Les représailles israéliennes à l’attaque du Hezbollah contre des véhicules militaires israéliens étaient tout aussi bien calculées que la riposte de la Résistance, de sorte que les tensions des derniers jours ont été évacuées entre Maroun al-Ras et Avivim sans besoin, pour les protagonistes, de recourir à une plus vaste confrontation pour se tester mutuellement. Le Hezbollah a rétabli les règles d’engagement nées de la guerre de 2006, régies par la dissuasion réciproque, qu’Israël a inconsidérément tenté de modifier en envoyant ses drones armés dans la banlieue sud de Beyrouth.
Avant l’affaire des drones, le Liban a surmonté, au début de l’été, une autre crise non moins grave, provoquée par l’incident de Qabrchmoun, qui a empoisonné le climat politique et plombé la saison touristique.
Entre les drones et Qabrchmoun, le Liban a échappé au pire. S’il y a un indicateur à relever du dénouement de ces deux crises, c’est que la stabilité du pays reste une priorité pour les acteurs locaux, régionaux et internationaux. Les contacts politiques tous azimuts ont permis aux responsables libanais d’absorber le choc de Qabrchmoun, et les tractations diplomatiques menées ces derniers jours ont fixé un plafond au processus riposte-représailles entre Israël et le Hezbollah dans l’affaire des drones.
Le souci de la stabilité du Liban est un bon signe, car, celle-ci étant indivisible, cela signifie que ses bienfaits s’étendent à d’autres domaines. Nous pouvons donc en déduire que la faillite financière de l’Etat n’est pas souhaitée, dans le sens où la guerre ou l’effondrement économique donneront pratiquement les mêmes résultats: le chaos.
Le chaos est interdit, du moins à moyen terme.
Ce n’est pas pour autant que les dirigeants doivent dormir sur leurs lauriers et se tourner les pouces en attendant que les autres, quels qu’ils soient, sortent leur pays de la situation économique et financière délicate dans laquelle il se trouve. Si la stabilité sécuritaire repose, en grande partie, sur des équations régionales et internationales, il est de leur responsabilité de prendre toutes les mesures nécessaires pour le redressement économique.
L’autre bon signe c’est que les dirigeants semblent conscients de la gravité et de l’urgence de la situation. En dépit du temps perdu, des occasions ratées, des réformes avortées et des demi-mesures, la volonté d’aller de l’avant existe. Le président de la République, Michel Aoun, a placé en tête des priorités la question économique. La réunion de Baabda, organisée sous l’œil du directeur régional de la Banque mondiale, Saroj Kumar Jha, et du coordinateur de Cedre, l’ambassadeur Pierre Duquesne.
Deux dossiers importants nous permettront de mesurer le sérieux de la classe politique dans les semaines à venir. L’adoption du projet de budget 2020 et le respect du calendrier de réhabilitation du secteur de l’électricité. Si ces deux échéances sont respectées, cela signifie que le Liban est sur la bonne voie. Dans le cas contraire, les pessimistes auront gagné.
Paul Khalifeh