Magazine Le Mensuel

Nº 2895 du vendredi 03 Mai 2013

Presse étrangère

Le sens de l’Histoire

Cette semaine, la couverture de l’actualité libanaise par la presse régionale et internationale sort des sentiers battus pour s’intéresser à certains phénomènes sociaux qui font aussi le quotidien du pays.

Al-Hayat
Le journal panarabe al-Hayat se demande si, pour le Hezbollah, le front syrien ne s’apparenterait pas à celui du Viêtnam pour les Etats-Unis, ou de l’Afghanistan pour la Russie.
Sans doute que comparer le Hezbollah aux Etats-Unis ou à la Russie, et sa guerre en Syrie aux guerres du Viêtnam et de l’Afghanistan, peut être déraisonnable. Néanmoins, la logique qui régit le parti libanais est similaire à celle qui a conduit Washington et Moscou au bourbier. L’hyper-puissance du Hezbollah est évidente, si on le met sur le même plan que le gouvernement et les forces armées libanaises, ou si on compare la cohésion du parti avec la fragmentation de la société libanaise. D’ailleurs, le Hezbollah n’a pas hésité à utiliser son avantage à plusieurs reprises. Disons quand même que le sens de l’Histoire finit toujours par prévaloir. Aujourd’hui, le Hezbollah se tient contre la majorité des Syriens et du monde arabe sunnite, contre Israël et les pays occidentaux et même contre des pays non occidentaux qui l’accusent d’être derrière des actes terroristes qui ont frappé leur sol. Il faut ajouter à tout cela le fait que le Hezbollah se tient contre de larges segments de la population libanaise, qui refusent que leur pays reste une arène ouverte. L’impasse est évidente sur le plan politique et militaire, mais elle l’est aussi sur le plan économique. Les pays du Golfe, d’Afrique et d’Amérique du Sud qui commencent à pointer les activités du Hezbollah du doigt sont ceux qui abritent la majeure partie de la diaspora libanaise. Oui, le Hezbollah est coincé.

Le Monde
Le Monde revient sur le premier mariage civil enregistré au Liban.
Dans un jardin beyrouthin un dimanche, l’ambiance est bon enfant. Orchestre traditionnel, buffet, discussions joyeuses. Les participants sont pourtant rassemblés dans un but citoyen: tous revendiquent le droit au mariage civil. Ils sont une cinquantaine à s’être déplacés pour le rassemblement festif de dimanche, mais sont plus de 30000 à animer la page pour le droit au mariage civil d’un célèbre réseau social. Selon des sondages, plus de 50% des citoyens libanais défendraient ce droit civique et les manifestations à Beyrouth se multiplient ces derniers mois.
A l’origine de ce phénomène de société, un couple désormais très médiatique Khouloud et Nidal, chiite et sunnite. Ils ont trouvé une faille dans la loi: un décret datant de l’époque du mandat français et tombé en désuétude, qui autorise les personnes sans confession à s’unir civilement.
Une jeune épouse grecque-orthodoxe témoigne anonymement: «C’est très compliqué pour une femme de divorcer. C’est hypocrite de la part des chefs religieux de préférer que les gens se convertissent plutôt que d’accepter les unions mixtes. C’est un business pour eux: dans certaines confessions, les divorces coûtent jusqu’à 50000 dollars». Les hauts dignitaires religieux et les citoyens réfractaires invoquent des raisons démographiques, craignant un déséquilibre confessionnel. Le slogan le plus célèbre des manifestants pro union civile s’appuie d’ailleurs sur cette angoisse d’une instabilité communautaire: «Pas de guerre civile, un mariage civil!».

