Le dimanche 26 avril, Achrafieh 2020 (Association visant à améliorer la qualité de vie des habitants) a pris part à la commémoration du Centenaire du génocide arménien en organisant, en collaboration avec le magazine Audio Kultur, une Journée piétonne, mettant ainsi en avant la culture arménienne.
«Nous avons fait coïncider la Journée piétonne de ce mois avec une date douloureuse pour les Arméniens, le 26 avril 1915 étant le jour où de nombreux savants et intellectuels arméniens ont été massacrés», affirme Carole Babikian Kokoni, présidente de l’association Achrafieh 2020. «Nous avons, pour cela, fait appel à des artistes libanais d’origine arménienne pour organiser la Journée piétonne. Un geste de la part d’Achrafieh 2020», atteste la présidente de l’association.
Carole Babikian Kokoni explique que, comme chaque événement majeur, le génocide arménien, qui a commencé bien avant la date du 24 avril 1915, revient à la mémoire de tous en cette date. «De commémorer la tentative d’exterminer tout un peuple n’est que chose naturelle, c’est une façon, non seulement de revendiquer nos droits en tant que peuple, mais aussi une façon d’honorer la mémoire de tous ceux et celles qui sont morts sans sépulture», assure-t-elle. La communauté arménienne de Turquie a tenu à organiser un concert à Istanbul même, ce 22 avril 2015, et des artistes d’origine arménienne du monde, notamment du Liban, y ont pris part. Donnons l’exemple d’Eileen Khatchadourian, artiste libanaise d’origine arménienne, avec son nouvel album Titernig, paru le 17 avril à Beyrouth. Pendant des années, l’Asala (Armée secrète arménienne pour la libération de l’Arménie) a pris en charge de défendre le droit des Arméniens en exécutant responsables et autres complices. «Mais dès qu’ils l’ont pu, les Arméniens se sont mis un point d’honneur de défendre leur cause à travers l’art sous toutes ses formes: musique, chants, poèmes, peintures et photos, l’art étant l’expression la plus élevée de l’Homme», insiste Kokoni.
«Il y va de la responsabilité et du rôle des grandes puissances de ce monde de forcer la main à la Turquie, afin qu’elle reconnaisse le tort qu’elle a causé au peuple arménien», martèle la présidente de l’association. Rien, selon elle, ne permet de comprendre ce qui s’est passé et aucune raison ne peut expliquer un génocide. Cette réponse est autant valable pour la question arménienne que pour les exterminations de peuples et de minorités qui ont lieu de nos jours et devant lesquelles le monde reste impuissant. «Il faut reconnaître que la sauvagerie humaine est de plus en plus difficile à contrôler que ce soit par un Etat lui-même concerné ou par la communauté internationale», poursuit Kokoni.
Carole Babikian Kokoni estime que l’horreur a été indicible au sens propre du terme et donc difficile à raconter. En effet, les Arméniens qui ont vraiment raconté au public le génocide sont pour la plupart des descendants de rescapés qui s’étaient contentés de raconter leur périple de vive voix à leurs proches uniquement et qui luttaient déjà rien que pour survivre. «Les Arméniens étaient dispersés partout dans le monde, entre les Etats-Unis, l’Europe et le Moyen-Orient. Il leur a fallu du temps pour entrer en contact les uns avec les autres et reprendre le flambeau que la Turquie a essayé, en vain, d’éteindre», avance la présidente d’Achrafieh 2020. C’est à partir du moment où les Arméniens ont pu communiquer entre eux qu’ils se sont renforcés, «aidés» surtout par les progrès du monde moderne qui ont permis une plus grande médiatisation de leur cause. «C’est la reprise d’une rage d’exterminer des minorités dans le monde qui pousse les peuples à revoir leur Histoire, et qui fait que les pays commencent à reconnaître de plus en plus ce moment sombre de l’humanité», conclut Kokoni.
Natasha Metni
Flânerie dans la rue d’Arménie
Des centaines de Libanais se sont retrouvés à Mar Mikhaël pour signer le Mur de la mémoire, déclarer qu’ils n’oublieront pas «l’horreur perpétrée par les Turcs» et commémorer le génocide arménien. Au programme de la journée piétonne dans la rue d’Arménie: de l’art (peinture, photo, danse, musique), de l’animation, de la restauration (pour tous les goûts et tous les budgets), une sensibilisation à la cause sociale et humaine des Arméniens (à travers les stands de diverses organisations).