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Nº 2946 du vendredi 25 avril 2014

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Malgré les crises régionales. L’exportation du savoir-faire continue

Les banques libanaises, bien que quelque peu fragilisées par la situation en Syrie, consolident et poursuivent leur expansion à l’international, notamment en Irak.
 

Victimes d’une activité ralentie sur le territoire syrien, avec un conflit qui s’enlise et paralyse les investissements, les banques libanaises lorgnent depuis quelque temps un autre front voisin, l’Irak. La présence de banques libanaises sur le territoire irakien n’est pas nouvelle, elle remonte à plusieurs années maintenant. Jusqu’à il y a peu, l’Irak comptait ainsi six banques originaires du Pays du Cèdre: le Crédit libanais, la Byblos Bank, la Banque Libano-Française, la BankMed, l’IBL Bank et la BBAC. A celles-ci s’ajoutent désormais la Fransabank et la Blom Bank qui ont décidé de s’implanter dans ce pays au fort potentiel.
L’Irak constitue en effet un marché intéressant à plus d’un titre. Sa population est jeune, les richesses du pays sont prometteuses, tout comme les perspectives de reconstruction. En outre, l’Irak est un marché sous-bancarisé, dans lequel les banques libanaises peuvent, chacune à sa manière, trouver leur place et gagner leur part du gâteau. A cela s’ajoute une forte présence d’entrepreneurs libanais qui n’ont pas hésité, il y a quelques années déjà, à tenter leur chance dans ce nouvel eldorado, qui demeure cependant difficile.
Le président de l’Association des banques libanaises (ABL), Makram Sader, évoquait dans son éditorial du mois de février dernier, la présence des établissements libanais en Irak. «Les banques libanaises apportent un appui certain à l’économie de l’Irak au même titre que la diversification des risques du secteur bancaire libanais et du rendement des investissements y afférents», estime-t-il. «Cette politique engage les banques libanaises à offrir les facilités de crédit aux individus, ménages et entreprises irakiennes selon les dispositions en vigueur au Liban, dont les cartes de crédit aux individus, les crédits documentaires et lettres de garantie visant à financer le commerce des importateurs irakiens. Les autorités monétaires et de contrôle irakiennes œuvrent actuellement à compléter le cadre organisationnel qui permet aux banques opérantes en Irak, y compris les institutions bancaires libanaises, de développer les services bancaires modernes sur le marché irakien», ajoutait encore Makram Sader. L’Irak est un marché au potentiel énorme où les banques pourront déployer tout leur professionnalisme et leur expérience.
Bien qu’étant un marché compliqué et encore instable, du fait de la situation sécuritaire et politique, l’Irak rejoint ainsi les quelque trente pays qui comptent des implantations de banques libanaises. Car aujourd’hui, ce ne sont pas moins de seize banques, représentant 86% de l’activité bancaire au Liban, qui ont pu se développer à l’étranger. La Syrie bien sûr, mais aussi la Jordanie, l’Egypte, le Soudan, l’Algérie, l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis, Bahreïn, Qatar et Oman, pour la sphère arabe, mais aussi la Turquie, comptent des implantations libanaises, sous une forme ou une autre (voir encadré). Autre terrain d’exploration au potentiel futur certain, le continent africain, que certaines banques ont commencé à défricher, en s’installant, par des bureaux de représentation, au Nigeria, ou par des agences en Afrique de l’Ouest, ou encore en République démocratique du Congo.
L’Europe aussi constitue un cœur de cible, avec des installations en Suisse ou en France, parmi les plus anciennes, ou encore au Royaume-Uni, en Allemagne, au Luxembourg, ainsi qu’en Belgique, en Roumanie, en Biélorussie, en Arménie ainsi qu’à Chypre.

