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Nº 3011 du vendredi 24 juillet 2015

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HORIZONS

Oui, pour la chasse! Non, pour le viol de la nature! Un pas pour l’application de la loi 580

La chasse, une pratique ancienne née avec l’apparition du premier homme sur Terre, pour lui assurer survie et continuité. Et pourtant…
 

La loi n°580, réglementant la chasse au Liban et promulguée en 2004, est un exemple flagrant de la non-application des lois environnementales plusieurs années après leur publication. Malgré la proclamation de tous les décrets et de celui portant le n°11 987 du 24 mai 2014 relatif aux dangers que la pratique de la chasse pourrait causer à des tiers, on ne s’attend toujours pas à ce que le Conseil supérieur de la chasse recommande l’ouverture de la saison pour l’année 2015-2016, d’autant que ce conseil, nommé il y a plusieurs mois, n’a tenu sa première réunion que la semaine dernière, ce qui indique clairement que le dossier de la chasse n’est pas une priorité pour le ministère de l’Environnement.
Qui bénéficie de cette absence de réglementation au Liban? Pourquoi le ministère de l’Environnement pratique-t-il la politique de l’autruche? Quand arrivera le moment de vérité où les ministères de l’Environnement et de l’Intérieur admettront leur incapacité à appliquer la loi sur la chasse dans tout le pays? Seuls les trafiquants d’armes, de cartouches et de viande d’oiseaux sauvages en profitent, en l’absence de toute décision de la part de la police judiciaire d’accomplir sa mission et d’appliquer la loi sur la chasse sous prétexte que les conditions de sécurité au Liban ne sont pas favorables.
Assad Serhal, le directeur général de la Société pour la protection de la nature au Liban (SPNL), qui a représenté les associations environnementales au sein du Conseil supérieur de la chasse pendant plusieurs années, a déclaré que la SPNL, partenaire national de BirdLife International, avait trouvé la solution idéale pour appliquer la loi sur la chasse, en la limitant à des zones municipales spécifiques dans plusieurs régions du Liban. Ces zones doivent être clairement définies et surveillées par des gardiens pour permettre un accès sûr et contrôlé des chasseurs, la vérification du nombre des proies autorisées par la loi et la sanction des contrevenants.

 

