A l’occasion de la Journée internationale de la femme, Norma Nacouzi, journaliste et photographe, nous entraîne au cœur de l’Institut français, dans un monde exotique où «tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté»: l’Ethiopie. Sous les différentes photos qui défilent sous nos regards obnubilés par le charme et l’originalité d’une culture différente sans être différenciatrice, coule telle une rivière, l’histoire de femmes éthiopiennes qui ont souffert.
C’est en 2010 que tout commença… A la suite de la chute de l’avion éthiopien, Norma Nacouzi se rend à Badaro pour suivre la messe organisée par cette communauté afin d’en faire un reportage. Et c’est là qu’elle découvre cet «îlot que forment les femmes éthiopiennes au Liban». «Nous avons l’habitude de les voir uniquement au foyer, mais ce que nous ignorons, c’est que ces femmes ont su créer une ambiance spécifique manifestant la variété et la profondeur de leur culture». C’est donc la curiosité qui poussa Norma Nacouzi à vouloir photographier ces jeunes femmes tout en respectant deux principes: l’esthétique et son devoir de journaliste qui consiste à faire parvenir un message à travers son travail. «Nous vivons avec des gens et nous nous devons d’être authentiques envers eux», assure-t-elle avec beaucoup de fermeté.
Selon Norma Nacouzi, nous vivons au cœur d’un débat existentiel: celui de l’identité. Nombre de Libanais ont cherché à défendre les droits de ces femmes maltraitées. Or, pour pouvoir prendre leur défense, il s’agit d’abord et avant tout de les connaître, de connaître leur véritable identité. Comment pareille (re)connaissance pourrait-elle se réaliser lorsque les Libanais les désignent par «la mienne»? Grammaticalement, le terme «la mienne» est un pronom possessif qui marque la propriété. C’est donc ainsi que nous considérons l’Autre? En l’ignorant? Ou plutôt en ignorant le fait qu’il existe, qu’il est?
«J’ai eu beaucoup de mal à entrer en contact avec ces femmes au départ, puisqu’elles n’ont pas confiance en nous, Libanais. Pour elles, notre histoire commune n’est pas rassurante, confie Norma. Mais à force de me retrouver avec elles, elles ont pu voir que je ne cherchais pas à les exploiter». Circulant entre leurs photos qui nous donnent l’impression d’être en Ethiopie et qui, pourtant, ont été toutes prises au Liban, les muses de Norma Nacouzi défilent fières d’elles-mêmes, un sourire radieux aux lèvres.
«Le racisme est une manière de déléguer à l’autre le dégoût qu’on a de soi-même». Mariam, 26 ans, Sarah, 33 ans, et Meseret, 33 ans aussi, de belles jeunes Ethiopiennes, nous font part de leur expérience dans ce pays. Venues pour travailler, elles ont eu des débuts difficiles. Alors que Mariam nous confirme qu’elle est heureuse là où elle travaille, se gardant de nous faire part des malheurs qu’elle ou ses autres amies ont pu avoir vécus, Meseret et Sarah prennent la parole pour «se défouler». «Nous avons été maltraitées chez certaines familles libanaises. On nous considère comme étant des objets et non des êtres humains. Les membres des familles chez lesquelles nous avons travaillé veulent tout savoir sur nous, violant notre intimité et nous nous devons d’être à leur service. Même du point de vue financier, nous sommes parfois traitées de manière injuste».
La police défendant toujours les «employeurs», l’ambassade d’Ethiopie au Liban incapable d’agir à cause de l’inexistence de Convention entre l’Ethiopie et le Liban, ce dernier ayant refusé de signer la Convention de Genève de 1951 portant sur les travailleurs immigrants, ces femmes, ayant abandonné leurs familles pour subsister à leurs besoins, se trouvent humiliées au Liban.
Les jeunes Ethiopiennes se plaignent également des directions des restaurants qui leur interdisent l’entrée sous prétexte qu’il n’y a pas de place, alors que le restaurant est quasi vide. «Nous venons pour payer notre argent en toute dignité. Est-ce ainsi qu’on nous traite?», se révoltent les immigrantes éthiopiennes.
Natasha Metni
Yiğit Yazici
Layers of a tale
Jusqu’au 20 mars à la galerie Art on 56th.
Yiğit Yazici est né en 1969 à Bursa, en Turquie. Il est diplômé de la faculté des beaux-arts de l’Université Mimar Sinan. Il a participé depuis à plus de 70 expositions en Turquie, New York, Miami, Chicago, San Francisco et dans d’autres pays à travers le monde. Yiğit explique qu’il est boosté par le plaisir de partager son travail, «Ma source d’énergie est de partager l’enthousiasme de mes travaux avec les gens». Réalisées à partir des objets du quotidien, ses toiles accrochent le regard. L’un des objectifs de l’artiste est de donner à l’observateur une perspective nouvelle en transformant les objets usuels en œuvres d’art personnalisées. Il a la conviction que l’art appartient à la communauté et qu’il est là pour faire réfléchir les hommes. Il innove en utilisant des supports inhabituels comme le cuir et les voiles de bateaux. Une exposition à voir.
Christiane Tager Deslandes
Mazen Kerbaje
Now
Jusqu’au 6 avril à la galerie Janine Rubeiz.
Now n’est pas une exposition à thème et n’est surtout pas une exposition comme les autres. Les travaux (peintures, machines, dessins, photographies) n’ont aucune relation entre eux. Il s’agit plutôt du portrait d’un artiste original et pour le moins talentueux, à un moment donné: maintenant. Si cette exposition avait été réalisée plus tôt, elle aurait sans doute été différente. Elle ressemble à l’artiste et dévoile ses véritables émotions. Né en 1975, Mazen Kerbaje vit et travaille à Beyrouth. Ses centres d’intérêt sont la peinture, la bande dessinée et la musique. Il a publié une dizaine de livres, plusieurs nouvelles et des dessins dans des anthologies, journaux, magazines au Liban, en Europe et aux Etats-Unis. Kerbaje a obtenu le prix du Musée Nicolas Sursock en 2009 pour l’œuvre qu’il a créée avec Laure Ghorayeb, sa mère. Il a à son actif plusieurs expositions à travers le monde.
Christiane Tager Deslandes
Agenda
Fadi Karlitch. Persona.
Jusqu’au 16 mars à la galerie Zamaan.
Hiba Darwich. Colours storming.
Jusqu’au 28 mars à la galerie Zamaan.
Mohammad Abbas. Are we not human?
Jusqu’au 16 mars à la galerie Artlab.
Annie Kurkdjian. One woman show.
Jusqu’au 28 mars à la galerie Art circle.
Chaouki Chamoun. 2006 – Present.
Jusqu’au 14 avril au Beirut Exhibition Center.
Walid El Masri. The seat of perception.
Jusqu’au 4 avril à la galerie Ayyam.