Les choses ne sont pas toujours ce qu’elles paraissent être. Cette phrase n’a jamais été aussi vraie qu’à Sin el-fil où les élections municipales ont été qualifiées de la mère des batailles du littoral du Metn. C’est finalement la liste menée par l’ancien président de la municipalité, Nabil Kahalé, soutenue par Michel Murr et les Kataëb, qui a raflé les 18 sièges, remportant la bataille contre la liste adverse présidée par Youssef Chaoul et soutenue par l’alliance CPL/FL.
A la fin de cette longue journée électorale, ce dimanche 15 mai, Sin el-fil a enregistré un fort taux de participation qui a atteint les 49%. Sur les 9 800 électeurs inscrits, plus de 4 500 personnes ont voté à Sin el-fil. De ces élections, on relève clairement l’influence que continue à exercer Michel Murr au Metn, ainsi que l’allégeance que lui voue l’électorat arménien. Dans cette bataille pour la municipalité de Sin el-fil, les partis arméniens n’ont pas voté pour la liste que soutenaient les Forces libanaises (FL) et le Courant patriotique libre (CPL). Leurs voix ont été entièrement dirigées vers la liste de l’actuel président du conseil municipal, Nabil Kahalé. La popularité dont il jouit à Sin el-fil, et surtout son frère, le moukhtar Nakhlé Kahalé, est indéniable. D’ailleurs, ce dernier aurait récolté quelque 1 900 voix contre 620 voix pour son adversaire. En venant féliciter Nabil Kahalé, Samy Gemayel a bien précisé que c’était la victoire des familles et qu’il n’y avait pas de bataille politique à Sin el-fil.
Si la liste menée par Youssef Chaoul était bel et bien soutenue par le Courant patriotique libre et les Forces libanaises, il n’en demeure pas moins que la liste opposée comportait aux côtés du président Kataëb, Nabil Kahalé, dix aounistes, deux FL, un membre du Parti national libéral (PNL) et quatre indépendants. Depuis le début, Nabil Kahalé a rejeté la qualification de «mère des batailles», affirmant, à maintes reprises, que c’était une compétition familiale, pour le bien et le développement de la ville, et qu’il avait réuni dans sa liste les représentants de tous les partis. Dans une entrevue télévisée, il avait également avancé qu’il comptait dans sa liste l’un des «poids lourds» du Tayyar et «l’enfant chéri» du général Michel Aoun, Kamal Sfeir.
Liberté de choix
Interrogé par Magazine, Kamal Sfeir a déclaré que le général Aoun, tout en appuyant l’autre liste, a laissé la liberté de choix aux partisans. «Nous avons rencontré le général à maintes reprises et nous lui avons expliqué notre point de vue. Il a été très compréhensif, nous disant que nous sommes entièrement libres dans nos choix et affirmant qu’il serait le premier à nous féliciter en cas de victoire. Il nous a dit aussi que notre succès serait celui du CPL».
Il serait ainsi tout à fait erroné de dire que le Courant patriotique libre a perdu à Sin el-fil puisque la liste qui l’a emporté compte dix aounistes. «Les aounistes sur la liste de Nabil Kahalé représentent la force du CPL sur le terrain. Ils appartiennent aux grandes familles de Sin el-fil», confie Sfeir à Magazine. D’ailleurs, ces élections ont bien montré que le Courant patriotique libre est toujours aussi populaire à Sin el-fil. Aux dernières nouvelles, on apprenait que les candidats aounistes élus sur la liste de Kahalé allaient visiter le général Aoun à Rabié pour lui offrir leur victoire et se mettre à sa disposition. Magazine a également appris que le CPL ne se dirigerait pas vers la prise de sanctions à l’encontre des partisans qui ont intégré la liste de Kahalé.
Joëlle Seif
Un grand écart
A la fin de cette journée, selon la machine électorale de la liste de Nabil Kahalé, les chiffres montraient un grand écart entre les deux listes, atteignant un peu plus de mille voix de différence. Les quatre premiers vainqueurs, Nabil Kahalé, Victoria Khoury, Jean Ghazal et Kamal Sfeir, enregistraient respectivement 2 920, 2 850, 2 822 et 2 820 voix, alors que le dernier sur leur liste, André Abou Zeid, scorait 2 688 voix. En revanche, sur la liste adverse, Georges Houeiss enregistrait 1 825 voix et Youssef Chaoul (qui présidait la liste) 1 824 voix, alors que le dernier sur la liste, Ahmad Amhaz, ne récoltait que 1 723 voix.