Magazine Le Mensuel

Nº 2920 du vendredi 25 octobre 2013

Le Saviez-Vous

Peine de mort. Abolition contestée dans le monde arabe

A l’initiative de l’association «Ensemble contre la peine de mort», et à l’occasion de la Journée mondiale consacrée à ce thème, un séminaire parlementaire a été organisé à Paris au Sénat et à l’Assemblée nationale pour traiter la question dans les pays du Moyen-Orient et du Maghreb. Y ont participé trois députés libanais: Ghassan Moukheiber, Samir el-Jisr et Ali Fayad.
 

A l’heure où cent quarante pays ont déjà aboli la peine de mort, le Liban est à la traîne, malgré les efforts et la lutte de certaines organisations et associations. Les militants pour l’abolition de la peine de mort au Liban sont nombreux. Ils se basent sur les droits de l’homme souvent bafoués dans plusieurs pays du pourtour méditerranéen et du monde pour mener campagne contre la peine capitale. Cependant, ils se heurtent à de gros obstacles dans le contexte social et parfois religieux. La charia islamique, notamment, prévoit cette peine. Ce qui n’a pas empêché un véritable moratoire de fait d’être adopté entre 1998 et 2004.
Depuis l’indépendance en 1943, le Liban compte cinquante-trois exécutions. En 1998, après quinze ans d’abstention, deux meurtriers ont été pendus publiquement. Puis plus rien n’a été fait avant le 17 janvier 2004, date à laquelle trois condamnés sont exécutés, deux par peloton d’exécution et le troisième par pendaison. Les trois personnes exécutées sont Rémy Antoine Zaatar, qui avait tué en juin 2000 deux membres de la Défense civile et blessé un officier syrien mort des suites de ses blessures, Ahmad Mansour, qui avait tué en juillet 2002 à Beyrouth huit de ses collègues employés de la Mutuelle des enseignants, et Badih Hamadé, membre d’un groupuscule fondamentaliste sunnite qui avait tué trois militaires libanais à Saïda.
En 2008, dix-neuf condamnations à mort contresignées par le chef de l’Etat et les ministres concernés n’ont pas été validées par le ministre de la Justice de l’époque, Ibrahim Najjar. Actuellement, cinquante-quatre condamnés attendent dans le couloir de la mort, mais depuis plus de neuf ans, aucune peine de mort n’a été exécutée.
Malgré une prise de conscience, de plus en plus développée, et l’engagement de la société civile libanaise dans la protection des droits des détenus, un long chemin reste à faire.
En décembre 2012, une résolution en faveur d’un moratoire sur l’application de la peine de mort dans le monde a été adoptée par l’Assemblée générale de l’Onu. Bien que le texte n’ait pas été contraignant, 111 Etats se sont prononcés pour l’abolition, 41 ont voté contre, dont les Etats-Unis, la Chine, le Japon, l’Inde, la Corée du Nord, l’Arabie saoudite, et 34 autres se sont abstenus. Le Liban compte parmi ces derniers. Dans les autres pays arabes, la situation est peu favorable à l’abolition de la peine de mort, celle-ci étant inscrite dans la charia. Certains cependant, dont le Liban, ont établi un moratoire de fait, réduisant au minimum l’exécution de la peine. La sensibilisation internationale se poursuit. La célébration de la Journée mondiale contre la peine de mort laisse présager son abolition d’ici quelques années.

Arlette Kassas

Un puissant lobby
La «Commission internationale contre la peine de mort» est créée par l’ancien chef du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero. Elle compte treize personnalités internationales, dont l’ancien ministre 
libanais de la Justice, Ibrahim Najjar, et l’ancien ministre français de la Justice Robert Badinter. Cette commission s’oppose à la peine de mort en toutes circonstances, parce qu’elle viole le droit à la vie inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme. La 
commission a tenu une réunion à Madrid en décembre 2012. Elle a été suivie d’une autre, le 14 avril 2013 à Oslo. L’objectif est de définir une nouvelle action, notamment en Afrique 
et en Amérique du Sud.

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