Magazine Le Mensuel

Nº 2922 du vendredi 8 novembre 2013

Expositions

L’art au chevet des enfants réfugiés syriens

Le 30 octobre dernier, au Beirut Exhibition Center, il y avait affluence. Le monde de l’art avait rendez-vous avec l’effort humanitaire, en faveur tout particulièrement des enfants syriens réfugiés au Liban. L’initiative Syri-Arts, orchestrée par l’ONG Kayany, consistait à récolter des fonds en proposant des œuvres d’art aux enchères.
 

Syri-Arts, deux mots, un trait d’union, comme pour symboliser ce besoin vital de tenir la main de ces enfants réfugiés syriens, victimes, bien malgré eux, d’une guerre meurtrière qui n’en finit plus.
«D’après le gouvernement, il y aurait aujourd’hui plus de 1,2 million de réfugiés syriens au Liban, indique Nora Joumblatt, membre du comité organisateur. Parmi eux, 77% sont des femmes et des enfants. «Ainsi, 500 000 enfants ont des besoins primaires multiples (nourriture, habits, médicaments, soins, scolarisation, etc.). La communauté internationale a failli à ses responsabilités, dénonce-t-elle. Nous risquons de perdre toute une génération de Syriens délaissés. Ces derniers font face à de nombreuses menaces telles que la mendicité, le travail forcé ou pire encore».
Au total, c’est un million d’enfants syriens qui ont fui leur pays. «Ce millionième enfant réfugié n’est pas juste un numéro de plus, souligne Anthony Lake, directeur de l’Unicef. C’est un enfant réel, arraché à sa maison, peut-être même à sa famille, qui affronte les horreurs que nous pouvons juste imaginer». Des chiffres qui ont récemment fait dire à Antonio Guterres, Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés, que la Syrie était devenue «la plus grande crise de déplacés de tous les temps».
Alors, en écho à l’initiative parisienne SyriArt: 101 œuvres pour la Syrie qui a eu lieu en janvier dernier, l’ONG Kayany, en collaboration avec le ministère des Affaires sociales, SyriArt Paris, l’Institut du monde arabe, l’Unicef, le Beirut Exhibition Center, ainsi que les ONG Save The Children International et Action contre la faim, a décidé de tenter l’aventure.
«Nous voulions également réagir et faire la même chose. Proposer des œuvres d’art aux enchères dont les bénéfices reviendraient aux enfants syriens réfugiés au Liban, reprend Nora Joumblatt. Au total, si toutes les œuvres se vendent au prix du marché, on peut atteindre 1,3 million de dollars. Ce ne sera qu’une goutte d’eau dans la mer, relativise-t-elle, mais au moins, nous aurions attiré l’attention sur ces enfants abandonnés d’une certaine manière».
A cette occasion, 145 artistes et une vingtaine de galeries d’art ont répondu présents. Du 30 octobre au 8 novembre, étaient exposées au Beirut Exhibition Center, des peintures, sculptures et photographies majoritairement signées par des artistes du monde arabe (Syrie, Palestine, Liban, Irak, Bahreïn, Egypte, Tunisie, Maroc, Arabie saoudite et Jordanie), mais également d’Espagne, de France, de Belgique, de Grande- Bretagne, d’Italie, de Turquie ou d’Iran. Des artistes reconnus dans le monde de l’art dont Mona Hatoum, Hammoud Chantout, Ayman Baalbaki, Akram Zaatari ou encore Mazen Kerbaj pour ne citer qu’eux. A l’inauguration, certains étaient d’ailleurs présents. «Frapper aux portes pour demander de l’aide est une chose, explique l’artiste Gérard Avedissian, mais récolter des fonds à travers une exposition est ce qu’il y a de plus honorable. C’est tout simplement magnifique de participer à cela».
Le 20 octobre dernier, la vente aux enchères a été lancée en ligne sur le site Paddle8 et sera clôturée aujourd’hui 8 novembre à 18h au Beirut Exhibition Center.
A l’inauguration de Syri-Arts, le regard sur le parterre d’une salle d’exposition comble, Nora Joumblatt espérait qu’il y aurait le même répondant du côté des collectionneurs. Espérons qu’ils l’auront eu.

Delphine Darmency

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