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Nº 2977 du vendredi 28 novembre 2014

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Les deux imams d’Amine Issa. Le Coran contre l’obscurantisme

Amine Issa a signé, aux éditions an-Nahar, son livre Les deux imams, le Coran contre l’obscurantisme. Un sujet d’actualité, un cri d’espoir.

«Comprendre l’esprit du Coran pour comprendre les versets», telle est la tâche à laquelle s’attelle Amine Issa, via la voix d’un de ses imams, le cheikh Abdel-Karim qui tente de convaincre son interlocuteur, le cheikh Rachid, de ne pas en «isoler chaque verset et en faire un absolu». Les deux imams, le Coran contre l’obscurantisme est, comme le présente l’auteur dans la préface, «un dialogue imaginé entre deux imams», dans lequel il emmêle à ses propres idées celles d’autres, puisées d’une riche documentation d’ouvrages didactiques et d’articles.
Le Coran contre l’obscurantisme: par le sous-titre même de son ouvrage, Amine Issa donne le ton. Plaidoyer contre les idées reçues, les idées dogmatisées, érigées en principe immuable, l’ouvrage cherche à démontrer que l’islam n’est pas réductible à son image actuelle faite de violence, d’obscurantisme et d’immobilisme, que le salafisme n’est pas justifiable par le Coran. Du voleur auquel on coupe la main, aux droits des femmes, au droit d’épouser quatre femmes… Amine Issa établit une claire distinction entre la décision du croyant d’accueillir les versets soit comme un ordre, soit comme une recommandation, une direction à suivre. «Encore une fois, répète le cheikh Abdel-Karim à son collègue le cheikh Rachid, moi je cherche une direction, une voie qu’il m’a tracée pour faire le bien, et toi tu ne vois que les interdits».
Cette distinction revient tout au long du livre, et c’est sur elle que se base l’essence même de ce dialogue, renforçant encore plus la différence flagrante entre les deux imams, que l’auteur a choisi de mettre en situation en France, le deuxième s’y étant rendu pour succéder au premier à la tête de la communauté de B…
 

Une voie à suivre
Pour ceux qui connaissent déjà les livres antérieurs d’Amine Issa, que ce soit le roman L’Imposteur, publié aux éditions L’Harmattan, ou le livre de photos et de textes, Iran, Ouzbékistan, Egypte, Turquie… et autrement, publié aux éditions Tamyras, pour les amoureux du plaisir du texte et du choc étincelant des mots, ce présent ouvrage peut paraître de prime abord comme revêtant une matière revêche, froide, scientifique presque. Mais Amine Issa surprend toujours le lecteur. Si le dialogue basé sur un échange d’arguments est le point vital du livre, il n’en reste pas moins que les textes qui se glissent entre une discussion et une autre sont eux aussi d’une importance capitale. Ils montrent le mode de vie des deux imams, leur application pratique du Coran dans le quotidien, dans l’approche à l’autre, dans la vie tout simplement.
Ouvrage à double facette, qui s’adresse tout autant à ceux qui croisent immanquablement, peut-être moins dans cette partie du monde, ou peut-être davantage, l’islam et l’intégrisme, qu’à ceux qui établissent clairement une distinction nette entre la religion et son application ou sa mauvaise application, son interprétation figée. Et c’est pour cette raison qu’il n’est pas facile, qu’il n’est pas confortable d’aborder cet ouvrage. Un livre qui se lit de bout en bout, tout d’abord dans le secret d’une lecture solitaire, avant d’être échangé de main en main, de plus en plus échangé, autant que possible parcouru, lu, relu, consulté sur telle ou telle question, tel verset et ses différents «tafsir», dans l’espoir que ce dialogue imaginé, mais non imaginaire, puisse se transposer dans la réalité. Pour que les tabous tombent et que la religion, toutes les religions, deviennent des débats de plus en plus ouverts, en ces temps obscurs d’intégrisme aveugle, où on ne cesse de tuer au nom de Dieu. Et c’est dans ce sens-là que retentit le cri final lancé par Amine Issa, parce que, progressivement, au fil de la lecture, les arguments, même s’ils restent comme tels, se ressentent comme de véritables cris du cœur, des appels au secours, à revoir le Coran encore et encore. Le Coran qui s’impose comme l’ultime recours évidemment, mais aussi et surtout comme l’ultime secours de l’islam. «… Aujourd’hui, j’ai rendu votre religion parfaite; j’ai parachevé ma grâce sur vous. J’agrée l’islam comme votre religion… Dieu est celui qui pardonne, Il est miséricordieux…». Un cri d’espoir ou de désespoir?

Nayla Rached

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