Remportant 87,3% des suffrages, Samy Gemayel a été élu à la tête du parti Kataëb à l’âge de 34 ans, succédant ainsi au président Amine Gemayel. «Mes responsabilités sont très grandes et je serai fidèle à tous les sacrifices consentis. Je déploierai tous les efforts pour que les gens honnêtes restent au Liban», affirme-t-il aussitôt les résultats annoncés.
«Je travaillerai 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 et 365 jours par an, a clamé avec ferveur et détermination Samy Gemayel. Je demande d’ores et déjà aux épouses des Kataëb de m’excuser parce que leurs maris dormiront rarement à la maison et passeront la majorité de leur temps au parti».
Le député Samy Gemayel remporte les élections du parti Kataëb avec 339 voix. Elu pour un mandat de quatre ans, il est ovationné aussitôt les résultats proclamés. 388 électeurs des 400 ont voté. Absents: le ministre Sejaan Azzi pour des raisons familiales, son oncle était décédé la veille, et Walid Farès, responsable de la diaspora et absent du Liban. 397 délégués élus par près de 7 000 adhérents au parti avaient été invités à élire un bureau politique de 16 cadres. Une certaine tension était ressentie d’autant plus que pour certains sièges, la bataille était serrée. Un quota de 20% pour les femmes a été adopté, comme l’avait proclamé Samy Gemayel dans l’annonce de son programme. Joseph Abou Khalil remporte le poste de premier vice-président face à Tannous Cordahi qui s’est retiré de la course. L’ancien ministre Salim Sayegh est élu deuxième vice-président, face à Sassine Sassine, il l’était déjà sous le mandat d’Amine Gemayel.
Le parti avait tenu, dès vendredi, les travaux de son 30e congrès général à l’hôtel Royal à Dbayé. Dimanche dernier, dès le matin, une effervescence inhabituelle animait les parages de la maison des Kataëb à Saïfi, siège central du parti où les élections se sont déroulées. Des voitures regorgeant de partisans sillonnaient les ruelles, brandissant les drapeaux du parti aux rythmes de chansons partisanes et de l’hymne des Kataëb. Des banderoles acclamaient le jeune député en reprenant les slogans du parti. Des portraits de Samy Gemayel étaient accrochés un peu partout. Le visage du candidat à la présidence du parti reflète la joie. Il est porté sur les épaules de ses partisans qui l’acclament haut et fort, exprimant leur fierté de le voir accéder à la tête du parti.
C’est avec beaucoup d’émotion que le jeune élu rend hommage à son père Amine Gemayel: «Ce grand homme qui a ouvert la porte à tous les Kataëb, leur permettant de mener cette bataille électorale démocratique». Il salue également la mémoire des martyrs tombés pour que le Liban continue à exister, «les jeunes filles et les jeunes gens qui ont accédé au paradis» et promet de leur rendre visite dans les cimetières «parce que c’est d’eux que nous tirons notre force».
Selon les partisans du parti, cette journée est victorieuse du fait que Samy Gemayel a été élu de façon démocratique par de véritables élections. Si certains ont fait part de leurs craintes de le voir bousculer les choses, la plupart se sont réjouis de son élection, assurant que c’est un jeune homme qui a une expérience de la politique et qui a consacré chaque minute de son temps à la défense de son pays. Il mérite donc d’accéder à ce titre qui lui permettra de canaliser ses efforts dans le cadre d’un parti organisé avec une infrastructure parfaitement structurée. Les partisans ont fait part de leur satisfaction de voir Joseph Abou Khalil et Salim Sayegh élus, les deux hommes alliant à leurs yeux tradition et sagesse d’un côté, modernité et ouverture d’un autre.
En réponse à ses détracteurs qui ont essayé de semer la zizanie en présentant des recours en invalidation, Samy Gemayel a assuré: «Ces hommes sont des résidus de l’ère syrienne, alors que le parti était sous tutelle». Rappelons que deux jours avant que Samy Gemayel ne présente sa candidature et son programme politique, l’ancien responsable Kataëb de la région d’Achrafié, Michel Jabbour, et un autre ancien du parti, Youssef Tannous, qui vit désormais en Suède, ont présenté un recours en invalidation sous prétexte que la candidature du député du Metn est illégale parce qu’en formant, il y a quelques années, le mouvement Loubnanouna, en 2005 précisément, il n’a pas respecté le règlement interne du parti et ne s’est affilié au Kataëb qu’en 2008, alors que le règlement stipule qu’il faut être membre du parti depuis 15 ans pour avoir le droit de se présenter à la présidence. Issa Nahas, ancien membre Kataëb, avait également eu recours à la justice pour essayer d’annuler la candidature du député du Metn. Les trois hommes n’ont pas été pris au sérieux. Ils sont connus pour avoir activement collaboré avec les services syriens du temps de leur hégémonie sur le Liban.
Démocratie et liberté
Dans son allocution, le président Amine Gemayel a affirmé que, depuis sa formation, le parti a tenu à adresser un message de démocratie et de liberté. «Nous souhaitons, dit-il, que ce message et cette expérience démocratique constituent un exemple et que l’élection d’un président de la République se passe dans les plus brefs délais, parce que cette élection est susceptible de préserver la stabilité. Les députés doivent tirer des conclusions de nos élections et comprendre qu’ils commettent un crime à l’égard du pays», assurant au passage qu’il ne compte pas se lancer dans la bataille présidentielle.
Danièle Gergès
39 voix pour Pierre Atallah
Le journaliste Pierre Atallah, qui s’est présenté contre Samy Gemayel, a obtenu 39 voix. Il a déclaré avoir présenté sa candidature pour encourager les gens à aller voter. «Le processus électoral est une notion très importante, affirme-t-il. Ce processus doit être suivi dans les élections municipales et parlementaires. Ces élections sont un honneur pour le parti, considéré «âgé» par certains, mais qui a démontré, à travers ces élections, que son exemple est à suivre», ajoutant par ailleurs: «Si le choix s’est porté sur Samy Gemayel, c’est que les électeurs sont attachés aux figures traditionnelles et aux familles politiques». Il a déclaré que les Gemayel ont consenti beaucoup de sacrifices et que leurs partisans leur sont fidèles et loyaux. «Je me tiendrai toujours à la disposition du parti et répondrai présent s’il a besoin de moi», conclut-il. Pour sa part, Samy Gemayel a dit: «J’ai eu l’honneur, en tant que militant, de concurrencer une personnalité telle que celle de Pierre Atallah qui a un riche passé dans la lutte et la résistance».