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Nº 3011 du vendredi 24 juillet 2015

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Les rebelles ne sont pas prêts. La grande bataille d’Alep n’aura pas lieu

Un mois après l’annonce faite par les rebelles d’une offensive majeure à Alep, bastion économique de la Syrie avant la guerre civile, l’évolution de la situation militaire de la ville la plus peuplée de Syrie reste dépendante d’une consolidation des diverses milices et des réalités inhérentes à cette province, témoin des rivalités entre régime, Etat islamique et rebelles.

La grande bataille d’Alep n’aura pas lieu. Tout du moins pas pour le moment. Alors que les forces gouvernementales perdent progressivement des territoires dans le nord-ouest, l’est ou le sud du pays, la situation à Alep, grande mégalopole syrienne, reste tributaire d’une convergence de multiples facteurs politiques, géographiques et sociaux.
Le contrôle de la ville, prioritaire pour le régime du président Bachar el-Assad, devient de plus en plus difficile à maintenir. En effet, une fois tombée, Alep enfermerait le régime syrien dans une poche de territoires situés du nord de Damas à la côte méditerranéenne, berceau des alaouites, une communauté dont le président syrien est issu. Ce serait le présage d’une éventuelle partition du pays, une possibilité contre laquelle le régime résiste toujours, mais pourtant envisagée comme plan B par ses alliés iraniens, selon le journaliste expert du Hezbollah, Nicholas Blanford.
Les rebelles se sont progressivement emparés de plusieurs zones dans la ville, ainsi que dans le nord. Au début du mois, ils ont fait main basse sur le secteur du Bouhouth el-Ilmiya (Centre scientifique), une position militaire importante. L’opposition contrôle aujourd’hui plus de 60% de cette ville plusieurs fois millénaire. Selon les combattants rencontrés par Magazine à Reyhanli, bourgade turque située à la frontière de la Syrie, à proximité d’Alep, la ville est actuellement divisée en deux parties, les groupes rebelles étant ancrés dans une sorte de poche entourée sur deux côtés par les troupes fidèles au président Assad.
Les combats se poursuivent, selon le lieutenant Hassan Khalil, du groupe Soukour el-Jabal, avec en toile de fond, les bombardements à coups de barils explosifs. «Les quartiers les plus sûrs se trouvent ironiquement sur  les lignes de démarcation», signale le colonel Abdel-Jabar Okaidy de l’Armée syrienne libre. «Les tirs de barils explosifs sont très imprécis, ce qui explique le fait que le régime évite autant que possible de les larguer dans les quartiers limitrophes aux régions sous son contrôle», ajoute-t-il en souriant.
Depuis fin mars, les forces loyales au régime ont subi des revers importants, non loin d’Alep dans la province d’Idlib, où une alliance islamiste incluant le Front al-Nosra, la branche syrienne d’al-Qaïda, a conquis la quasi-totalité du secteur nord.
Cette poussée rebelle est cependant plus difficile à concrétiser dans la ville d’Alep pour diverses raisons. D’une part, il s’agit d’une ville d’une très grande superficie habitée avant la guerre par plusieurs millions d’habitants. D’autre part, les milices rebelles restent divisées malgré le regroupement de la plupart d’entre elles sous la bannière de Fateh Halab, un quartier général commun regroupant plus d’une quinzaine de bataillons. Cette chambre d’opérations militaires comprend ainsi des groupes divers dont le mouvement de Noureddine Zanki, les brigades Safwa, Faylaq el-Cham, Fastaqim Kama Umirt et Fursan el-Haq, les Soukour el-Jabal et le Bataillon 16 parmi beaucoup d’autres. Certains de ces groupes sont affiliés au quartier général turc Mom et bénéficient d’un plus grand soutien logistique et militaire, ainsi que de fournitures en armes, selon une source appartenant à la brigade Noureddine Zanki.
Cependant, cette coalition n’inclut pas les factions les plus radicales, notamment les mouvances salafistes-jihadistes, comme le Front el-Nosra, Jabhat Ansareddine et la Brigade Abou Amara, selon la source. Deux groupes de l’Armée syrienne libre, à savoir le premier bataillon, et Ansar Sultan Murad devaient rejoindre la coalition de Ansar el-charia, non pas pour des raisons idéologiques mais tactiques, leur zone d’activité se trouvant dans le secteur de la chambre d’opération des mouvances salafistes, explique la source.
 

Guerre d’usure
Les forces rebelles sont fortes de près de 28 000 combattants qui tentent, tant bien que mal, de coordonner leurs efforts.
En effet, selon les combattants interrogés par Magazine, bien que la plupart des factions affiliées à Fateh Halab et Ansar el-charia coopèrent lors des combats, de nombreux obstacles compliquent le processus de consolidation. «Certains groupes favorisent une gestion civile de la ville d’Alep, à laquelle les groupes radicaux, tel que le Front al-Nosra, sont tout à fait opposés», met en exergue la source.
Les divers groupes ont également des approches différentes en ce qui concerne la meilleure stratégie à suivre contre le régime. Selon Khalil, de nouvelles opérations militaires devraient cibler les positions du régime comme le Moukhabarat Jawiya (les services de renseignements de l’armée de l’air) et de l’Académie militaire, qui sont utilisées comme rampes de lancement contre des zones rebelles. «La chute de ces positions pourrait libérer de grands quartiers habités par des civils», explique Khalil. Le Front al-Nosra, lui, préfère se focaliser sur les zones civiles, alors que d’autres groupes tels que le Noureddine Zanki estiment que la priorité serait de couper les lignes d’approvisionnement du régime, comme la route Salamiyah menant à Alep, ainsi que la zone de Sfira où sont situés des hangars à munitions.
Ces rivalités sous-jacentes se sont d’ailleurs traduites cette semaine par l’assassinat d’un commandant de la Division 111 par des hommes armés après sa sortie du Q.G. Ces différents facteurs semblent condamner Alep, pour le moment du moins, à une guerre d’usure qui se poursuit depuis le début de la révolution.

Mona Alami, Reyhanli (Turquie)

Multiples fronts
Un autre facteur déterminant dans la bataille d’Alep est la multiplicité des fronts, une ligne de démarcation de 60 kilomètres les séparant de l’Etat islamique (Isis), allant de la frontière turque à Alep. Cela exténue les rebelles qui doivent répartir leurs militants et leurs munitions sur ces deux lignes de combat.  

Dégradation sécuritaire
Selon le site alsouria.net, les raids du régime se sont intensifiés sur la ville de Manbej dans la campagne orientale d’Alep. Ces raids ont entraîné la mort de 26 personnes et blessé 75 autres. Plusieurs quartiers ont été pris pour cibles comme la Rue de la poste et l’immeuble du ministère des Finances. Une clinique et un bâtiment de l’université locale ont été également touchés.

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