Comme chaque année, le Liban figure parmi les derniers de la classe en matière de perception de la corruption, comme le montre l’indice publié par Transparency International, le CPI (Corruption perception index).
En 2014, le Liban s’était classé 136e sur 178 pays dans le monde et 127e sur 177 pays en 2013. «Pour 2015, nous nous attendons aux mêmes résultats», explique Yehya Hakim, secrétaire général de la Lebanese Transparency Association (LTA).
Transparency International publie, chaque année, cet indice qui classe les pays du monde en fonction du degré de perception de la corruption au sein de l’administration publique et la classe politique.
L’Indice de perception de la corruption (IPC) définit celle-ci comme «l’abus d’une charge publique à des fins d’enrichissement personnel».
Les sondages utilisés pour établir cet indice posent des questions en rapport avec «l’abus d’un officiel dans un intérêt personnel ou des questions qui sondent la fermeté des politiques de lutte contre la corruption».
Le plus bas de l’indice, zéro, est attribué aux pays perçus comme «extrêmement corrompus» et le plus élevé, 100, aux pays considérés comme «les plus vertueux».
Avec un score de 28, le Liban se retrouve au bas de l’échelle, pas si loin de l’Irak, de la Syrie, de la Libye, du Soudan, du Tchad et du Yémen dont les scores varient entre 10 et 19.
Corruption institutionnalisée
«Le problème dans un pays comme le Liban est que la corruption fait partie intégrante des mœurs, explique Yehya Hakim. Elle est presque institutionnalisée. En l’absence de loi pour punir de telles pratiques, elle est même admise par la société».
A la question de savoir de quels types de corruption souffre le pays, Hakim évoque «toutes sortes de corruption possibles. Si cette pratique est d’ailleurs si acceptée dans le pays, c’est parce qu’elle ne profite pas seulement aux politiciens, mais à chaque individu libanais à son échelle, prévient-il. Dès lors que vous accordez un pourboire à une administration pour faire vos formalités, vous contribuez à la corruption».
Selon Yehya Hakim, la première manifestation de la corruption au Liban est l’absence de statistiques officielles. «Nous n’avons pas eu de recensement de la population depuis 1932, insiste-t-il. Nous n’avons, en réalité, aucun chiffre précis pouvant dire combien d’habitants compte notre propre pays! Nous n’avons aucune idée du nombre de personnes travaillant dans les différents secteurs de l’économie libanaise».
L’absence de coordination entre les différentes administrations reflète également cette corruption généralisée, selon le secrétaire général de la LTA. «La Banque centrale et le ministère des Finances n’arrivent toujours pas à s’accorder sur les dépenses du budget, s’exaspère-t-il. Nous sommes le seul pays au monde à fonctionner sans budget depuis dix ans».
La solution doit, selon Hakim, passer par une réforme administrative et financière complète. Mais selon ses estimations, il faudrait au Liban une douzaine d’années pour y parvenir. «L’illustration de cette corruption généralisée est l’affaire des déchets que nous soulevons depuis les années 2000, mais qui n’a jamais été considérée comme une priorité et qui ne l’est en réalité toujours pas».
Un chaos organisé
Yehya Hakim conclut sur une note d’optimisme. «Malgré tout, nous avons surmonté tous les obstacles, le dernier miracle s’étant produit le 8 novembre lorsque nous avons voté les prêts de la Banque mondiale parmi d’autres lois économiques dites de nécessité. Malgré l’absence de budget, nous avons toujours réussi à payer les fonctionnaires, même in extremis».
Le secrétaire général de l’association insiste enfin sur le caractère aléatoire de cet indice. «Il faut se méfier des classements internationaux, insiste-t-il. S’il est vrai que le Liban a fait de la corruption une pratique courante, sa position dans un classement mondial est difficile à évaluer. C’est précisément pour cela que nous avons nommé cet indice IPC: indice de perception de la corruption.
Soraya Hamdan