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Nº 3057 du vendredi 10 juin 2016

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Culture

La Bibliothèque orientale rénovée. Inauguration de la Photothèque

En juillet 2014, la Bibliothèque orientale et la fondation Boghossian établissent un partenariat de longue haleine: un projet de développement, visant à la fois la protection du patrimoine unique de la BO et la création d’un centre d’archives et de documentation photographique, la Photothèque.
 

Jeudi 2 juin, une immense foule se pressait à l’entrée de la Bibliothèque orientale des pères jésuites, rue Monnot. Des personnalités religieuses, politiques, universitaires, académiques, du monde des médias… tous venus prendre part à cet acte d’engagement et de résistance. Avant de visiter les lieux rénovés et de découvrir la Photothèque, les invités se sont rassemblés au théâtre Monnot pour les discours officiels.
Premier à prendre la parole, le père Salim Daccache, recteur de l’Université Saint-Joseph (USJ). Il a rappelé qu’au vu de la convention, conclue en 2000 avec la Compagnie de Jésus, stipulant la passation à l’université de la tâche de la gestion des affaires de la bibliothèque, l’USJ «devait veiller à rendre la bibliothèque attrayante et active, ce qui est le droit de toute bibliothèque ayant pour vocation de dispenser le savoir par le livre et d’autres supports». Et d’énumérer les raisons qui font de ce devoir un acte de foi et d’engagement; en tête, la richesse exceptionnelle du patrimoine de la BO, «un monument historique libanais et même proche-oriental et au-delà». Mais aussi le lien qui lie les deux institutions, la «bibliothèque étant à la genèse académique de la naissance de l’USJ».
Saluant la fin des travaux de rénovation et le «passage d’un magasin d’archives de photos à une belle photothèque moderne», le père Daccache affirme: «La Bibliothèque orientale fut une bibliothèque orientaliste, mais plus encore couveuse de la renaissance linguistique et culturelle arabe et libanaise». «Nous savons que l’orientalisme a changé de figure et de mission, ajoute-t-il, et c’est à nous, à l’université, de réfléchir sur le positionnement à venir de la bibliothèque et des services qu’elle peut encore rendre à l’engagement académique et intellectuel de l’université et aux chercheurs dans plus d’un domaine… C’est l’université, ses chercheurs et la communauté internationale qui doivent voir dans la BO la Jérusalem du monde académique».
Prenant la parole à son tour, Albert Boghossian a expliqué que quand la fondation a été informée de ce riche patrimoine, il lui est apparu «évident de le protéger et de le présenter au public de la meilleure façon», puisqu’il a «une valeur documentaire inestimable pour l’histoire des pays du Proche-Orient», où s’ancre l’histoire de la famille Boghossian. «Le plus important est de continuer à lutter contre le langage de la violence si répandu dans notre région». Et de conclure en citant Amin Maalouf: «Lorsque l’esprit des hommes te paraîtra étroit, dis-toi que la terre est vaste». Une phrase qui sonnerait comme une correspondance établie avec la réunion, cet après-midi-là, du Conseil des ministres, de laquelle, grâce à cette occasion, s’est «échappé» le ministre de la Culture, Rony Araygi, comme il l’a souligné, évoquant une ambiance «qui ressemble à tout ce qui est contraire à (sa) façon de faire et à (ses) principes». Retour au sujet et au sérieux, le ministre Araygi rappelle que «la bibliothèque a été miraculeusement préservée durant la guerre du Liban, alors qu’elle se trouvait sur la ligne de démarcation. Autour d’elle, tout était ruines et désolation et elle a résisté dans un entêtement porteur de sens et de message. Elle nous signifiait que l’essentiel était dans ces murs et que tout le reste n’était que  temporaire, donc récupérable, que l’essence de notre identité serait une pierre de fondation de notre résurrection et le fond commun de notre réconciliation».
Dans des temps où on ne parle que de choc des civilisations, cet événement tonne comme un rappel: «Notre Orient est le berceau des civilisations et rend ainsi leur dignité à nos peuples défigurés par le comportement fanatique d’une minorité».

Leila Rihani
 

La BO, un patrimoine unique
Fondée en 1875, en même temps que l’USJ, la Bibliothèque orientale reprend le fonds d’ouvrages du collège-séminaire de Ghazir. 210 000 titres d’ouvrages anciens et rares, 1 800 titres de périodiques, une collection presque complète de journaux depuis le début de la presse écrite arabe, 3 500 manuscrits d’auteurs chrétiens, 2 400 cartes géographiques, un fonds arménologique, les publications d’Emily Nasrallah, ainsi qu’un fonds photographique d’environ 70 000 photos constituées par des générations de pères jésuites qui, depuis le XIXe siècle et dans le cadre de leur mission et de leurs recherches personnelles, ont accumulé une collection particulièrement riche de photographies à caractère archéologique, ethnographique ou historique.

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