Magazine Le Mensuel

Nº 2920 du vendredi 25 octobre 2013

Confidences Liban

Confidences Liban

Nuages dissipés entre alliés
Les médiations qui se sont intensifiées entre Rabié et la banlieue sud ont fini par porter leurs fruits et dissiper les nuages qui ont assombri les relations entre le CPL et le Hezbollah. Le général Michel Aoun avait reproché au Hezb de l’avoir lâché en appuyant la prorogation du mandat du Parlement et celui du commandant en chef de l’armée, le général Jean Kahwaji. Les sources du 8 mars révèlent que le parti chiite a fait savoir au général Aoun qu’il se tient à ses côtés sur le dossier gouvernemental et refuse de participer à un cabinet duquel Aoun serait exclu, tout en appuyant l’octroi du portefeuille de l’Energie au ministre Gebran Bassil. Ces prises de position ont ainsi réussi à calmer le jeu entre les deux formations qui étaient au bord de la rupture.

 

Omar el-Atrache déchiqueté
Le président de la municipalité de Ersal, Ali Hojeiry, qui a mis en doute la mort de Omar el-Atrache, a finalement reconnu sa disparition. Des lambeaux de son corps déchiqueté et de ses vêtements, a-t-il dit, ont été retrouvés et sa famille n’était pas opposée à ce qu’un test ADN soit effectué sur ses restes. Atrache était l’accusé principal dans les attentats de la banlieue sud et il aurait péri dans des conditions mystérieuses. Or, cet assassinat a coïncidé avec l’arrestation, par l’unité des Renseignements, des principaux suspects, originaires de Jabal Mohsen, qui seraient responsables des deux explosions de Tripoli. Les services sécuritaires détiennent suffisamment d’informations et de détails sur les criminels qui, selon des sources, ne pourront pas échapper à la justice, même si certains se trouvent actuellement en Syrie.

 

Bassil vs Ali Khalil: le Hezbollah médiateur
Le Hezbollah a décidé d’intervenir sur la ligne de tension entre le Courant patriotique libre (CPL) et le chef du Législatif, Nabih Berry, sur le dossier des ressources énergétiques, après que la polémique entre les ministres Gebran Bassil et Ali Hassan Khalil eut atteint un comble. Le Hezbollah, rapporte un député du 8 mars, œuvre à trouver un terrain d’entente entre les deux composantes de la même coalition pour mettre un terme à ce déballage houleux. Le parti chiite propose le gel de la polémique médiatique dans une première étape pour paver la voie au Parlement afin qu’il se saisisse à nouveau du dossier et lui consacre une séance, en présence du gouvernement d’expédition des affaires courantes. L’idée est d’aboutir à des recommandations péremptoires pour le gouvernement et à la publication des décrets nécessaires conformément à une formule consensuelle.

 

Le sommet spirituel n’aura pas lieu
La communauté sunnite n’a pas réagi favorablement à l’appel lancé par le patriarche grec-orthodoxe, Youhanna Yazigi, pour la tenue d’un sommet spirituel. Les Premiers ministres se sont excusés de ne pouvoir participer à un tel sommet qui conforterait le mufti Mohammad Rachid Kabbani dans sa fonction, alors qu’il est en conflit avec des instances de la communauté, et notamment avec le Moustaqbal. Le patriarche Yazigi avait réclamé l’organisation de ce sommet à la suite de l’enlèvement des deux évêques en Syrie afin que l’ensemble des chefs religieux prennent une position commune sur ce dossier. L’un des membres du dialogue islamo-chrétien rappelle que les leaders sunnites boycottent le mufti et fait remarquer que l’incident de Tarik Jdidé reflète

bien la profondeur de la fracture entre la rue sunnite et Dar el-Fatwa.

