Cette semaine, le traitement de l’actualité libanaise par les grands titres de la presse internationale revient à ses fondamentaux; aux crises multiples du moment s’ajoutent d’autres problèmes de société, plus profonds.
Libération
Le quotidien français Libération raconte le quotidien de «la base arrière de la Syrie au Liban».
Près de la ville de Qasr, on est au plus près de la frontière syrienne. Le propriétaire d’une maison me montre depuis son toit le paysage qui s’offre à nous. «Juste là, derrière les arbres, on est déjà en Syrie. On est à 100 mètres de la Syrie», dit-il. Il y a des vaches qui paissent dans des champs, une retenue d’eau juste devant nous et un petit poste-frontière syrien avec le drapeau national et ses deux étoiles. En revanche, pas de poste-frontière libanais. L’Armée libanaise est absente. Ici, on est sur le territoire du Hezbollah.
Il y a un an, la ville de Qoussair est tombée aux mains des rebelles. Depuis, le régime de Damas s’est fixé comme objectif d’en reprendre le contrôle avec l’appui des combattants du Hezbollah. Abou Ali est libanais et agriculteur. Il possède 100 hectares de terre, côté syrien, héritage du découpage des frontières au début du XXe siècle. Abou Ali a 46 ans. C’est un musulman chiite. Il cultive du blé sur ses terres et élève des vaches et des chèvres. Mais il y a huit mois, il affirme que des combattants de l’opposition syrienne sont venus s’installer sur une partie de son terrain. Depuis, il a décidé de prendre les armes pour défendre sa terre contre les «terroristes», terme également utilisé par le régime syrien pour désigner les rebelles.
Abou Ali montre son uniforme, un treillis. «Nous avons dû unifier nos uniformes parce qu’avant, les terroristes venaient en civil et s’infiltraient parmi nous. Maintenant, on a tous le même uniforme. Personne ne peut entrer dans notre région sans cet uniforme. On peut se reconnaître les uns les autres… Notre armement est très simple, moi, je n’ai qu’une kalachnikov. C’est tout». Abou Ali appartient à l’un des comités populaires qui sont en fait des milices formées dans les treize villages syriens frontaliers du Liban.
Le Nouvel Observateur
Le Nouvel Observateur s’est intéressé au cas de la communauté homosexuelle libanaise.
Rami, Marwan et Ahmad vivent au quotidien dans la peur de l’opprobre et de la discrimination au sein de leur société. Ils disent ne demander que de pouvoir «aller en boîte sans craindre d’être embarqués par la police». Au Liban, réputé pour être l’un des pays les plus libéraux d’un Moyen-Orient conservateur, les homosexuels sont moins persécutés qu’ailleurs dans la région, mais restent ostracisés par la société sauf dans les milieux aisés de la capitale. «Si tu veux être gay au Liban, tu as intérêt à être puissant et célèbre comme Yves Saint Laurent», confie Marwan, homme d’affaires d’une quarantaine d’années.
Il dit militer pour l’abrogation de l’article 534 du code pénal libanais, selon lequel les relations sexuelles «contre nature» sont illégales, avec une peine allant jusqu’à un an de prison. A l’heure où le mariage gay vient d’être légalisé en France, les homosexuels du Liban affirment être à des «années-lumière» de cette procédure. Mais, demande l’auteur du blog gayinbeirut, «Ne pouvons-nous pas au moins dépénaliser l’homosexualité?». «Au travail, si on sait que tu es homosexuel ou lesbienne, tu te fais licencier sans avoir le droit de protester», affirme Ahmad, un membre de Helem. Aussi, font-ils profil bas et tentent de vivre leur amour dans les salles obscures de cinéma et surtout des boîtes de nuit homophiles. Mais même là-bas, ils ne sont pas à l’abri des descentes, souvent brutales, des forces de sécurité. Le 21 avril, la police a fait irruption dans un bar fréquenté par des travestis à Dekwéné, dans la banlieue est de la capitale libanaise. «Les policiers ont tabassé et arrêté plusieurs jeunes». Certains ont été dévêtus et pris en photo au commissariat. Cette semaine, des dizaines d’homosexuels ont osé manifester devant le Palais de justice pour protester contre l’incident. Mais en dépit de ces obstacles, certains ont de l’espoir. «En dix ans, les choses ont changé, on peut parler du sujet, il y a plus de sensibilisation et les médias n’utilisent plus le mot ‘pervers’ (en arabe) pour désigner un homosexuel», se félicite Ahmad.
Courrier International
Une info relayée par le Courrier International, qui reprend une dépêche d’agence qui a beaucoup circulé cette semaine, «La compagnie MEA vole coûte que coûte au-dessus de la Syrie».