La chasse responsable
Serhal est optimiste à ce sujet à la suite de la signature, le mois dernier, par huit municipalités libanaises d’une déclaration approuvant la chasse responsable et la protection totale des oiseaux migrateurs. Cette signature a eu lieu lors d’un séminaire, intitulé Gestion de la chasse responsable, par les municipalités organisé par les responsables du projet MSB (Mainstreaming Conservation of Migratory Soaring Birds into Key Productive Sectors along the Rift Valley/Red Sea Flyway) ou «Intégration de la conservation des oiseaux planeurs migrateurs dans les secteurs productifs clés le long de la voie migratoire de la vallée du Rift/mer Rouge», un projet financé par le GEF (Global Environment Facility) et exécuté par le Pnud au ministère de l’Environnement, en collaboration avec la SPNL.
Les cosignataires de la déclaration ont annoncé leur volonté de devenir ambassadeurs des oiseaux planeurs migrateurs, d’être un modèle de référence pour d’autres municipalités dans différentes régions du Liban et des leaders du changement pour faire passer le message à la communauté élargie des chasseurs, en particulier ceux qui ignorent la souffrance et la détresse auxquelles les oiseaux migrateurs sont confrontés.
La création de telles zones est une tentative d’équilibrer les besoins respectifs de la faune et des hommes, avec l’apport des meilleures connaissances disponibles pour assurer la sécurité et limiter la chasse au gibier abondamment disponible sur le site. Les critères d’établissement des Zones de chasse responsable (ZCR) se basent sur des études scientifiques afin de garantir la sécurité des chasseurs et la conservation des espèces chassées, grâce à une série de mesures de précaution et en veillant à une gestion adéquate et à l’application de la loi sur la chasse. Serhal insiste sur le fait que les ZCR permettent de chasser dans les limites de prises prévues par la loi et sous le contrôle de la communauté locale représentée par la municipalité. La gestion des zones s’appuie sur des disciplines telles que les mathématiques, la chimie, la biologie, l’écologie, la climatologie et la géographie pour assurer la meilleure efficacité. Les ZCP contribuent à réduire les dommages causés à la biodiversité en tenant compte des principes écologiques comme l’endurance et la résistance, la géographie naturelle, l’hydrologie et la science des sols dans l’objectif d’équilibrer les besoins de la faune et des hommes.
Serhal ajoute: «La signature de cette déclaration par les municipalités est un événement très important puisqu’elle rejoint d’autres voix réclamant l’application de la loi sur la chasse au Liban, ce qui n’est toujours pas le cas depuis sa ratification il y a des années de cela». Les municipalités, qui ont annoncé leur intention d’appliquer le concept des ZCB, doivent prendre les décisions au travers de leurs conseils municipaux pour organiser la gestion de ces zones. Dans le cas où plus d’une municipalité partagerait la superficie d’une zone proposée, tous les conseils municipaux décideront en commun.
Selon Serhal, «puisque les ZCB devront être situées à une distance minimale de 500 mètres des zones résidentielles, des sites religieux, des aires publiques, privées ou protégées et du trajet des oiseaux migrateurs, elles constitueront par conséquent un havre de paix pour les oiseaux».
L’expert en ornithologie, le Dr Ghassan Jaradi, a confirmé que l’administration des ZCB devrait aboutir à une meilleure application de la loi sur la chasse et réduire les préjudices éventuels. Il a posé la question suivante: «La loi est-elle applicable dans tout le pays? Elle permet de chasser loin des zones résidentielles et des sites religieux. La chasse est aussi interdite dans les réserves et sur les terres où le propriétaire ne l’autorise pas, mais tout ceci concerne toutes les régions libanaises».
Le Dr Jaradi estime que plus la superficie à surveiller est petite, plus son contrôle est efficace. En fournissant les meilleurs services, les résultats positifs sur la biodiversité et l’importance de protéger des espèces en danger seront accentués. Il s’est interrogé sur la possibilité d’une application effective de la loi sur la chasse sur tout le territoire libanais. Selon lui, la décision revient aux municipalités qui doivent bien définir les périmètres et les informations pratiques des ZCR et sensibiliser davantage les jeunes, le grand public et les décideurs. Il a par ailleurs insisté sur l’importance du concept de ZCR qui contribue à la sauvegarde des espèces, donne aux habitants l’opportunité d’agir pour l’utilisation durable des ressources, accroît le sens des responsabilités parmi les partenaires sur le terrain et la communauté locale et favorise l’équilibre écologique au bénéfice de la faune.
Manal Abu Dagher de l’Institut de l’environnement de l’Université de Balamand a présenté les cartes des ZCR de plusieurs régions du Liban, réalisées par l’université. Elle a déclaré que, selon les études sur le terrain effectuées par la SPNL en coopération avec plusieurs experts, l’équipe de spécialistes de l’université a identifié les huit ZCR suivantes:
 1. Menjez – région du Akkar.
2. Andaket – région du Akkar.
3. Alrowaima et Akroum – région du Akkar.
4. Al-Sharbeen – région du Hermel.
5. Al-Fakha – région de Baalbeck.
6. Anjar – région de Zahlé.
7. Quaraoun – région de la Békaa-Ouest.
8. Kaytouli et Roum – région de Jezzine.
Abou Dagher a indiqué que les cartes de ces zones sont établies selon des méthodologies pratiques reconnues à l’échelle internationale, ajoutant qu’elles incluent une base de données nationale qui associe le type de proies aux régions libanaises où elles sont chassées. Elle a conseillé aux municipalités de s’apprêter à modifier ces cartes selon les propositions contenues dans la loi libanaise sur la chasse, ajoutant qu’elles devraient être mises à jour tous les cinq ans, en prenant en considération le système d’occupation des sols et l’expansion urbaine. Selon elle, les ZCR doivent être mentionnées dans la loi, ce qui permettrait d’interdire la chasse à l’extérieur de leurs périmètres.
Le président de la municipalité de Hosh Moussa à Anjar, Garabet Bambukian, a exprimé le souhait de créer des ZCR, estimant que cela constitue un moyen d’appliquer la loi et tous les décrets sur la chasse.

 

Le gibier autorisé au Liban
La loi libanaise sur la chasse (No 580 décrétée le 25 février 2004) stipule qu’«à l’exception des espèces chassables, tous les oiseaux et animaux sauvages, résidants ou migrateurs, sont protégés toute l’année et leur chasse est interdite». Le gibier autorisé par le Conseil supérieur de la chasse mentionne les oiseaux et les animaux sauvages suivants, avec le nombre de prises maximum autorisé par expédition de chasse: – tourterelles (10) – alouettes (50) – grives (20) – cailles (10) – cailles des blés (20) – pinsons (25) – bécasses (5) – canards colverts (5) – pigeons bisets (5) – perdrix choukar (1) – lapins sauvages (5) – porcs sauvages (nombre non communiqué).

http://www.greenarea.me/en/14854/responsible-hunting-zones-first-step-to-save-migratory-birds-enforce-law-580/
 

Natasha Metni

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