 

Loi électorale liée au conflit régional
Mission inachevée jusque-là pour la commission chargée par le cardinal Mar Béchara Boutros Raï d’élaborer une nouvelle proposition de loi électorale. Un ex-ministre de l’Intérieur estime que la querelle sur la loi électorale est en fait d’ordre politique et reliée au conflit régional. Il est, par conséquent, impossible de clore le dossier tant qu’une entente politique n’a pas été scellée, quel que soit le mode de scrutin, proportionnel ou majoritaire. Le patriarche maronite a donc décidé d’entamer des consultations avec toutes les parties dans le but de trouver une formule susceptible de faire l’unanimité.

 

Les diplomates veulent un cabinet
Les diplomates, accrédités au Liban, encouragent les politiques libanais avec lesquels ils sont en contact à faciliter la mise sur pied d’un gouvernement d’intérêt national. Il regrouperait l’ensemble des acteurs sur la scène politique afin de réactiver les institutions, relancer le cycle économique et organiser l’élection présidentielle selon le calendrier constitutionnel pour éviter toute vacance au niveau de la plus haute fonction de l’Etat. Les mêmes diplomates évitent cependant de s’aventurer en avançant des noms de présidentiables et se contentent de dire que la priorité à l’heure actuelle est au règlement de la crise ministérielle.

 

Abadi chez Siniora: prélude à la détente
L’ambassadeur d’Iran Ghadanfar Rokn Abadi a rendu visite au président du Bloc du Futur, Fouad Siniora, pour lui remettre un message de remerciements du président iranien Hassan Rohani. Cette rencontre n’est pas passée inaperçue. D’autant plus que le diplomate iranien a insisté sur le renforcement de la coopération et la consolidation des relations entre son pays et les pays du Golfe, l’Arabie saoudite en tête. Cette démarche reflète, selon les milieux du 14 mars, la nouvelle politique d’ouverture de Téhéran que le président Rohani tente d’instaurer en prenant contact avec les adversaires d’hier pour en faire des alliés. Le sommet irano-saoudien prévu dans les deux semaines à venir, comme cela est dit, devrait se traduire par une décrispation au Liban qui entraînerait la mise sur pied du gouvernement tant attendu.

 

Fusion des initiatives
Des députés du Moustaqbal ne comprennent pas pourquoi le président du Parlement Nabih Berry a été vexé par les forces politiques qui n’ont pas appuyé son initiative. Ils se demandent, par ailleurs, quelles sont les raisons qui avaient poussé le chef du Législatif et ses alliés du 8 mars à ignorer l’initiative avancée par l’ex-Premier ministre, Saad Hariri, il y a plus d’un an. Certains réclament la fusion de toutes les initiatives afin d’apporter une réaction favorable à l’appel du président de la République Michel Sleiman, pour former un nouveau gouvernement et relancer le processus du dialogue à Baabda.

 

Un Libanais non identifié périt en Syrie
Un jeune Libanais, qui avait mis sur pied un atelier de fabrication d’explosifs et construit un dépôt pour les munitions, aurait été abattu, avec trois autres jeunes gens qui travaillaient pour lui, dans le village de Mitras dans le rif de Tartous. Le Libanais, non identifié, faisait partie, selon les informations, d’un groupe armé libanais lié au Front al-Nosra posté dans le village stratégique de Hosn au haut d’une montagne surplombant certaines bourgades de Homs et Tartous. Ce groupe conserve des couloirs d’approvisionnement avec d’autres mouvements armés libano-syriens installés sur l’axe Tall-Kalakh-Akkar-Tripoli. Des informations parvenues à une source sécuritaire rapportent que quelques combattants libanais, dont Sleiman el-Mahmoud auteur du massacre de Marmarita près de Homs, programmaient de se déplacer à Mitras, près de Safita, où ils comptaient s’implanter pour épauler le poste de Hosn et le transformer en base pour les activités terroristes dans le rif de Tartous. Les Renseignements syriens avaient eu le jeune Libanais par surprise en piégeant son atelier avant que l’armée syrienne ne prenne d’assaut le village.

