembre 2012

Economie & Finances

Economie et finance

Changeurs
Un délai de six mois pour se conformer aux directives, décide la BDL

 Les changeurs se trouvent dans l’œil du cyclone depuis l’affaire de la Lebanese Canadian Bank. Sous la pression de la globalisation financière, de la bataille livrée par le Gafi (Action internationale pour la lutte contre le recyclage de l’argent sale) et de la surveillance étroite des transactions financières internationales imposée par les Etats-Unis, la BDL a émis une panoplie de circulaires visant à réorganiser le métier de changeur. Motif invoqué: les changeurs peuvent constituer «une plateforme de prédilection à des opérations de recyclage d’argent».
Dans une interview exclusive accordée à Magazine, Ramez Mecattaf, président de l’Association libanaise des changeurs (ALC), est catégorique sur la question épineuse du blanchiment d’argent, affirmant que «la valeur totale des transactions effectuées par le secteur des changeurs représente une partie infime de celles conclues par le secteur financier local. Ce qui signifie qu’il n’y a pas de fonds destinés à des opérations de recyclage de l’argent sale qui transitent par le canal des changeurs». De plus, renchérit-il, tous les acteurs du domaine financier au Liban, avec à leur tête la BDL et les banques commerciales, se montrent extrêmement vigilants au niveau de l’application des standards internationaux, promulgués notamment par le Gafi. Sous la pression de leurs correspondants à l’étranger, en l’occurrence aux Etats-Unis, les banques commerciales ont fermé tous les comptes des petits changeurs de la catégorie B. «Une panique des banques qui n’était en aucun cas justifiée», relève Ramez Mecattaf, qui soutient toutefois une réforme continue du secteur, évoquant ainsi des sessions de formation régulières d’information, dispensées aux changeurs.
La BDL a classé en deux grandes catégories les changeurs: A (50 sociétés de change) et B (350). Elle a imposé un capital minimum de 750 millions de livres aux sociétés A, en étendant leur champ d’action aux transactions d’achat et de vente de l’or, ainsi qu’aux opérations d’exportation et d’importation de monnaie en cash. Les sociétés B ont été subdivisées en deux subdivisions: la première comprend des sociétés dont le capital minimum requis est de 500 millions de livres, alors que pour la deuxième, le capital minimum requis est de 250 millions de livres. Les sociétés de la catégorie B1 sont autorisées, en plus des opérations de change habituelles, à procéder à des transactions portant sur l’or, tandis que les opérations de la catégorie B2 se limitent aux opérations de change habituelles. La BDL a également exigé la présence au sein de toutes les sociétés de change d’un «compliance officer» et d’un audit interne, en plus d’un audit externe. Des relevés mensuels, trimestriels et annuels doivent être présentés par tous les changeurs sans exception aux banques avec lesquelles ils traitent, ainsi qu’à trois entités de la Banque centrale, à savoir la Commission de contrôle bancaire (CCB), la Commission d’investigation spéciale et la Commission des marchés financiers. Leur bilan annuel est également présenté à la BDL. Parallèlement, la CCB effectue des tournées d’inspection annuelles des changeurs, qui portent nécessairement sur les 20 plus grandes sociétés en plus de plusieurs sociétés B. En l’espace de deux ans, toutes les sociétés sont passées au crible. Ceci dit, la BDL a accepté depuis quelques jours, à la demande insistante de l’ACL, d’amender la circulaire numéro 11022 du 17 mai 2012, accordant ainsi aux sociétés de change un délai de sursis de six mois à fin juin 2013 afin de se conformer aux directives de relèvement du capital. Le délai initial venait à expiration à la fin du mois en cours.
 

Liban, pays arabes
La politique plombe le tourisme

La baisse de la part de l’industrie touristique dans le PIB n’est pas un problème propre au Liban. Les motifs de ce phénomène revêtent plusieurs aspects. Si les touristes se font rares au Pays du Cèdre, c’est qu’a priori ils ne sont pas tranquilles et craignent les troubles sécuritaires et politiques dans leur propre pays. Ceci est vrai tant pour les pays limitrophes du Liban que pour les Etats du Golfe, à l’exception des Emirats arabes unis, qui se trouvent à l’abri pour le moment d’incidents perturbant leur stabilité interne. En fait, les touristes arabes représentent plus d’un tiers du nombre de touristes affluant au Liban et se classent dans les premières positions en termes de dépenses. En second lieu, il est devenu évident que le recul de l’activité touristique n’est pas lié exclusivement à l’état de la sécurité au Pays du Cèdre -qui est encore dans une meilleure santé que les pays arabes voisins – mais il représente un problème politique en relation directe avec les contentieux d’ordre géostratégique qui opposent les pays arabes. En d’autres termes, les interdictions imposées par tel ou tel pays arabe à leurs ressortissants de se rendre au Liban (les recommandations émanant de l’Arabie saoudite, du Qatar, de Bahreïn, du Koweït et des Emirats arabes unis) constituent une forme de pression sur le gouvernement libanais dans le cadre des bras de fer régionaux liés à la crise syrienne. Tant le président de la République, Michel Sleiman que le Premier ministre Najib Mikati, ont tenté en vain de forcer les portes des pays du Golfe. Ils ont ainsi mené «des opérations de séduction et de persuasion de la politique rationnelle  du Liban vis-à-vis du phénomène du Printemps arabe» via des tournées auprès des gouvernements des pays de la région. Les résultats de ces efforts n’ont pas été à la hauteur des attentes. Pour de nombreux observateurs, il s’agit d’une forme de «boycott larvé» du Liban par les pays concernés. Un boycott qui n’a toutefois pas atteint le niveau d’une rupture des relations diplomatiques. Les mêmes sources font remarquer que dans des circonstances plus critiques qu’a traversées le Liban, en l’occurrence l’agression israélienne en 2006, les pays arabes n’ont pas fait de telles recommandations. Le président des organismes économiques, Adnan Kassar, a bien dit à l’ambassadeur d’Egypte au Liban, qui l’informait de la décision d’une délégation d’hommes d’affaires égyptiens de ne pas venir au Liban en janvier, que «dès que la décision politique sera prise, le Liban bénéficie de tous les fondements pour une reprise économique immédiate». Même son de cloche du côté du ministre du Tourisme, Fadi Abboud, qui a évoqué, lors de ses tournées de promotion du Liban auprès de la diaspora, des problèmes d’ordre politique.
Entre-temps, les agents du secteur touristique vivent au jour au jour et ne se font pas d’illusions pour la période des fêtes de fin d’année. Ils essaient de limiter autant que possible les pertes. De nombreuses sociétés de restauration et d’hôtellerie auraient donné le choix à leurs employés entre la présentation de leur démission ou l’acceptation d’un demi-salaire, jusqu’à ce que l’avenir du paysage économico-politique se décante. De toute façon, c’est l’argument avancé par le ministre Abboud lors d’une séance du Conseil des ministres pour justifier son veto à la décision de relèvement de la tranche de salaire soumise aux abattements de la Caisse nationale de sécurité sociale. Sachant que le salarié verse 2% sur cette tranche à la CNSS, et le patronat 7%.   

Liliane Mokbel

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