«Le ministre Achraf Rifi est libre de démissionner. S’il y avait un président de la République, il aurait déjà accepté sa démission et nommé un successeur», dit Saad Hariri.
Des proches du Courant du futur jugent qu’il faut «de la sagesse et de la jugeote. Chacun reconnaît à Rifi ses positions politiques et sa popularité, mais ceci ne lui donne pas le droit d’aller à l’encontre du courant qui l’a soutenu. Il n’a pas le droit d’agir ainsi à l’égard du fils du martyr Rafic Hariri». «Les contacts, disent les mêmes sources, se poursuivent avec Rifi. Saad Hariri attend un geste de sa part prouvant qu’il n’a pas renoncé à la ligne politique du Futur et qu’il reconnaît ses erreurs».
D’aucuns lui reprochent sa position opposée à celle de sa famille politique, qui tient au gouvernement malgré ses failles et même s’il n’était plus qu’une ombre. C’est pourquoi les milieux du Moustaqbal écartent toute possibilité de démission du cabinet. Rifi n’a donc pas respecté le parapluie politique sous lequel il est censé agir. Par conséquent, il ne pourra revenir au gouvernement que par le biais du Courant du futur qui lui a confié le portefeuille de la Justice. Le ministre démissionnaire est libre d’ambitionner de se faire une popularité personnelle sans la abaya bleue et de «s’insurger» contre sa famille. Autrement, il doit revenir au «cahier des charges» haririen.
Achraf Rifi n’ayant pas coordonné sa démission avec l’ancien Premier ministre, le conseiller de Saad Hariri, Ghattas Khoury, dit: «En formant le gouvernement, le président Hariri a négocié avec le Courant patriotique libre la nomination de Rifi à laquelle ce dernier s’opposait».
Saad Hariri a refusé les démarches de l’ambassadeur d’Arabie saoudite, Ali Awad Assiri, de le réconcilier avec Rifi, soulignant que «s’il y avait un président de la République, il aurait accepté sa démission». Cette décision pousse Rifi à hausser le ton et à déclarer que Hariri regrettera d’avoir proposé la candidature de Sleiman Frangié à la présidence. Il a annoncé la rupture totale avec le Courant du futur, déclarant qu’il refusait de faire partie d’un «courant totalitaire». Il a affirmé qu’il «pardonnait» à Saad Hariri, bien que ce dernier lui ait porté préjudice.
Gebran Bassil-Ali Awad Assiri
Un entretien positif et constructif
L’ambassadeur d’Arabie saoudite, Ali Awad Assiri, s’est dit satisfait de sa rencontre avec le ministre des Affaires étrangères et chef du Courant patriotique libre (CPL), Gebran Bassil. L’entretien, tel que rapporté, était positif et constructif, empreint d’une grande franchise sur la position du Liban à l’égard de son environnement arabe et, en particulier, à l’égard du royaume saoudien. C’était une sérieuse avancée en direction de la normalisation des relations libano-saoudiennes dont le Liban semble en avoir le plus grand besoin vu les crises complexes qu’il traverse. Quarante-cinq minutes de francs échanges entre le diplomate et le ministre, au cours desquels il n’y eut aucune allusion aux brèches qui ont marqué la position libanaise officielle. En outre, l’entretien a porté sur l’attitude du Liban à la conférence islamique d’Istanbul et sur les attentes arabes ou saoudiennes. Il était entendu que le Liban s’aligne à l’unanimité des décisions arabes et celles de son environnement.
Selon certaines sources, par le biais de son ambassadeur à Beyrouth, le royaume a déclaré avoir été offensé par le refus du député Sleiman Frangié, à travers Twitter, de la qualification du Hezbollah d’organisation terroriste. Il y a vu un signe négatif direct contre le royaume.
Peu après, une déclaration confuse a été faite par Assiri sur l’opposition du royaume à la candidature du chef des Marada à la présidence. Le véritable choc a été provoqué par la visite du diplomate au Palais Bustros, où il a rencontré le ministre Gebran Bassil à la demande de ce dernier. Cette réunion imprévisible a accru le flou de la position de Riyad à l’égard de l’échéance présidentielle, étant donné la difficulté de distinguer entre Gebran Bassil, ministre des Affaires étrangères, président du Courant patriotique libre et gendre du général Michel Aoun. Cette rencontre a dépassé le cadre diplomatique, d’autant que le royaume avait fait porter au ministre libanais la responsabilité directe de son attitude à l’égard de l’Arabie saoudite, en décembre dernier, à la suite du qualificatif de terroriste appliqué au Hezbollah dans le communiqué final de la conférence des ministres arabes des Affaires étrangères, au Caire.
Pour les proches du général Aoun, l’Arabie saoudite n’a opposé aucun veto sur les noms des candidats à la présidence et le climat saoudien n’est pas négatif comme se plaisent à prétendre certains.
Chaouki Achkouti