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Mouna Béchara

2013-2014: changement ou utopie?

L’année tire à sa fin et nous ne la regrettons pas. Nous passons à une autre. Sans vouloir être pessimistes en cette période de fêtes mais, hélas, simplement réalistes, il nous est difficile d’imaginer qu’en changeant un dernier chiffre à 2013, nous retrouverons nos belles années du lointain passé, d’une époque que les moins de quarante ans n’ont pas vécue. Sur une chaîne européenne, un reportage, diffusé la semaine dernière, racontait l’histoire du Liban, de ses traditions gastronomiques, du sens de l’hospitalité de ses habitants, de la richesse de son patrimoine national, de la joie de vivre et de la sérénité qui planent sur le pays. Le récit était fait par une journaliste française en tournée dans des villages pas si éloignés des grandes villes mais tellement mieux protégés de la pollution politique. L’espace d’une émission, nous avons repris espoir et confiance en nous-mêmes, sinon dans nos dirigeants.
La réalité nous a très vite rattrapés. Le journal télévisé local de la même soirée nous remettait les pieds sur terre. Nos responsables, irresponsables, de ces dernières décennies, à de rares exceptions près, reprenaient d’assaut notre petit écran pour nous rappeler qu’ils étaient toujours bien présents et qu’on ne savait pas jusqu’à quand. Que leurs agissements comme leurs discours ne portaient aucune lueur d’espérance. Des ministres qui se jettent des accusations si graves qu’il faut l’intervention de la justice pour les départager. Du rarement vu au Liban et ailleurs. Nos ancêtres ont réussi à sortir des griffes ottomanes au prix de leurs vies. La Place des Martyrs leur doit son nom. Nos aînés ont obtenu, quant à eux, la libération du Liban et la fin du mandat français pour, malheureusement, une tutelle syrienne due au chaos dans lequel nous avons réussi à plonger le pays. Nos frontières s’étaient ouvertes aux réfugiés palestiniens qui n’ont pas tardé à profiter de la faiblesse des responsables libanais pour les remplacer ostensiblement par des occupants palestiniens qui ont pris en main les rênes du pays en installant des barrages de contrôle des citoyens libanais. Ce fut la guerre des milices de 1975 et l’imposition d’une tutelle syrienne sur le pays. Une tutelle que des citoyens appartenant en majorité à la nouvelle génération ont réussi, en 2005, à en libérer le Pays du Cèdre. Encore, une fois, à quel prix!
Aujourd’hui, le pays n’est toujours pas indépendant. Son sort dépend, non seulement des conflits ou des règlements régionaux, mais beaucoup plus de l’hégémonie des armes et de la turbulence de son environnement. Comment s’en sortira-t-on et sous quelle tutelle décidée de l’étranger? Tous les espoirs, s’il y en a encore, se tournent vers le Premier ministre désigné et le président de la République. Former un gouvernement tient de la magie. Encore une fois, nous sommes mis au pied du mur devant la seule alternative: accepter un gouvernement d’union nationale ou le vide constitutionnel. Mais nous ne pouvons pas avoir la mémoire aussi courte pour ne pas tirer les leçons de ce qu’au Liban signifie «l’union nationale», sinon une paralysie de la gestion du pays due aux conflits opposant les principales composantes directrices. Va-t-on une fois de plus plier sous la dictature des armes? Peut-on faire autrement sans risquer le vide à tous les niveaux de la République? Sommes-nous condamnés à accepter un tuteur après l’autre? 2014 sera-t-elle celle du changement, du redressement et de la prise de conscience de nos capacités et de nos compétences qui réussissent à travers le monde? Est-ce une utopie, un rêve ou un sursaut national?

Mouna Béchara

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