La compagnie franco-belge d’Electricité de Beyrouth contrôlait le secteur de l’électricité au Liban au début des années de l’Indépendance. Elle avait obtenu la concession sous l’Empire ottoman en 1906 et en a joui jusqu’en 2005. Mais en raison d’un conflit avec les autorités libanaises, celles-ci ont décidé de la placer sous séquestre.
La compagnie d’Electricité de Beyrouth (EB) a protesté à plusieurs reprises contre une décision de l’Etat libanais de baisser unilatéralement les tarifs de l’électricité, alors que le gouvernement libanais précise que lorsqu’il a demandé de réviser les tarifs à la baisse, la compagnie a exprimé ses réserves sans demander d’arbitrage. Celle-ci proteste et affirme qu’elle a demandé un arbitrage sur les tarifs, mais le gouvernement libanais l’a refusé.
L’EB allègue que, à la suite des positions du gouvernement, elle n’a pas pu percevoir la totalité des factures de certains particuliers et des industries et qu’elle n’a pas été dédommagée des pertes subies de ce fait. Le gouvernement libanais affiche un autre point de vue, rendant l’EB responsable des pénuries qui ont abouti à une régression du travail des industries. L’EB se devait d’accroître sa production, mais elle avait arrêté ses travaux, laissant l’électricité dans un état lamentable. Les pannes sont devenues très fréquentes, et le courant est sans cesse coupé, se répercutant ainsi négativement sur l’industrie.
La compagnie accuse le gouvernement libanais de vouloir nationaliser le secteur de l’électricité. Celui-ci proteste et affirme qu’il n’en a pas l’intention. Il demande seulement à vérifier les comptes de l’EB qui refuse l’accès de ses registres aux inspecteurs de l’Etat.
L’affaire se corse. L’EB demande à Beyrouth de respecter le protocole libano-français, selon lequel le gouvernement libanais ne peut modifier la concession ni le cahier des charges sans l’accord de la compagnie. Beyrouth fait la sourde oreille, réplique qu’il ne s’agit pas de modifier le cahier des charges mais de l’appliquer et ne répond pas aux protestations de la France et de la Belgique, la compagnie étant franco-belge.
Pour les autorités libanaises, il fallait remédier à un état qui remonte à plusieurs décennies. L’EB ne payant pas de taxes ou de douanes sur ce qu’elle importe. Une décision est prise. Le 29 mars 1953, la police occupe les locaux de la compagnie. Cette dernière est placée sous séquestre. La raison invoquée par l’Etat est que l’EB n’a pas respecté les intérêts des usagers et refuse d’appliquer les clauses du cahier des charges.
Philippe Eddé et Khalil Hibri sont désignés directeurs provisoires de la compagnie. Ils sont remplacés en juin 1953 par Jamil Nammour et Saadi Mounla.
L’état de l’électricité ne s’améliore pas. Au contraire, les pénuries et les coupures de courant sont fréquentes et se répercutent sur toute l’économie du pays. Les nouveaux directeurs de l’EB imputent ces lacunes à de multiples raisons, dont le non-paiement des factures, le vol du courant, la chute de la production d’électricité, le mauvais état des matériaux, ainsi qu’à l’augmentation de la consommation. Le gouvernement décide de réagir. Il relie Beyrouth au réseau de Qadisha et vote en novembre 1953 l’achat de groupes de générateurs pouvant fournir immédiatement 6 000 KW et 50 000 KW trois mois plus tard. On parle déjà du rachat de la concession de l’EB. Il a fallu attendre avril 1954 pour constater une amélioration de la situation du courant. Le réseau de Beyrouth est désormais connecté à ceux de Qadisha, Jozé et Nahr el-Bared.
L’affaire est terminée avec la conclusion d’un accord en mars 1954 pour le rachat de la concession de l’EB pour 23 millions de livres libanaises. Il est voté par la Chambre le 29 juin 1954. Le 14 août, Saadi Mounla en est nommé président du conseil d’administration.
Mais au lieu de constater une amélioration, les pénuries deviennent plus fréquentes, et Beyrouth souffre pendant des jours d’une coupure totale du courant. La production du courant est tombée de 28 KW à 17 KW. La nouvelle administration allègue du manque de pièces de rechange et du mauvais état des matériaux.
Arlette Kassas
Les informations citées dans cet article sont tirées d’Internet et du Mémorial du Liban – le mandat Camille Chamoun, de Joseph Chami.
La centrale de Zouk
Le 16 avril 1953, la Chambre vote le projet de la construction de la centrale électrique de Zouk pour un montant de 1,45 million de livres. Les travaux commencent en septembre 1954 et le président Camille Chamoun inaugure la centrale thermique le 19 janvier 1956. Elle devait couvrir les besoins du Grand-Beyrouth.