Dans son premier ouvrage, Parcours anonyme, Joëlle Cattan, avocate de formation, raconte l’histoire d’un jeune diplomate qui souhaite, coûte que coûte, écrire un livre. Il n’a pas pu réaliser son souhait en raison de ses multiples activités, jusqu’au jour où il se retrouve en vacances et décide d’exécuter son projet.
Vous mettez en évidence la puissance de l’anonymat. Vous qui venez d’un pays où les gens vivent au rythme de la vie des autres plus que pour eux-mêmes, qu’est ce qui vous a tentée dans ce sujet?
L’anonymat ne se retrouve pas dans mon ouvrage de façon philosophique ou académique. Il résulte des faits, des événements et de l’histoire qui y sont relatés. Il ne s’agit pas bien entendu du seul thème abordé. Je me suis laissé guider par mes personnages qui cherchaient à attribuer au regard des autres − ce «regard» extérieur qui vient de personnes que nous ne connaissons pas, voire des anonymes −, une autre connotation, un aspect qui n’a rien à voir avec la curiosité et l’indiscrétion. L’un de mes personnages, par exemple, se méfie du regard des autres lorsqu’il les connaît. Il préfère parfois la compagnie d’anonymes pour pouvoir se confier à eux sans être jugé. Il n’attend rien en retour. Un autre personnage recherche le regard des autres, parce qu’en retour, il attend beaucoup de choses. Il compte sur le regard extérieur des anonymes pour redonner de la matière à des histoires, des faits, des événements oubliés à force d’être banalisés ou tombés dans l’oubli. Pour leur redonner l’importance et l’ampleur qu’ils méritent, de façon neutre et impartiale. Pour également élargir ce que j’appelle dans mon livre «le cercle de la mémoire» et pour forcer le destin à ne plus être uniquement «porteur de mauvais sort», mais «messager de bon augure».
Pourquoi ce jeune diplomate a-t-il remis sans cesse ce projet d’écriture?
C’est parce qu’il était pris par ses obligations professionnelles, familiales, sociales… Ce n’est que lorsqu’il se retrouve pour la première fois en vacances pendant deux mois qu’il prend la décision de mettre son projet à exécution. Il est alors confronté à plusieurs éléments perturbateurs, dont l’intrusion dans sa vie de son ex-épouse, la découverte fortuite d’un manuscrit, le mystère d’un message codé et l’attente de la confirmation de sa nouvelle mission. Au fil des pages, le lecteur va vivre dans un suspense permanent avant de découvrir si ce diplomate réussira à gérer ou pas les avances persistantes de son ex-femme. S’il parvient à découvrir l’auteur du manuscrit ou s’il préfère en décrypter le contenu. S’il existe un lien entre le message codé, le manuscrit et sa nouvelle destination et, enfin, s’il sera en mesure de prendre sa plume et d’écrire son livre.
C’est votre premier roman. Qu’est-ce qui vous a poussée à l’écriture?
Ecrire est une expérience passionnante. Il s’agit pour moi d’une activité solitaire à connotation sociale. Solitaire, car nous nous retrouvons forcément seuls face à la page blanche pour écrire et nous concentrer. Mais cette solitude a un côté social, parce qu’en écrivant, nous rencontrons systématiquement plusieurs personnages à la fois. Nous faisons connaissance avec de nouvelles personnes qui nous projettent dans une succession d’aventures sans pareilles. n Propos recueillis par Danièle Gergès
Bio en bref
De nationalité libano-française, avocate et médiatrice de formation et de profession, Joëlle Cattan a vécu et travaillé
respectivement en France, au Liban et en Equateur. De retour à Beyrouth, où elle est installée depuis 2008, elle s’attelle à l’écriture de Parcours anonyme, son premier roman. Elle fera ses débuts en tant qu’avocate à Paris, dans le prestigieux cabinet Borloo Saigne et associés où elle exercera pendant six ans. Elle est diplômée de l’Université Panthéon-Assas en droit privé général. En 2001, elle est désignée directrice générale du Rassemblement des dirigeants et chefs d’entreprises libanais (RDCL). Elle fonde par ailleurs la première unité de médiation
bancaire dont elle devient directrice.