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Nº 2888 du vendredi 15 mars 2013

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Farid Makari, vice-président du Parlement. Le nœud de Baabda retarde l’accord

Selon Farid Makari, un grand chemin a été parcouru dans l’élaboration d’une nouvelle loi électorale. Seul le découpage des circonscriptions concernant Baabda retarde la conclusion de l’accord final. Interview du vice-président de la Chambre, allié du Courant du futur.

Vous ne vous êtes pas réuni avec le Dr Samir Geagea, ni avec le président Amine Gemayel. Les relations sont-elles rompues? Ou alors le contact se fait par téléphone?
Il n’y a pas de rupture. Les divergences n’ont effacé ni l’amitié ni la cause. Ils savent bien que les reproches sont à la mesure de l’estime. Le Dr Geagea et le président Gemayel sont des amis et je respecte leur point de vue. Avant qu’ils n’approuvent le projet orthodoxe, nous communiquions tous les jours dans le but de concocter une loi mixte. J’ai joué un rôle essentiel pour convaincre le Moustaqbal d’accepter une loi mixte, parce que je reste persuadé que c’est la seule solution possible, même si ce n’est pas la meilleure. Mais après le choix fait par les deux leaders, je trouvais inutile de poursuivre les concertations avec eux.

La coalition du 14 mars serait-elle tellement fragile au point d’être secouée à la première échéance?
Après huit ans de lutte commune, il est naturel qu’il y ait des divergences de vue concernant des questions précises. Au final, le mouvement du 14 mars est formé de partis et de personnalités indépendantes. Chacune de ses composantes a sa vision et ses ambitions légitimes. Mais lorsque toutes ont réalisé le danger de la discorde autour de la loi électorale, et senti que l’alliance était menacée, ils se sont souvenus de la responsabilité que leur a fait assumer le peuple de la Révolution du cèdre. Une responsabilité qui doit être placée au-delà de toute considération électorale. Cette brèche a permis aux membres du 14 mars de réaliser l’importance de demeurer unis.

Où en est l’entente sur le nouveau projet électoral négocié entre le Moustaqbal et le Parti socialiste progressiste?
En ma qualité d’ami et allié du Moustaqbal, je peux dire que les concertations se poursuivent avec la volonté des deux parties d’aboutir à une plateforme commune. Ces conciliabules englobent les alliés et le président de l’Assemblée, Nabih Berry. Ce qui retarde l’entente sur le scrutin mixte débattu est le différend concernant le découpage de la circonscription de Baabda. Certains préconisent de diviser le Mont-Liban en trois circonscriptions, alors que d’autres préfèrent le partager en deux, l’une incluant Baabda-le Chouf-Aley et l’autre le Metn-Kesrouan et Jbeil. A mon avis, la solution pour Baabda devrait s’inspirer de la formule trouvée pour Beyrouth en 2009. C’est-à-dire une entente préalable sur une liste consensuelle dans la troisième circonscription.

Serait-il possible que le Moustaqbal cède un nombre de sièges aux partis chrétiens du 14 mars?
Les chrétiens du Moustaqbal ne seraient-ils pas de vrais chrétiens? Est-ce que Atef Majdalani, Nabil de Freige et Hadi Hobeiche et d’autres, sont moins représentatifs que les députés membres des partis chrétiens? C’est une approche regrettable. Nous devons, pour choisir les candidats, adopter d’autres critères que l’appartenance à un parti. Nous devons poser des critères objectifs pour nous permettre de sélectionner le meilleur candidat et le plus fort, peu importe à quel parti il adhère.

Si le projet orthodoxe était avalisé, seriez-vous candidat?
Je ne me retrouve pas du tout dans ce climat confessionnel. Je ne m’impliquerai pas dans un processus qui mènera le pays dans cette direction.

Que pensez-vous de la querelle provoquée par la mise sur pied du Comité de supervision des élections?
La réaction du 8 mars nous porte à comprendre les dessous de son positionnement. Tous les agissements du 8 mars, qu’il s’agisse des projets de lois proposés, ou du prétexte sécuritaire, ont un seul but: saboter les législatives. Nous ne l’accepterons pas. Le président de la République non plus.

