Un prétendu rapport du préfet du Tribunal suprême de la Signature apostolique, le cardinal Dominique Mamberti, sur la situation au Liban, a fait beaucoup de bruit à Beyrouth. Entre doutes et certitudes, le rapport a créé un choc dans les milieux chrétiens.
L’agence al-Markazia a rapporté ce que certains milieux ont qualifié de «rapport noir» du Vatican sur la situation de l’Eglise maronite au Liban, et son impuissance à réaliser une percée politique au niveau de l’échéance présidentielle, mettant l’accent sur l’importance de la présence d’un président chrétien au pays du Cèdre, le seul dans la région. D’autres médias sont allés plus loin, en dévoilant certains détails de ce rapport, préparé par le cardinal Mamberti, qui critique les religieux maronites et leur façon d’agir au sein de l’Eglise, tout en se demandant ce qu’ils avaient fait pour le bien de l’Eglise et des maronites du pays, appelant l’Eglise maronite à retrouver sans tarder son rôle historique au service des maronites et des chrétiens du Liban.
Le rapport, en marge de l’image noire qu’il brosse, avance quelques suggestions de solutions, basées sur la nécessité de renforcer la présence chrétienne en Orient, à travers le renforcement de l’Eglise maronite qui devrait récupérer son rôle et son influence sur la rue chrétienne, et travailler à une élection présidentielle, le plus tôt possible, afin d’élire un président accepté de tous.
Le Vatican inquiet
Des sources ecclésiastiques ont exprimé leurs doutes sur l’existence de ce «rapport noir», et souligné qu’il ne s’agit de rien d’autre que d’un tapage médiatique. Le cardinal Mamberti est venu au Liban invité par l’évêque de Beyrouth, monseigneur Boulos Matar, pour assister aux célébrations du jubilé de cinquante ans de celui-ci, et qu’il n’était investi d’aucune mission du Saint-Siège, surtout qu’il n’est pas en charge du dossier libanais. Il a rencontré des leaders libanais qu’il connaissait alors qu’il occupait le poste de ministre des Affaires étrangères du Vatican.
Ces sources font valoir que le dossier libanais est entre les mains de monseigneur Paul Richard Gallagher, qui occupe au Vatican le poste de secrétaire chargé des relations avec les Etats depuis le 8 novembre 2014.
Concernant la partie politique du rapport, le pape aurait-il abordé, lors de sa visite à Washington avec le président américain Barack Obama, le dossier libanais et la nécessité d’élire un président?
De toute évidence, cette question préoccupe le Vatican. A plusieurs reprises, on a souligné un éventuel rôle du Saint-Siège à ce sujet, la France ayant fait chou blanc dans ses tentatives avec l’Iran pour débloquer la présidentielle. Le patriarche maronite, Béchara Raï, a essayé de remettre la question sur le tapis, en profitant de la dynamique créée par l’accord nucléaire entre l’Iran et les Etats-Unis. Mais à ce jour, toutes les démarches sont gelées. La visite du pape à Washington a réveillé l’espoir de voir enfin les Etats-Unis s’intéresser au dossier libanais, en marge du dossier régional, qui risque de traîner. Après la visite papale aux Etats-Unis, le Vatican a appelé les leaders chrétiens à sauver la présidence de la République, estimant que l’affaire est entre leurs mains. Ce qui signifierait que la visite à Washington n’a pas apporté la solution souhaitée et que cette question n’est pas près d’être résolue.
Peu de temps après, le «rapport noir» est publié. Outre les points négatifs soulevés, il aurait fait une approche positive de la rencontre des deux leaders chrétiens, Michel Aoun et Samir Geagea, partant du fait qu’une présence chrétienne forte profiterait aux chrétiens du Liban et, à travers eux, à tous les chrétiens de la région.
Arlette Kassas
La visite de Mamberti
En juin dernier, le cardinal Dominique Mamberti, en visite à Beyrouth, a appelé les Libanais au dialogue pour assurer la stabilité de leurs institutions, dont l’action est nécessaire dans le contexte régional actuel. Il a transmis aux responsables libanais l’inquiétude du pape François pour la situation dans la région et pour celle des chrétiens au Moyen-Orient. Il a apporté un message bien clair: le Saint-Père veut rassurer les Libanais dans cette période de leur histoire et leur rappeler qu’il est toujours à leur côté.
Le cardinal Mamberti connaît bien le Liban où il a occupé la mission de conseiller de nonciature à la fin des années 1990.