La 11e édition du festival de danse Bipod est lancée. Prévue du 11 au 26 avril dans plusieurs théâtres de la ville, elle est marquée par des performances intimes, mais une absence de productions arabes faute de soutien financier.
C’est le début d’une nouvelle décennie pour Bipod, le festival de danse contemporaine qui lance cette année sa 11e édition, du 11 au 26 avril. Une nouvelle saison qui marque un tournant puisque la direction artistique du festival est passée de Omar Rajeh à Mia Habis, le fondateur de Maqamat ayant décidé de se consacrer à nouveau à sa passion première, la chorégraphie, sans oublier la direction du nouvel espace Maqamat Beit el-raqs au Chouf.
Pour son premier rendez-vous, Mia Habis a évoqué une nouvelle vision, à la conférence de presse du lancement du festival qui a eu lieu le 30 mars, dans les nouveaux locaux de Maqamat. Le principal défi auquel elle a fait face, comme elle l’explique, consistait à se poser cette question: que peut encore faire Bipod? Pour cela, il lui a fallu d’abord délimiter l’apport de cette plateforme au bout de dix ans d’existence. Il s’agit d’un festival qui rassemble les gens, qui s’adresse à tout le monde; un festival consacré à Beyrouth, aux Libanais, danseurs, professionnels, amateurs ou simples citoyens habités par un esprit de curiosité et la recherche de nouvelles idées. Certes, ajoute-t-elle, Bipod est un festival national, mais qui s’intéresse également à présenter au public libanais des artistes et des spectacles du monde arabe. En espérant que cela continuera dans les années à venir, Habis déplore, pour cette 11e édition, le manque d’appui et de soutien, faute de financement, qui ne lui a pas permis d’inviter trois spectacles du monde arabe, contrairement aux invités occidentaux soutenus par les instituts et ambassades au Liban de leurs pays respectifs. Un appel presque urgent qu’elle lance face à cette triste réalité. Mais malgré tout, le monde arabe est toujours présent à travers la 4e édition de Moultaka Leymoun. Sans oublier les trois ateliers de travail prévus pour cette année, avec la compagnie 7273, avec Leila McMillan et Aakash Odedra.
Bipod débute le 11 avril, avec la performance Tarab, précédée, comme de coutume, par l’inauguration de l’exposition habituelle du festival, à 18h, au théâtre al-Madina. Pour cette 11e édition, place à Relief/Expansion, de Julien Maire, artiste nouveaux médias résidant à Bruxelles, qui recherche constamment dans son travail à réinventer la technologie des médias visuels. Du 11 au 26 avril donc, dans plusieurs théâtres de la ville, Bipod accueillera des performances venues de France, Allemagne, Belgique, Suisse, Hongrie, Royaume-Uni, Espagne… Des performances essentiellement ancrées autour de la rencontre et de l’intimité; une sorte de voyeurisme, pour voir la scène à travers le trou de la serrure, comme si le public était convié à un spectacle créé précisément pour qu’il n’en soit pas témoin. Mais témoin il le sera.
Tarab (Suisse)
La recherche chorégraphique des fondateurs de la compagnie 7273, créée en 2003, se base autour d’un style de danse multiple appelé FuittFuitt. Tarab, comme son nom le suggère, est une cérémonie soufie animée d’une touche «groovy», où le mouvement se décline en un flot interrompu, sans répétition. Onze danseurs et un tableau où éclate le désire de l’infini.
Samedi 11 avril, 19h – Théâtre al-Madina
ReVolt (Belgique)
Présentée en première internationale dans le cadre de Bipod, la dernière création de la compagnie Thor fait écho aux mouvements de protestation citoyens, surtout ceux menés par les femmes. Thierry Smits met ainsi en scène une seule danseuse, Nicola Leahey, au cœur d’une chorégraphie autour de l’insubordination et la nécessité de se révolter.
Dimanche 12 avril, 20h30, Théâtre Béryte
This is concrete (Allemagne)
Fruit d’une collaboration entre les chorégraphes et danseurs Jefta van Dinther et Thiago Granato, This is concrete est une lente virée. Deux hommes dont les corps s’entremêlent sans cesse l’un à l’autre, diluant les frontières, dans un environnement sonique composé de sons vertigineux et d’ombres tournoyantes où les mouvements deviennent mots. Fusion corporelle et sociale, leur virée glisse au cœur du plaisir, de l’intime, de l’éthéré comme éléments de composition. Entrée dans un monde incertain et contagieusement lent.
Mercredi 15 avril, 20h30 – Théâtre Béryte
Rising (Royaume-Uni)
Spécialiste dans les styles de danse classique indienne, que sont le «Kathak» et le «BharatNatyam», Aakash Odedra présente Rising, la première production à succès de sa compagnie. Rising comprend quatre solos sur des chorégraphies de Russell Maliphant, Sidi Larbi Cherkaoui, Akram Khan et Aakash lui-même. Entre la danse classique indienne et la danse contemporaine, l’innovation.