Etes-vous satisfait de la convocation des corps électoraux et de la circulaire relative au dépôt des candidatures? Quand allez-vous présenter la vôtre?
Nous avons déclaré, dès le départ, que nous appuyons la tenue des élections dans les délais. Le camp du 8 mars s’évertue à les reporter. Le président de la République a bien agi en coupant court aux tentatives de la majorité. Les candidats du 14 mars vont patienter avant de déposer leur candidature en attendant une nouvelle loi électorale consensuelle. De toute façon, il y a grève.

Le député Alain Aoun a dénoncé toute personnalité chrétienne qui présenterait sa candidature pour le moment…
Avec tout le respect que je voue à ce jeune collègue qui se distinguait par un langage différent de celui dont use le CPL qu’il représente, je suis désolé qu’il dérape vers cette logique d’exclusion qui ne lui ressemble pas. Peut-être sous l’influence du climat qui règne chez son allié le Hezbollah, il a décidé d’émettre des «fatwas». Si j’étais candidat, ce que je ne suis pas, j’aurais déposé ma candidature en faisant fi des propos de l’Ayatollah Aoun.

Que pensez-vous de la proposition du général Aoun concernant la formule de la circonscription unique basée sur le scrutin proportionnel?
Le général Aoun a une histoire pleine de contradictions. Il a l’art de dire la chose et son contraire. Aujourd’hui, il enregistre son meilleur score. Parce qu’il propose simultanément un projet électoral et son antithèse. Un projet dans l’intérêt des chrétiens, comme il le dit, et un autre que tout le monde reconnaît comme pénalisant des chrétiens. La suggestion relative au projet de la circonscription unique a un seul but: faire du chantage et nous mettre devant le fait accompli pour qu’on ait à choisir entre le mauvais et le pire, entre le projet de la ségrégation confessionnelle et celui de la suprématie quantitative, pour au final saboter les élections.

Quelle a été votre perception de la déclaration du président Mikati qui a assuré qu’il ne serait pas le chef du gouvernement qui supervisera les élections?
Je connais bien le président Mikati. Sa déclaration peut être expliquée de deux façons: soit que les législatives n’auront pas lieu et qu’il restera Premier ministre, soit qu’il demeurera à la présidence du Conseil, sans présenter sa candidature.

Croyez-vous que la crise entre le Liban et les pays du Golfe qui menace les Libanais qui y travaillent, a pris fin?
Je pense que les pays du Golfe n’ont pas l’intention de se venger des travailleurs libanais, et des résidents sur leur territoire qui sont devenus partie intégrante de leur évolution et de leur développement et même de leur tissu social. Ces pays peuvent, par moment, décider d’être plus rigides pour l’octroi des visas en raison de craintes d’ordre sécuritaire, ou demander à leurs ressortissants d’éviter le Liban s’ils sentent que la situation y est instable ou s’ils sont insatisfaits d’une prise de position officielle. Mais les pays du Golfe ne prennent pas leur revanche des Libanais qu’ils considèrent comme leurs frères. Parallèlement, certaines parties libanaises ne devraient pas s’ingérer dans leurs affaires internes, comme le font le Hezbollah et le général Aoun.

La grille des salaires sera-t-elle transmise au Parlement, le 21 mars?
Je suggère de modifier l’expression grille des salaires pour la remplacer par le terme «feuilleton». La gestion de ce dossier par le gouvernement, comme d’autres d’ailleurs, ressemble à un feuilleton lassant fait de résolutions, de promesses fantaisistes et de fuites en avant. J’espère qu’il prendra fin bientôt. Parce que la grève devient pesante, elle bloque les intérêts des Libanais et finira par saboter l’année scolaire. Il faut trouver un règlement équilibré qui accorde leurs droits aux fonctionnaires sans perturber la stabilité financière et sans approfondir la crise sociale.

Propos recueillis par Saad Elias

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