Dans l’ombre, avec beaucoup de sérieux, d’entrain et d’espoir, des professeurs de l’Antonine International School Ajaltoun essaient d’inculquer aux enfants ce qui manque tant au pays: l’engagement, l’appartenance citoyenne, la démocratie en action, le sens de l’environnement et la fierté de pouvoir changer les choses.
Avec ces objectifs en tête, plutôt que de faire travailler les jeunes sur des projets théoriques sur lesquels ils n’ont pas de prise, l’Antonine International School Ajaltoun a décidé de motiver les élèves de 1ère et de 5ème en les orientant vers un projet concret. Sous l’impulsion dynamique et décidée de la professeure d’histoire-géographie Véronique Karam, Valérie Aoun du Club Environnement de l’école et Maryse Ghanem du CDI ont voulu donner à leurs élèves l’occasion d’expérimenter quelque chose de nouveau et aussi l’envie de poursuivre leur action, une fois adulte.
Les quatre élèves de Première qui préparent leurs TPE (travaux personnels encadrés) et huit autres de la classe de 5ème dans le cadre de leur EPI (enseignement pratique interdisciplinaire) ont donc décidé de s’attaquer à ce qui entache leur pays irrémédiablement: la pollution par le plastique. Un projet préparé et élaboré en classe, mais réalisé avec les communautés des localités environnantes: Ajaltoun et Ballouneh.
CHANGER LES MENTALITéS
Au départ de ce projet d’éducation à l’environnement et de sensibilisation aux effets négatifs des sacs en nylon, les élèves ont commencé par effectuer des recherches sur les véritables problèmes posés par le plastique en général. Une campagne d’initiation a ensuite été orchestrée par l’équipe, essentiellement axée sur les sacs en plastique que les supermarchés distribuent sans compter. Quatre supermarchés de la région d’Ajaltoun ont été approchés par les élèves eux-mêmes qui ont tenté de convaincre les propriétaires de ces grandes surfaces de prendre part à leur projet en proposant à leur clientèle des sacs réutilisables. Et là, bonne nouvelle: l’accueil a été plutôt favorable, bien que prudent. Les supermarchés doivent faire face à des frais importants de fabrication et d’impression de sacs (entre 40 000 et 60 000 $/an). Par ailleurs, il s’agit aussi et surtout de changer la mentalité d’une clientèle d’habitués qui estime que c’est son droit de prendre des sacs supplémentaires à la caisse.
L’idée des étudiants étant attrayante, trois des quatre supermarchés se sont engagés à faire un effort. Pour les convaincre du bien-fondé de leur action, les élèves ont prévu des solutions pour motiver les clients: cartes de fidélité, interviews télévisées, distribution de sacs réutilisables gratuits. Surtout, les jeunes ont élaboré une véritable campagne d’information et de sensibilisation avec affiches, brochures, photos, etc.
Concrétiser et durer
Mais pour que l’initiative ne soit pas qu’une opération ponctuelle ou celle de «la semaine du sac réutilisable», les élèves ont été initiés à poursuivre leur engagement. Ainsi, ils ont poursuivi leurs actions auprès des municipalités, des parents, des professeurs et des autres élèves. La municipalité d’Ajaltoun, très active par ailleurs, a immédiatement été intéressée par le projet de l’école Antonine et a promis de trouver un partenaire sponsor pour préparer une campagne d’affichage dans le village, organiser une conférence de sensibilisation (donnée par les élèves) destinée aux habitants de la localité, etc. La municipalité de Ballouneh est également en voie d’implication.
Pour donner plus de poids et de sérieux à leur projet, les jeunes, assistés de leurs mentors, ont créé un slogan qui résume bien leur action: «0% plastique, 100 % Liban», ainsi qu’un logo où sont associés celui de leur école et bien sûr le cèdre fédérateur. Leur première opération a été annoncée au journal télévisé et retransmise par une chaîne locale avant de faire l’objet d’une interview en bonne et due forme sur un plateau télé.
En attendant de voir leur initiative s’étendre à d’autres écoles, supermarchés et localités, les jeunes présenteront leur projet scolaire en avril, avant de proposer un projet clé en main et une action auprès des ministères de l’Education et de l’Environnement.
Quels bénéfices pour les élèves?
● Le développement de la créativité et de l’autonomie.
● La recherche des causes d’un problème pour mieux le résoudre.
● L’implication de la société civile.
● Le travail sur le terrain et ses difficultés.
● La quête pour fournir les éléments de motivation.
● L’engagement local.
● Le désir et l’action pour véritablement rendre le monde meilleur.
● L’application des connaissances et la formation scolaire dans la vie réelle ainsi que la concrétisation d’un projet.
● La sensibilisation à l’environnement et au développement durable.
● La prise de conscience de l’impact de chacun sur la société.
Gisèle Kayata Eid