Les achats publics, qui sont l’un des véhicules de la croissance économique, sont régis par un cadre légal qui remonte à plus d’un demi-siècle. En fait, la loi sur la comptabilité générale date de 1963, alors que le règlement des adjudications est de 1959. Néanmoins, un nouveau projet de loi a été présenté au Parlement. Mais il dort dans les tiroirs depuis 2012.
De toute évidence, cet état de fait met en relief les vices du processus des achats publics vu à travers les prismes de la transparence, de l’accessibilité de tous aux informations, et des cas de dérogation aux adjudications concurrentielles. Sachant que les achats publics représentent près de 4% du PIB et 13% du volume des dépenses centrales. Dans l’environnement actuel des achats publics, il existerait une faiblesse au niveau de l’élaboration des plans annuels d’achats et, parallèlement, un manque de confiance et une tension qui caractérisent les relations entre l’administration publique et les exportateurs, particulièrement en ce qui concerne les contrats de travaux publics. Au cours des travaux d’exécution, dans 76% des cas, les autorités publiques concernées imposent des amendements aux dispositions du contrat initial, qui pourraient se traduire parfois par des travaux supplémentaires à honorer sans lien direct avec la tâche initiale. Dans ce même environnement peu propice aux engagements financiers des agents du secteur privé, il faut prendre en considération que leurs dus ne leur sont versés à l’échéance convenue que dans 50% des cas en raison notamment des lenteurs de la bureaucratie de l’administration publique et des retards au niveau des reports des crédits du budget d’une année à l’autre. Il y aurait, par ailleurs, une ignorance des nouvelles tendances internationales qui sous-tendent les processus d’achats, à savoir l’achat durable, l’achat écologique et l’électronique. Ce qui requiert certaines compétences. En un mot comme en mille, il faut que les achats publics soient considérés comme un outil principal pour la réalisation de la meilleure valeur du poste des dépenses publiques.
La directrice de l’Institut des Finances-Bassel Fleihan, Lamia Bsat, a souligné la nécessité de moderniser le processus des achats publics à travers l’implantation de procédés innovateurs tels les achats durables, un portail électronique spécifique, un plan stratégique pour renforcer les capacités des producteurs, l’uniformisation des mécanismes et des pratiques, ainsi que l’élaboration de prototypes de cahiers de charges. Elle a également insisté sur l’importance d’un dialogue permanent entre les exportateurs libanais et l’administration publique dans le but d’encourager les PME à s’impliquer dans les achats publics en assurant les services et les produits demandés et, par conséquent, à dynamiser l’activité sur le marché. Aussi est-il crucial que l’achat public soit considéré comme un métier à part entière dont les agents doivent posséder des compétences spécifiques. Reste que pour une meilleure transparence des transactions publiques, le gouvernement devrait mettre au point un cadre légal et institutionnel, qui s’articulerait autour de la prévention, du contrôle et de la sanction.
Liliane Mokbel