La compagnie aérienne libanaise serait l’une des seules à continuer à survoler le territoire syrien. Mais tant que les compagnies d’assurances continuent à couvrir ce trajet, MEA estime qu’il n’est pas nécessaire de changer d’itinéraire, ce qui risquerait de faire augmenter le prix des billets. Concurrence oblige, certaines compagnies aériennes sont prêtes à tout – ou presque – pour conserver leur marché. Pour preuve, voici l’exemple de la libanaise MEA. Alors que la plupart des compagnies aériennes évitent l’espace aérien de la Syrie, où les hostilités ont fait plus de 70000 morts en deux ans, MEA persiste et continue de survoler le pays. Pourquoi diable la compagnie libanaise prend-elle un tel risque au lieu de dévier sa trajectoire? Les pilotes n’ont pas manqué de poser la question à leur direction à maintes reprises. Certains se seraient même plaints d’avoir «vu de leurs propres yeux des roquettes qui se baladaient dans le ciel syrien, exposant tout avion se trouvant dans la zone à un risque extrême». Mais pour Mohammad el-Hout, le président du conseil d’administration de la MEA, l’argument n’est pas suffisant. La question ne se pose pas tant que «les compagnies d’assurances continuent de couvrir ces trajets».
Un argument purement mercantile en somme. En effet, contourner l’espace aérien de la Syrie rendrait les vols moins attractifs car plus chers. La compagnie estime donc que, face à la farouche concurrence de son secteur, elle ne peut pas se permettre de prendre un tel risque.
The Globe and Mail
Le quotidien canadien anglophone The Globe and Mail revient sur le sort de Issa Mohammad, «terroriste» palestinien de son état, expulsé ce week-end vers le Liban, qui pose la question de l’immigration au Canada.
Le ministre fédéral de l’Immigration, Jason Kenney, a annoncé l’expulsion d’un Palestinien, Issa Mohammad, condamné en 1968 pour avoir attaqué un avion israélien à Athènes, en Grèce. L’homme de 70 ans est un ancien membre du Front populaire pour la libération de la Palestine (FPLP). Il avait obtenu un pardon du gouvernement grec en 1970 et sa peine avait été commuée après des négociations ayant suivi une prise d’otages dans un autre avion.
Issa Mohammad a obtenu sa résidence permanente au Canada en 1987 avec sa femme et ses trois enfants, mais une enquête a conclu qu’il n’aurait pas dû y être admissible, en raison de sa condamnation pour l’attaque de l’avion, dont il n’avait pas fait mention au moment de présenter sa demande.
Il a été expulsé samedi vers le Liban, pays d’origine de sa femme. Le ministre Kenney a avoué n’avoir aucune garantie sur le sort qui sera réservé là-bas à Mohammad, ajoutant toutefois que plusieurs rapports passés indiquaient qu’il n’y aurait pas de risque pour sa sécurité. Les membres de sa famille n’ont pas été expulsés. Les autorités fédérales ont amorcé en 1988 les démarches pour expulser Issa Mohammad, qui vivait dans la localité de Burlington, en Ontario. Il avait reçu l’ordre de quitter le Canada, mais avait déposé une demande de statut de réfugié. Celle-ci avait été refusée, mais le tout s’est poursuivi pendant des années.
Le ministre Kenney a indiqué qu’il ne savait pas si l’homme avait un emploi et comment il a vécu pendant ces 26 ans au Canada. Il a fait de ce cas un exemple «de l’état dysfonctionnel qu’ont atteint les systèmes d’immigration».
Julien Abi Ramia
The National
La diaspora envoie moins d’argent
Citant plusieurs acteurs économiques libanais, le quotidien émirati The National écrit que la diaspora libanaise envoie moins d’argent au pays.
Après une hausse constante, la masse monétaire envoyée par les expatriés libanais dans leur pays d’origine s’est stabilisée ces deux dernières années, malgré la montée de l’instabilité et des tensions. L’année dernière, l’envoi de fonds vers le Liban s’élevait à 7,47 milliards de dollars, soit 0,8% de moins qu’en 2011. A noter qu’en 2004, ce chiffre flirtait avec la barre des cinq milliards. Alors qu’à travers le monde, le chiffre de transferts de fonds a globalement augmenté, trois facteurs expliquent le phénomène. D’abord, la masse est déjà très importante et il est difficile d’aller plus haut. Ensuite la crise économique internationale. Les ménages libanais de l’étranger sont aussi touchés par la crise et la montée des tensions, qui poussent de plus en plus de Libanais à quitter leur pays, pour rejoindre leurs familles à l’étranger.