Libération
Libération raconte l’épopée de la première fusée libanaise. Une histoire dont on ne se lasse pas.
Par inadvertance, Joana Hadjithomas et Khalil Joreige, nés à Beyrouth en 1969, juste après que l’homme eut marché sur la Lune, ont découvert que le Liban avait eu, au tout début des années 60, un projet de conquête spatiale, avec de vraies fusées fabriquées par un jeune homme de 22 ans: Manoug Manougian, un mathématicien né à Jérusalem-Est et d’origine arménienne, qui avait migré de fraîche date au Liban. Quand le projet devient trop évidemment capté par l’armée, Manoug Manougian et son équipe de très jeunes étudiants s’éclipsent. Le but, affirme le mathématicien, n’a jamais été militaire. Aussi invisible que la lettre volée, car toujours en vente à la poste, un timbre à son effigie témoigne de l’existence de Cedar IV. Joana et Khalil ont interrogé les proches et moins proches, passé des appels à témoins à la radio, et personne, absolument personne, ne se souvenait de ces lancements de rockets pacifiques, pourtant de plus en plus performantes, au point d’interrompre tout trafic aérien et de perturber les ondes lors des derniers essais.
Pour accompagner le film, le mathématicien Manoug Manougian est retourné à Beyrouth, cinquante ans après avoir quitté le pays. Sa femme, Josette, filleule de Saint-Exupéry et dont le propre père est un aviateur héros de la Résistance, lui demande: «Allons visiter le quartier où nous vivions». Mais rien n’est reconnaissable. En Floride, à Tampa, Manoug Manougian enseigne les mathématiques à l’université. Chez lui, tout dormait bien rangé: photos, pellicules non développées, maquettes, journaux. «Je m’en souvenais comme si c’était hier. Je n’attendais que ça: que des gens me demandent d’ouvrir ma malle».
Quand il est arrivé au Liban, il a agi en amateur, au sens strict du terme: pour assouvir sa passion et sans enjeu financier. A Haïgazian, il a initié son club de «rocketry» avec quelques étudiants, tous Arméniens, de 16 et 17 ans.
L’Armée libanaise met à leur disposition un terrain afin, officiellement, de limiter les dangers. Dès 1962, Manoug et sa petite équipe sont invités par le président du Liban, Fouad Chéhab. Chaque lancement de fusée, bordé par l’armée, est public et annoncé dans la presse. Jusqu’à l’incident diplomatique: en 1963, une erreur de trajectoire manque de détruire un bateau anglais, à proximité de Chypre. Les grandes puissances s’agacent. Que veulent donc ces Libanais? «Notre rêve était de transformer cette fusée en arme. Mais, bien sûr, on faisait croire à Manoug qu’on était là pour la science», avoue dans le documentaire, cinquante ans plus tard, le général Wehbé.

La Presse
Au Canada, La Presse s’est intéressée à l’émission Az-Zaïm.
Les détracteurs de ce curieux mélange de politique et de divertissement n’ont pas manqué de dénoncer une instrumentalisation des problèmes politiques et des frustrations des Libanais, ainsi que le choix des participants. La plus connue est Myriam Klink, une bimbo botoxée qui est devenue la risée des réseaux sociaux après une chanson controversée dans un talk-show.
Dans un pays où huit des neuf réseaux de télé sont directement affiliés à un parti politique ou à une faction religieuse, al-Jadeed ne fait pas exception. Son fondateur, Tahsin Khayyat, est un puissant homme d’affaires musulman sunnite de Beyrouth qui n’a jamais caché ses ambitions politiques. «Tahsin Khayyat est le Donald Trump du Liban. Il n’est pas directement affilié à un parti, mais je pense qu’il a toujours voulu accéder au poste de Premier ministre. Ça ne m’étonnerait pas qu’il utilise cette émission pour se rapprocher de ses objectifs politiques. Il peut par exemple identifier, à travers les votes du public et leur réaction aux enjeux abordés, ce qui préoccupe les Libanais», explique l’analyste politique et journaliste Carol Malouf. Julien Abi Ramia

Huffington Post
L’Attentat mis au ban
Une brève du célèbre site américain Huffington Post.
Le film l’Attentat du Libanais Ziad Doueiri a été interdit par Beyrouth à la demande du bureau de boycottage d’Israël rattaché à la Ligue arabe. Adapté du roman de l’Algérien Yasmina Khadra, il raconte l’histoire d’un médecin israélien qui découvre que sa femme est l’auteure d’un attentat suicide à Tel-Aviv. «Je regrette d’informer que le ministre libanais de l’Intérieur […] a décidé de nous punir en interdisant le film […] arguant que je suis allé en Israël pour filmer» des scènes, a déclaré Doueiri. Le film avait été autorisé en mars par le ministère, avant que celui-ci ne change d’avis. «J’ai eu recours à des acteurs israéliens parce qu’il s’agissait de mon choix artistique. Je n’ai pas de regrets ni d’excuses à faire, ajoute-t-il. Il y a eu plusieurs films palestiniens filmés en Israël, avec des acteurs israéliens et même un financement israélien et pourtant ils ont été visionnés à Beyrouth.

 

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