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Mouna Béchara

Baisser les bras n’est pas libanais

Malgré les garanties, diffusées par les médias et des politiciens de tout bord, d’une sécurité assurée, la crainte d’un incident imprévisible dans les bureaux de vote a plombé l’ambiance. Certains candidats en ont pris prétexte pour justifier le peu d’enthousiasme de leurs électeurs potentiels, refusant d’admettre que la véritable raison de l’absentéisme n’était ni le laxisme ni l’insécurité, mais les déceptions du passé qui pèsent sur l’action future des nouveaux gestionnaires du quotidien. Les nouveaux seront-ils différents et plus efficaces que leurs prédécesseurs? Les citoyens, déçus par des années de corruption et de laisser-aller, ont hésité à sacrifier leur dimanche pour se rendre aux bureaux de vote, malgré les promesses affichées des candidats. Promesses pompeuses et peu réalistes, au vu de l’héritage laissé par les sortants. Le calme a pourtant sévi malgré des menaces de dénonciations d’illégalités telle celle de ces bulletins marqués au rouge, histoire de les faire reconnaître par les destinataires, à l’heure de l’ouverture des urnes.
Protestations, menaces de plaintes déposées auprès du Conseil d’Etat, accrochages verbaux, coutumiers dans ce genre d’opérations, n’ont pas été en reste. Toutefois, l’agressivité et la violence n’étaient pas au programme. Nous avons écouté et entendu les candidats tout au long des semaines. Si nous n’étions pas échaudés, nous pourrions croire qu’ils ne seront là que pour assurer notre bien-être. Le doute est permis. Première leçon de cette échéance, dite citoyenne, est le poids de l’intervention politique. Cette première étape dans laquelle certains voulaient voir un retour à une vie normale, dans un Etat digne de son nom, aurait pu faire renaître l’espoir chez les Libanais, un espoir même fragile et vulnérable, si des vents contraires ne menaçaient toujours.
Nous ne reviendrons pas sur la rengaine nauséabonde de ces déchets qui, de retour dans nos coins de rue, nous narguent du haut de leurs monticules. Les deux mois fixés pour la première tranche d’une solution, si compliquée, sont écoulés. La suite n’est toujours pas sur le tapis. Nos problèmes d’électricité, d’eau et tant d’autres devenus quotidiens sont mis en sourdine en attendant des jours meilleurs. Ceci étant, même si nous pouvons aligner d’autres importantes difficultés quotidiennes auxquelles se heurte une majorité de Libanais, elles resteront ignorées volontairement ou non par ceux qui en sont responsables. Ceux-là saisissent la première occasion d’embarquer à bord d’un avion «privé» ou aux frais de l’Etat pour se changer les idées. Mais prétexte, peut-être plus fumant, «paver la voie à l’élection présidentielle», dont le sort, il n’est guère besoin de le rappeler, n’est ni en France, ni à Washington, au Japon ou en Chine, comme certains continuent à vouloir le croire ou le faire croire. Peut-être sont-ils adeptes de la métempsychose qui  pourrait ramener sur terre un de ces ténors du passé qui faisaient, quoi que l’on en dise, l’honneur du pays du Cèdre qu’ils ont tant servi.
Mais les Libanais ne baissent pas les bras. Ils ont toujours donné la preuve de leur pouvoir de résilience. Les multiples associations à caractère social et culturel en sont la preuve. L’été, saison du tourisme par excellence au Liban, connaîtra, cette année, une recrudescence d’intérêt chez les citoyens pour les sites historiques du pays que beaucoup d’entre eux ne connaissent pas. On peut y ajouter une pléthore d’événements culturels et artistiques, dont le premier, annonciateur de la saison, diffusé la semaine dernière sur l’écran de la Future TV: la fabuleuse cérémonie de remise, au Platea de Jounié, du prix Murex d’or 2016, créé par deux médecins libanais à l’intention de figures connues dans le domaine de l’art au Liban, dans les pays arabes et dans le monde… Les lauréats étaient venus de Syrie, de Jordanie, d’Irak, d’Arabie saoudite et même d’Europe. D’autres activités de la même qualité sont annoncées dans les pages culturelles de Magazine, dont la fête de la musique tant appréciée. Elles permettront de meubler les vacances des jeunes et moins jeunes. Ainsi, le tourisme local, religieux et historique complète ou supplée largement au tourisme étranger frappé par la crise syrienne, notamment, mais aussi par celle qui secoue le Moyen-Orient, l’Occident et même la planète.

Mouna Béchara

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