Magazine Le Mensuel

Nº 2897 du vendredi 17 mai 2013

Religion

Concours national du Gladic. Les lycéens initiés au dialogue

«Accepter ne veut pas dire reconnaître». Le dialogue étant un devoir national, religieux et moral, il requiert la participation de tous. C’est dans ce sens que le concours national Gladic – Figures du dialogue, ouvert à tous les élèves du baccalauréat et visant à impliquer les jeunes dans cette réflexion, sera lancé samedi 18 mai 2013. Pour nous expliquer davantage les enjeux d’un tel dialogue, Sami Khalifé répond aux questions de Magazine.  

Comment réussir à relever le défi des Ecritures et d’une lecture commune pour une meilleure ouverture à l’autre?
Les Ecritures n’ont pas l’objectif de nous séparer. Dans toutes les Ecritures, il y a une mission de se rapprocher de l’autre. Que ce soit dans le Coran ou dans la Bible, les textes invitent dans leur esprit au respect et à l’amour d’autrui. Prenons à titre d’exemple le verset biblique de Mathieu 5: 43-48, où est dit ce qui suit: «Vous avez appris qu’il a été dit: Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Mais moi, je vous dis: Aimez vos ennemis». Quel mérite y a-t-il à aimer son frère?
De même dans le Coran, où Dieu déclare «Ô hommes! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous avons fait des nations et des tribus, pour que vous vous entre-connaissiez. Le plus noble d’entre vous, auprès d’Allah, est le plus pieux» (Al-Hujurât 49,13). Retenons les mots-clés de ce verset: d’abord, Dieu s’est adressé aux hommes, et non aux musulmans seuls. Ensuite, Il annonce les avoir créés différents pour qu’ils se rapprochent les uns des autres. Enfin, le mot «pieux» est pris ici, selon le contexte, dans le sens de «faire le plus de bien à l’autre». Nous tombons souvent dans de fausses interprétations des Ecritures saintes, d’où la nécessité de ne pas sortir ces Textes de leur contexte, en les interprétant de manière littéraliste (cf. les sionistes chrétiens). Il est impératif de savoir que les religions célestes, notamment le christianisme et l’islam, ne sont pas des religions qui séparent à condition d’en connaître le sens profond. Le religieux devient de plus en plus instrumentalisé par des «spécialistes» qui l’utilisent à des fins politiques.

Pouvons-nous former les responsables religieux et les acteurs de la vie politique et sociale dans un contexte de laïcité?
Il faut faire attention à la connotation négative que porte le terme laïcité dans notre environnement dans le sens où ce mot est un peu chargé de malentendus et beaucoup confondent laïcité et athéisme. Comme nous le savons, la notion de laïcité vient de l’Occident particulièrement de la France, et on a donc tendance à croire qu’être laïc revient à dire qu’on est antireligieux. Il faut par conséquent commencer à dissiper ce malentendu. Laïcité et religion peuvent et doivent cohabiter. Il y a un espace commun dans lequel la religion n’a pas à intervenir. Pour revenir à la formation des responsables religieux, dans la mesure où l’enseignement de la religion est ici une prérogative des communautés (puisqu’il est géré par les communautés et non par l’enseignement officiel), à l’intérieur de l’USJ, nous avons créé un programme de formation à la connaissance de l’autre tel que lui se voit. Quant aux hommes politiques, ces derniers devraient sortir de cette instrumentalisation de la religion et tracer la ligne de démarcation entre le politique et le religieux.

Une éducation à la citoyenneté permettant à chacun d’être également respecté et de vivre pleinement toutes les dimensions sociales est-elle possible?
Le premier livre édité par Gladic répond parfaitement à votre question. C’est celui du professeur Antoine Messarra La culture citoyenne dans une société multicommunautaire. Il existe différents axes sur lesquels on peut aussi travailler. Messarra parle dans son livre de la psychologie politique, de la culture des pactes, de l’égalité et du compromis sans compromission. Dans Gladic, nous travaillons beaucoup sur cette notion de culture citoyenne. Nous sommes persuadés que ceci devrait faire partie des programmes d’enseignement officiels au niveau de toutes les écoles qu’elles soient publiques ou privées.

Propos recueillis par Natasha Metni
 

La culture de l’unité
Le Gladic (Groupement libanais d’amitié et de dialogue islamo-chrétien) a été fondé le 2 juin 2012 en vertu du récépissé N° 954 émis par le ministère de l’Intérieur et des Municipalités libanais. Il est né de la conviction de ses fondateurs que le dialogue islamo-chrétien au Liban est capable d’instaurer la culture de l’unité dans la diversité, indispensable à la connaissance de l’autre, à développer les amitiés et à protéger le «vivre-ensemble».

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