Vendredi 17 et Samedi 18 avril, 20h30 – Théâtre al-Madina
Gerro, Minos and Him (Suède)
Trio ludique, amusant et même drôle, fait rare dans le domaine de la danse, Gerro, Minos and Him est le fruit de la collaboration entre les chorégraphes et danseurs Aloun Marchal, Simon Tanguy et Roger Sala Reyner. Leur manière de travailler se base sur les conflits lors de la prise de décision, et sur la dynamique créée par le fait de dire oui à toutes propositions; ils l’appellent «anarchie-démocratie». La performance tourne autour de trois hommes dans une chambre vide qui, en utilisant juste leur imagination, leurs propres corps, ceux de leurs partenaires et du public, parviennent à s’extraire de l’espace du théâtre pour façonner des espaces fictionnels.
Dimanche 19 avril, 20h30 – Théâtre al-Madina
Ode to the attempt (Belgique)
et Does it start with a kiss? (Hongrie)
n Ode to the attempt: en une trentaine de minutes, le chorégraphe belge Jan Martens présente son nouveau solo créé pour lui-même. Il y interroge son processus créatif, son mode de vie. Construction, déconstruction, humour et mélancolie, seul, il invite le public à pénétrer dans sa tête et son ordinateur.
n Does it start with a kiss?: de la compagnie de danse Eva Duda, les chorégraphes et danseurs Rosana Hribar et Gregor Luštek se penchent sur cet adage: un pour tous, tous pour un. Comment ce principe se déplie-t-il dans la réalité et se transforme-t-il en une chorégraphie? Et leurs mouvements ressemblent à l’intimité passionnelle du tango, avec un brin d’humour.
Mercredi 22 avril, 20h30 – Théâtre Montaigne – Deux spectacles en une soirée
Sweat baby sweat (Belgique/Pays-Bas)
Le travail de Jan Martens explore la possibilité d’une symbiose entre le conte et le concept, recyclant des idiomes existant dans un autre contexte pour faire naître de nouvelles idées, loin de la complexité chorégraphique et de la virtuosité physique. Cette création, à la fois poétique, naïve, sensuelle, tendre et douloureuse, tourne autour de l’amour, de la force d’un amour entre deux personnes qui ne peuvent ou ne veulent pas se séparer. Une performance d’une heure au cours de laquelle toute une vie passe.
Jeudi 23 avril, à 20h30 – Théâtre Béryte
Exuvie (France)
Le processus créatif, Sine Qua non art, est le résultat des efforts joints des chorégraphes Christophe Béranger et Jonathan Pranlas-Descours, autour d’une manière particulière d’écrire la scène. Avec eux, le corps est l’objet et le sujet d’une expérience sensorielle. L’exuvie qui, dans le langage scientifique, caractérise le phénomène de mue chez les vertébrés, est le point de départ de cette création en duo aux limites de la performance. Tout débute dans un bain de cire chaude, une substance liquide et translucide qui, peu à peu, devient physique, vivante, animale.
Samedi 25 avril, à 20h30 – Théâtre al-Madina
Flightless (Espagne)
Danseur, chorégraphe, photographe et artiste visuel, Elías Aguirre a commencé, dès 2008, à créer son propre chemin chorégraphique avec une touche bien particulière: danse contemporaine, technique de danse urbaine et une inspiration puisée de la nature, plus particulièrement des insectes. Dans cette création, l’absurde, les gestes et la danse convergent afin de libérer l’imagination d’un personnage conçu autour du concept de l’oiseau qui ne peut voler. Le monde onirique qu’il construit réoriente ses instincts les plus primaires vers de nouvelles manières de réinventer la nature.
Dimanche 26 avril, à 20h30 – Théâtre al-Madina
Nayla Rached
www.maqamat.org
Billets en vente à la Librairie Antoine et en ligne.
Moultaka Leymoun
Créée il y a quatre ans, Moultaka Leymoun est une plateforme destinée à promouvoir le travail des jeunes talents arabes afin de leur permettre d’aller à la rencontre du public et de se faire connaître auprès des producteurs et professionnels de la danse internationale. Trois éditions déjà au compteur, auréolées de succès. Pourtant cette année, comme l’a vivement regretté Mia Habis, faute de soutien financier, le public libanais n’aura pas l’occasion d’assister à aucune production du monde arabe. Toutefois, pour cette 4e édition de Moultaka Leymoun, qui se tiendra le lundi 13 et mardi 14 avril à Beit el-raqs au Chouf, dix talents émergents, danseurs et chorégraphes, de plusieurs pays arabes auront l’occasion de se rencontrer, de discuter, de travailler ensemble, de participer à des ateliers de travail… dans l’espoir…