En «visite de travail» de deux jours au Liban, François Hollande s’est rendu au Parlement puis au Sérail, avant de rejoindre la Résidence des Pins. Ce n’est donc pas une visite d’Etat que le président français effectue au Liban, où il n’y a plus d’homologue depuis bientôt deux ans. Une vacance qui, au-delà du casse-tête protocolaire qu’elle suscite, a pesé sur l’opportunité même de ce déplacement, accolé in extremis à deux programmes en Egypte et en Jordanie.
Pas de visite d’Etat donc, mais une conférence de presse aux côtés du Premier ministre Tammam Salam. Le président français, dont c’est la deuxième visite depuis 2012, a promis une aide au Liban de «100 millions d’euros pour les trois prochaines années», qui devrait lui permettre de faire face à la crise des réfugiés. Il a aussi annoncé une prochaine réunion du «Groupe international de soutien au Liban pour fédérer tous les dons». Le chef de la diplomatie française, Jean-Marc Ayrault, viendra à Beyrouth à cette fin, le 27 mai. François Hollande a multiplié les appels en faveur du règlement de la crise institutionnelle au Liban, sans président de la République depuis mai 2014, pour répondre aux sollicitations du chef du gouvernement qui a demandé clairement le soutien de Paris afin de sortir de l’impasse. «La France est une puissance amicale et désintéressée, c’est pour cela qu’on nous demande d’intervenir», a décrypté un proche de Hollande à l’AFP, soulignant le rôle que Paris pourrait jouer auprès de l’Arabie saoudite et de l’Iran: la rivalité entre les deux grands acteurs, sunnite et chiite, de la région alimentant la crise libanaise et la vacance présidentielle.
Le chef d’Etat français s’est par ailleurs engagé à «une aide immédiate pour renforcer les capacités militaires du Liban» face à la menace jihadiste, en particulier du groupe Etat islamique (EI) qui a déjà revendiqué des attentats dans le pays. «Il nous incombe de garantir, a-t-il dit, la sécurité des Libanais. C’est pourquoi j’annonce des aides à l’armée. Oui, la France contribuera à assurer des aides militaires à l’Armée libanaise». Cette aide intervient alors que l’Arabie saoudite a suspendu un don de 3 milliards de dollars au Liban qui devait assurer des équipements militaires français à la troupe libanaise.
Au siège du Parlement, le président français a été accueilli par Nabih Berry, chef du Législatif, entouré du vice-président de la Chambre, Farid Makari, et du vice-président du gouvernement, Samir Mokbel. Il y a été principalement question du tracé des frontières maritimes du Liban, mais aussi du don à l’armée. Dans ce contexte, Berry a tenu à parler de l’aide saoudienne annulée «ce qui, a-t-il insisté, a beaucoup nui au Liban», essayant de convaincre la France d’intervenir pour que l’Arabie revienne sur sa décision. Le chef du Législatif a clairement expliqué la nécessité d’apporter tout le soutien à l’armée dans la conjoncture actuelle, pour l’aider à faire face au danger terroriste qui menace le pays. En réponse, François Hollande a insinué que la communauté internationale n’avait pas réalisé le véritable danger que représente le terrorisme, surtout celui de Daech, jusqu’à ce que ses opérations touchent l’Europe. «Nous sommes donc totalement d’accord sur la nécessité d’éradiquer ce phénomène», a-t-il déclaré. Les deux hommes ont évoqué la présence des réfugiés syriens.
Un président «chrétien»
S’inscrivant dans toutes les discussions menées avec les autorités libanaises, la question de la présidentielle a été également évoquée. Le chef d’Etat français a insisté sur la nécessité de respecter cette échéance dans les plus brefs délais, ajoutant: «Il revient aux parlementaires libanais d’élire le président, la France se tient aux côtés des Libanais et soutiendra leur choix». Hollande a conclu en mettant en garde contre les interventions étrangères et en insistant sur la nécessité pour le Liban, mais aussi pour toute la région, d’élire un président de la République chrétien, tel que prévu par le Pacte national.
Danièle Gergès