 

Chypre, la porte de l’Europe
Le voisin chypriote constitue un élément essentiel, malgré l’étroitesse de son marché, pour les établissements libanais. Car Chypre représente une des portes sur l’Europe, d’où un intérêt évident.
Ce développement à l’international, bien que risqué selon les pays choisis, s’avère essentiel pour les banques libanaises. La plupart sont désireuses de suivre leur clientèle du Liban dans ses investissements à l’étranger. Mais aussi, de cibler la diaspora présente sur les différents continents, qui réussit dans les affaires. Le président de l’ABL, Makram Sader, souligne aussi dans son éditorial, que ce «déploiement à l’étranger (est) nécessaire et évident vu la saturation du marché libanais et son exposition permanente aux pressions politiques et sécuritaires». Et ce, même si ces implantations comportent leur lot de risques de par leur nature, leur volume, etc. Aujourd’hui, le volume d’activité des seize banques présentes à l’international a atteint 17% du total de leurs actifs consolidés.
Le défi, désormais, reste de parvenir à maintenir un «déploiement en adéquation avec les niveaux de capitalisation, le business model, la gouvernance et le management requis par les marchés extérieurs», indiquait encore Sader.

 

Le cas syrien
Si elles consolident leur présence à l’étranger, les banques libanaises doivent aussi gérer la situation de leurs filiales établies en Syrie. Pas si facile, car outre l’arrêt total des investissements de la clientèle, les banques doivent aussi faire face aux destructions et à la sécurité de leurs agences, de leur personnel et de leur clientèle et être vigilantes par rapport aux sanctions internationales sur certains avoirs syriens. Rappelons que pas moins de sept banques libanaises détiennent des filiales en Syrie. La Banque Libano-Française y est présente via la Bank al-Sharq, dont elle détient 49%. La Fransabank est actionnaire à hauteur de 55,67% de Fransabank Syria. La Byblos Bank Syria est détenue à 52,37% par la maison mère Byblos Bank, tandis que la Bank Audi possède 47% de Bank Audi Syria. Enfin, la Blom Bank est actionnaire à 49% de la Bank of Syria & Overseas, et la Bank Bemo, à 22% de la Bemo Saudi Fransi.
Pour se protéger de possibles répercussions sur leurs activités, les banques libanaises, impliquées dans le tissu bancaire syrien, ont dès le début du conflit, réduit leur exposition aux acteurs économiques syriens. Malgré ces précautions, l’impact est tout de même important. Les bilans des banques concernées ont affiché des chiffres en berne, au mieux une contraction, depuis 2012, subissant également l’impact de la dévaluation de la livre syrienne. 

Jenny Saleh
 

Implantations multiformes
Les  implantations des banques libanaises peuvent prendre différentes formes, selon le marché et, surtout, selon les possibilités légales du pays ciblé. La préparation d’une implantation peut prendre des années, pour aboutir, selon les cas, au lancement d’une succursale, d’une filiale ou d’un bureau de représentation. Une succursale n’a pas de personnalité morale, donc elle n’est qu’un simple établissement de l’entreprise.
La filiale, en revanche, dispose d’une personnalité juridique. Elle dispose d’un patrimoine propre qui ne se confond pas avec celui de la banque mère. Par ailleurs, la filiale doit se conformer à la législation bancaire locale. La plupart du temps, les banques libanaises s’associent avec une banque locale, en rachetant une partie de son actionnariat. Le bureau de représentation, lui, est davantage destiné à mettre en relation des opportunités d’affaires. Les banques choisissent notamment cette option quand le pays où elles s’installent est déjà fortement bancarisé. Des équipes peuvent effectuer des va-et-vient fréquents afin de répondre aux demandes de la clientèle, qui possède souvent des comptes sur le territoire libanais. Une fois sur place, les banques peuvent fournir des services à l’étranger depuis le Liban, via des lettres de crédit par exemple. Selon le marché et le taux de bancarisation, certaines se lancent également dans la banque de détail, en tenant compte, à chaque fois, des attentes et des caractéristiques du marché.

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