L’histoire et les personnages du premier long-métrage de Sophie Boutros, Mahbas sont déjà impatiemment attendus par les spectateurs libanais. La réalisatrice et coscénariste nous en parle depuis Dubaï, alors que son film sortira le 16 mars.
Vingt ans après la guerre libano-syrienne, Thérèse n’a toujours pas oublié la mort de son frère, tué par une bombe syrienne. Aujourd’hui, sa fille unique se fiance. Mais quand le futur époux et ses parents arrivent, elle réalise qu’ils sont Syriens.
Il suffit de voir la bande-annonce de Mahbas (solitaire), pour se projeter à la fois dans notre quotidien, dans un sujet d’actualité et dans le genre cinématographique. Une comédie dramatique aux multiples lectures, comme le présente sa réalisatrice Sophie Boutros, co-scénariste également aux côtés de sa productrice Nadia Eliewat.
Sophie se rappelle de la réaction commune des spectateurs, entre rire et larmes, lors de la projection de Mahbas au dernier Festival International du film de Dubaï. «Le plus important pour nous, ce sont les émotions, que les spectateurs se sentent engagés dans l’histoire, qu’ils puissent s’identifier aux personnages, qu’ils s’y reconnaissent». La vision de l’autre, une rivalité entre deux entités, un thème universel, qui prend chez nous une dimension autre, puisqu’il s’agit d’une histoire qui nous touche. Une sorte de Roméo et Juliette? «Oui, mais la différence est que la rivalité est portée uniquement par la mère, non pas par la famille ou le village. Nous avons tenu à donner au personnage une raison justifiant sa méfiance», souligne la réalisatrice.
La thématique libano-syrienne est le déclencheur de l’idée du film, un sujet duquel Boutros et Eliewat discutaient souvent. «Le sujet est très important pour nous, affirme Boutros, il ne s’agit pas d’un message à porter, mais de raconter une histoire qui dit quelque chose de nouveau, que personne n’aborde de manière aussi frontale, alors qu’on le vit tous les jours. Parfois les idées les plus simples sont celles auxquelles personne ne pense».
Envisagée d’abord comme un court-métrage, l’histoire se développe. Depuis 2013, durant leurs vacances, leurs congés, Nadia Eliewat et Sophie Boutros s’attellent à l’écriture du scénario. Au fil des versions, jusqu’à la quatrième sous la supervision et les recommandations du «script-doctor» italien, Nicola Lusuardi, rencontré lors d’un atelier de travail, elles finalisent le scénario en 2014. Le tournage se déroulera sur cinq semaines à l’été 2015.
Dès l’ébauche du scénario, Julia Kassar est contactée pour incarner le rôle de Thérèse. «Ses traits forts et expressifs, son visage donnent un effet très dramatique, sans oublier évidemment la confiance et le respect que nous lui portons en tant qu’actrice», indique Sophie Boutros. Alors que Julia Kassar est enthousiasmée par le rôle, le script est ensuite envoyé à Bassam Koussa, «un des plus acteurs syriens les plus respectés dans son pays et dans le monde arabe». «Nous étions un peu inquiètes car nous ne savions pas comment allait réagir une personne syrienne», confie la réalisatrice. Koussa rejoint le casting qui compte également Ali el-Khalil, Nadine Khoury, Betty Taoutel, Jaber Jokhadar, Serena Chami, Said Serhan, Daniel Balaban, Nicole Yamato et Samir Youssef. «Nous avons vraiment été chanceuses et nous sommes très fières du casting. Non seulement ce sont de très bons acteurs et actrices, mais aussi des personnes authentiques».
Comment explique-t-elle cet enthousiasme, cet intérêt pour le film? «Je crois que c’est parce qu’ils ont trouvé une subtilité dans le traitement de ce genre d’histoire. Une histoire ancrée dans notre culture, dans notre quotidien, qui ne se prête pas au prêche, au sermon, mais joue de cette subtilité du message». Si à Dubaï, le film a été accueilli par des rires et des larmes, Sophie Boutros attend avec impatience et curiosité la réaction du public libanais d’autant plus concerné car le film n’est pas destiné à une élite cinéphile. «Il est très important pour nous que le plus grand nombre de spectateurs aillent le voir. C’est notre seule récompense».
Sortie dans toutes les salles libanaises le 16 mars.
Nayla Rached