Magazine Le Mensuel

Nº 2888 du vendredi 15 mars 2013

general

Walid Raad. L’artiste aux mains vertes

Il est né au Liban, mais c’est entre l’Amérique et son pays d’origine qu’il s’est établi. Que ce soit à l’occasion de son exposition actuelle au Louvre ou pour ses positions en faveur des droits des travailleurs, Walid Raad est indéniablement l’artiste libanais dont on ne se lasse pas de parler.

Walid Raad a toujours dit très haut ce que certains pensent parfois bas. Dans une pétition intitulée Qui est en train de construire le Musée Guggenheim d’Abou Dhabi?, il a protesté contre la manière avec laquelle sont traités les travailleurs de ce musée dont l’ouverture est prévue cette année.
Pour lui, «ceux qui travaillent avec des briques et du mortier méritent le même respect que ceux qui travaillent avec des caméras et des pinceaux». Dans une interview récente, il note que les artistes ne doivent pas accepter d’exposer leurs œuvres dans des bâtiments construits par des travailleurs exploités. Vous l’aurez compris, Walid Raad est un homme authentique. Pas de langue de bois ni du politiquement correct. Mais qui est donc cet artiste qui fait tant parler de lui en Europe, dans les pays arabes et aux Etats-Unis?    
Né à Chbanié en 1967, de mère palestinienne et de père libanais, Walid Raad a émigré aux Etats-Unis, en 1983, où il suit une formation en photographie et en études visuelles et culturelles. Depuis, il s’est installé entre Beyrouth et New York où il enseigne à l’école d’art Cooper Union. Artiste plasticien travaillant particulièrement avec les médias et les nouvelles technologies, il a notamment réalisé Up to the South en 1993, Missing Lebanese wars en 1996, The dead weight of a quarrel hangs (1996-1999)…
Raad a aussi lancé un projet qui s’intitule The Atlas Group. Son but: raconter l’histoire contemporaine et la guerre libanaise. Atlas Group conserve ainsi des études et produit des documents sonores, visuels, littéraires et autres, qui font la lumière sur cette histoire. Ces documents sont conservés dans les Archives entre Beyrouth et New York.
L’artiste a par ailleurs lancé, depuis 2007, le projet Scratching on things I could disavow, à travers lequel il s’intéresse à l’histoire de l’art dans le monde arabe et à l’émergence récente de grandes infrastructures pour les arts visuels dans cette partie du monde. Les œuvres d’art et d’histoire qu’il présente sont les résultats de ses rencontres avec des individus, des institutions et des économies. Il explique comment «ces développements, perçus au côté des conflits géopolitiques, économiques, militaires et sociaux, façonnent une terre riche, mais encore épineuse pour le travail créatif». Actuellement, à l’occasion de l’ouverture des nouveaux espaces consacrés au département des Arts de l’islam au Louvre, le projet Scratching on things I could disavow est exposé dans ce fameux musée. L’artiste propose deux créations, inspirées par le devenir d’un «musée universel» à l’heure de la mondialisation: une installation inédite, qui sera présentée dans la salle de la Maquette, et un ensemble d’images dérivées de l’inventaire photographique le plus récent des collections.
Cette collaboration avec le Louvre se tiendra durant trois années consécutives. L’exposition Préface à la première édition est structurée par une installation inédite, où une vision architecturale flottante, fragmentaire, semi-abstraite, côtoie les images d’objets hybridés, qui semblent se traverser l’un l’autre.

La Préface à la troisième édition se concentre sur les œuvres du département des Arts de l’islam récemment photographiées par Hughes Dubois. Walid Raad crée, à partir de ces images, des visions dérivées, manière d’inventaire personnel des objets de la collection. L’ensemble d’images produites par l’artiste est livré dans un format de planches photographiques autonomes que le lecteur peut arranger et organiser librement.

Pauline Mouhanna (Etats-Unis)
 

Pour plus d’informations, se rendre sur le site http://www.louvre.fr/

Rencontre au Louvre
Walid Raad sera présent à l’auditorium du Louvre. L’artiste abordera les questions qui nourrissent le matériau même de son travail, de la philosophie islamique à l’histoire et à l’actualité des formes, des institutions et des économies liées à l’art. Scratching on things I could disavow par Walid Raad, le vendredi 22 mars, de 18h30 à 21h30.

Un artiste mondial
Walid Raad est lauréat de la Bourse Guggenheim en 2009. Il a été récompensé par l’Alpert Award in Visual Arts et le Deutsche Börse Photography Prize en 2007, ainsi que le Camera Austria Award en 2005. Ses performances et installations sont présentées sur les grandes scènes mondiales. En 2006, il expose à la Hamburger Bahnhof (Berlin, Allemagne) puis, en 2010, à la Whitechapel Gallery (Londres, Royaume-Uni), ainsi qu’au 104 dans le cadre du Festival d’automne à Paris (France). Il a participé à la Biennale de Venise (Italie), en 2003, et à Home Works, forums des pratiques culturelles à Beyrouth (Liban).

 

Related

Khalil Karam, ambassadeur du Liban auprès de l’Unesco. Un monument moderne libanais serait classé

Mashrou’ Leila, ambassadeurs de l’Onu. «Pop, sexe et politique»

Internet illégal. L’armée et l’administration à découvert

Laisser un commentaire


The reCAPTCHA verification period has expired. Please reload the page.