 

Immigration clandestine: le marché libanais prospère
«La mafia du trafic des réfugiés» pourrait atteindre le Liban via la Méditerranée, d’après un expert. Il fait remarquer que les drames qui se sont succédé à commencer par l’apparition de quelques «chargements humains» dans les eaux de Tyr, en passant par la tragédie de la barque indonésienne qui a fait plus de quarante morts, et la masse de citoyens syriens et palestiniens emportés par la mer face à Malte, à la Sicile et à Lampedusa… montrent combien sont pesantes les pressions dues à l’afflux démographique vers le Liban. Les conditions sociales insupportables poussent ces misérables à prendre les embarcations clandestines malgré les dangers qu’elles impliquent. L’Union européenne, comme l’explique cet expert, veut faire assumer à l’armée et aux organes de sécurité le poids des graves mutations de l’environnement sociopolitique à l’est de la Méditerranée, alors que cela fait deux décennies que les pays européens n’arrivent pas à lutter contre l’immigration illégale vers leur territoire, malgré les grands moyens techniques, financiers et militaires investis. A l’origine de ce phénomène d’immigration illégale, les conditions de vie socio-psychologiques des familles et des individus que le désespoir pousse à quitter leur pays d’origine pour des destinations où ils pensent trouver une vie meilleure. C’est pourquoi l’Union européenne est appelée à assumer ses responsabilités auprès du Liban pour contrecarrer le développement du «marché de l’immigration clandestine», sans se contenter de jouer à l’inspecteur qui mène des enquêtes sur les réfugiés, sans les aider pour autant.

Pro et anti-Kabbani s’affrontent
C’est la sagesse du mufti Mohammad Rachid Kabbani qui a empêché le déclenchement d’un affrontement armé à Tarik Jdidé, le jour de la fête de l’Adha. Des éléments armés proches du Moustaqbal, accompagnés de combattants palestiniens et syriens, avaient mené une attaque armée et cerné la maison d’Abou Ali Saïd Chamla, l’accompagnateur du mufti, empêchant la famille d’en sortir. L’objectif de l’accrochage programmé était de chasser les Chamla de la région où ils vivent depuis plus de quarante ans, pour la simple raison qu’ils sont politiquement opposés aux Hariri. Mais le mufti, pour éviter la dégradation de la situation, a exhorté Abou Ali à ne pas répondre aux sources de tirs, et pris contact avec le commandant en chef de l’armée. C’est l’armée qui a finalement sorti Chamla de son domicile près de l’hôpital des Makassed avant de le remettre aux Forces de sécurité. L’activiste local, qui rapporte ces informations, dément le blocage de la corniche de Mazraa et de Tarik Jdidé par des centaines d’éléments des Saraya de la Résistance, ajoutant que c’est l’intervention rapide de la troupe qui a circonscrit l’incident. Au même moment, les proches du président Fouad Siniora tentaient de recueillir la signature des notables sunnites, faisant circuler une pétition accusant le mufti de malversations et autres délits et réclamant sa révocation.

Doha tâte le pouls des chiites
Le Qatar, selon des informations qui ont filtré, tâte le pouls du tandem chiite en vue d’une reprise de contacts. Une source chiite précise que «Doha a voulu que la libération des pèlerins d’Aazaz soit l’occasion d’une rencontre entre le Qatar et les chiites, et que le chef de la diplomatie de l’émirat, Khaled el-Attiyah, accompagne les otages libérés à partir de la Turquie jusqu’à Beyrouth». Le nouvel émir Tamim Ben Hamad Al Thani tente, en effet, de déployer des efforts pour rééquilibrer la présence politico-diplomatique de son pays au Liban. Les rencontres de Attiyah avec les hauts responsables étaient déjà programmées à l’exception des instances chiites. C’est ce qui a poussé le ministre qatari à s’abstenir de franchir la porte de son avion à son arrivée à Beyrouth, poursuit la même source, mais sa rencontre avec son homologue libanais, Adnan Mansour, à bord de l’avion qui transportait les pèlerins d’Aazaz a, en quelque sorte, compensé l’insuccès du replâtrage entre Doha et les chiites. Les contacts libano-qatariotes vont cependant se poursuivre dans le cadre des efforts secrets entrepris pour la libération des deux évêques enlevés à Alep.

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