Du 23 mai au 2 juin, Alain Plisson présente au théâtre Tournesol son adaptation du Roman d’un tricheur de Sacha Guitry, avec son groupe de comédiens amateurs, au profit d’associations de bienfaisance. Quand l’humour se fait subtilité.
En décembre, au moment où Alain Plisson poursuivait les répétitions de Huis Clos qu’il a mis en scène et présenté en janvier au théâtre Montaigne, il comptait monter plus tard La Locandiera de Carlo Goldoni. Mais son actrice principale se retire, le laissant avec un projet avorté. Une nouvelle fois, il fouille dans ses tiroirs et retrouve un de ses anciens projets: l’adaptation du Roman d’un tricheur de Sacha Guitry qu’il avait écrit, il y a des années, en pensant à son ami et comédien Robert Arab pour l’interpréter. Mais le projet n’a finalement pas vu le jour, puisque la même année Jean Piat présentait au Liban la pièce De Sacha à Guitry.
Le projet est donc relégué aux oubliettes, jusqu’à récemment, après «la magnifique expérience de Huis Clos que je ne peux pas oublier, parce que j’étais sûr que personne ne viendrait, mais on a fait salle comble tous les soirs. J’étais tellement content de voir qu’il y a encore un public qui vient voir des pièces intéressantes autrement que pour des œuvres de charité». Et Alain Plisson ne cesse de le répéter, à chaque fois, avec entrain et passion. «Le théâtre se doit de véhiculer de beaux textes, de faire connaître de nouveaux auteurs, de palper une réalité et d’en être le témoin. Le théâtre a toujours été le témoin de son temps. Je ne considère pas le théâtre comme un divertissement». Et pourtant, ajoute-t-il, «Le roman d’un tricheur est un divertissement. Mais quel divertissement! Quel plaisir d’écouter cette langue française magnifiée par un des humoristes les plus célèbres du siècle dernier, qui a laissé une œuvre considérable sous le signe de l’humour, du sarcasme. On ne rit pas à gorge déployée à Guitry, on sourit tout le temps, tellement c’est fin, subtil, racé, élégant».
Le théâtre témoin de son temps
En 1935, Sacha Guitry publie son unique roman Les mémoires d’un tricheur qu’il adapta un an plus tard au cinéma sous le titre Le roman d’un tricheur. Et c’est le film qu’Alain Plisson a décidé de transposer au théâtre, tout en précisant qu’il n’y a eu qu’une seule adaptation théâtrale par Francis Huster qu’il a jouée comme un one man show. Plisson, lui, ne veut pas présenter un one man show, mais une pièce de théâtre, avec des personnages qui se présentent sur scène, un décor travaillé en toute simplicité et se jouant essentiellement de l’éclairage, des costumes qui traversent les époques. «J’aime que l’œil soit favorablement impressionné par ce qu’il voit et pas seulement par ce qu’il entend».
Mais comment transposer en pièce de théâtre l’histoire d’un homme qui raconte sa vie à la première personne? Eh bien, Alain Plisson fait venir sur scène les personnages du passé dont le narrateur parle à son confident, le garçon du bar de l’hôtel où il est assis. Ce n’est pas l’unique changement qu’il apporte. La pièce se passe en 1946 et non en 1935, «car cela m’a permis de me situer dans une année charnière dans la vie de Sacha Guitry, qui est toujours sur scène, même si on ne le voit jamais, suspendu au téléphone, essayant de joindre une jeune femme, en grand séducteur qu’il était. C’est l’année également où, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, Guitry est accusé d’avoir collaboré avec les Allemands, mis en prison puis en résidence surveillée. Sa vie a été brisée. 1936, poursuit-il, c’était l’année de l’insouciance. On ne voyait pas la guerre venir. Alors qu’en 46, ce sont les lendemains qui déchantent. Parce que dans Le roman d’un tricheur, sous cette apparence de facilité et d’humour, il y a une forme de désenchantement qui surgit de temps en temps». Alors au fil de la pièce, le public assistera à l’évolution du personnage à travers ceux qu’il rencontre, les événements qu’il traverse, et verra ce qui l’a conduit à devenir tricheur, puis joueur. «Maintenant, ajoute Plisson, c’est au public de nous dire si nous avons fait le bon choix».
Nayla Rached
Le roman d’un tricheur, c’est du 23 mai au 2 juin, au théâtre Tournesol, à 20h30, avec Michel Moppert, Cyril Jabre, Cécile Petit-Robert, Denise Chéhab et Catherine Prost.
Programme des représentations
Jeudi 23 mai: Caritas.
Vendredi 24: Ordre du mérite.
Samedi 25: Ligue maronite.
Dimanche 26: Louise de Marillac.
Jeudi 30: Amel.
Vendredi 31: Ligue latine
Samedi 1 et dimanche 2 juin: soirées ouvertes.
Billets en vente à la Librairie Antoine d’Achrafieh: 01. 218078 et au théâtre Tournesol: 01.381290.