Pendant que les salariés bougent en attendant le financement nécessaire pour se voir accorder ce qui leur a été promis, le Premier ministre, Najib Mikati, reconnaît que les «circonstances ont changé depuis l’approbation de la grille l’été dernier». «A l’époque, dit-il, le taux de croissance atteignait les 5%. Il est, maintenant, de 1,5%. Si nous approuvons la grille sans la réétudier, nous portons atteinte à la croissance».
Le taux de croissance, index économique du pays, baisse de façon vertigineuse, depuis quelques années. Il était de 9,2% en 2008, considérée l’une des meilleures. Il a chuté à 1,5% au début de l’année 2013.
Depuis le début de la crise économique mondiale, en octobre 2008, le Liban a tenté de se protéger et de s’en tenir, autant que possible, à l’écart. S’il a été possible de le faire au début, en fonction de plusieurs facteurs économiques locaux et régionaux, la situation a changé avec l’explosion des troubles politiques dans le monde arabe.
Pourtant, les virements des Libanais résidant et travaillant à l’étranger n’ont pas beaucoup varié. Ils constituent entre 25-30 % de l’ensemble du revenu national. Cependant, 2012 a été une des années les plus difficiles pour l’économie libanaise. Les raisons en sont multiples et les résultats négatifs dans les secteurs.
Au cours des mois d’été, vu les décisions des pays arabes d’interdire à leurs citoyens de se rendre au Liban, pour des raisons de sécurité ou politiques selon la position du Liban dans la crise syrienne qui ne suscite pas l’unanimité arabe, les recettes du Liban dégagées par le tourisme sont presque nulles. La moyenne générale du mouvement économique a baissé de 20%, selon les chiffres de l’Association des commerçants de Beyrouth.
Aujourd’hui, la situation n’est guère meilleure. Suite à la position affichée du Liban à la réunion des ministres arabes des Affaires étrangères, elle risque de s’envenimer. Des inquiétudes planent sur le sort de quelque 600000 Libanais travaillant dans les pays arabes et contribuant à améliorer le revenu national.
Les Libanais dans le Golfe, comme ceux qui sont en Afrique ou en Amérique latine, vivent dans l’inquiétude au vu des développements politiques et économiques dans ces pays. En Afrique, les Libanais sont victimes du harcèlement du lobby israélien devenu, de plus en plus, fort ces dernières années. En Amérique latine, ils sont soumis à des difficultés créées par les autorités américaines à cause des soupçons qui planent sur des virements vers le Liban à l’adresse du Hezbollah.
Il est clair, qu’au Golfe, les prises de position politiques concernant la crise syrienne ne jouent pas en leur faveur. D’autant que tout semble bloqué, et qu’aucune initiative économique, locale ou autre, n’améliore la vie économique du Liban, dans l’attente de l’issue du conflit en Syrie. Ainsi, l’économie libanaise est tributaire des développements en Syrie. Tandis que la vie politique intérieure est suspendue à l’entente sur une nouvelle loi électorale autour de laquelle les spéculations vont bon train: les élections auront-elles lieu? Sur base de quelle loi, celle de 1960 actuellement en vigueur? Une loi consensuelle est-elle susceptible de voir le jour avant les élections?
Dans ce sombre tableau, la dette nationale dépasse le seuil des 58 milliards de dollars. L’espoir des Libanais est dans la découverte de gaz et de pétrole, dans leurs eaux territoriales, qui pourrait réajuster la balance. Mais il faudra attendre quelques années avant de pouvoir en tirer profit. Avec une dette aussi lourde et un taux de croissance ne dépassant pas 1,5%, le Liban pourra-t-il traverser cette zone de trouble en attendant que se réalise son rêve d’être l’un des pays producteurs de pétrole dans les prochaines années?
Arlette Kassas