Magazine Le Mensuel

Nº 2885 du vendredi 22 février 2013

DOSSIERS

Les banques s’humanisent. Investir dans le bien-être

Encore balbutiant il y a quelques années, le concept de Responsabilité sociale des entreprises gagne de plus en plus de terrain au Liban. Les banques, en tant que poumon de l’économie nationale, figurent parmi les acteurs principaux de ce mouvement.

La mondialisation est passée par là. Sans oublier la crise financière qui a secoué les marchés et terni l’image de ses principaux acteurs. Soupçonnés de vouloir faire du profit à tout prix, les financiers tentent depuis quelques années, de redorer leur image, en démontrant leur engagement dans leur communauté, et au sens large, dans la communauté.
Au Liban, bien sûr, la crise n’a pas fait autant de ravages, mais la dynamique reste la même. Il est désormais indispensable pour tout acteur financier qui se respecte de prouver son engagement dans la communauté et d’initier des actions dans cette direction.
La Responsabilité sociale des entreprises leur donne les outils pour mettre en œuvre leurs actions, et ce, en toute transparence. Les actionnaires des groupes bancaires s’avèrent très soucieux aujourd’hui de la responsabilité sociale de leurs entreprises, comme l’ont confirmé plusieurs banques interrogées par Magazine.
Le concept de Responsabilité sociale des entreprises n’est pas nouveau. Il a émergé globalement au début des années 1970. Selon la Banque mondiale, ce concept définit « un ensemble de politiques et de pratiques liées aux relations avec les intervenants clés, les valeurs, la conformité aux exigences légales, et le respect des personnes, des communautés et de l’environnement». Il s’agit donc pour les entreprises de s’engager à contribuer au développement durable. Multinationales, banques, assurances, ou autres PME ne sont pas là uniquement pour réaliser des profits mais deviennent également des entreprises citoyennes, réelles actrices du monde qui les entoure. Une manière pour elles d’aider une société à croître et à rester compétitive, dans un souci de bonne gouvernance.

Développement durable
Un engagement à contribuer au développement durable, voilà un concept qui prend un relief tout particulier dans la région Mena, et bien entendu au Liban. La responsabilité sociale est importante pour cette région car elle permet de faciliter le développement à long terme, mais aussi d’instaurer de bonnes pratiques de gouvernance. Selon un rapport sur la RSE établi par l’Union des banques arabes, il apparaît que ce concept permet également, dans la région Mena, de renforcer le secteur privé afin de prendre une part active au développement de la région. Cela permet aussi de reconnaître les besoins des différents intervenants et des clients, d’encourager la participation communautaire des entreprises et, pourquoi pas, de construire des partenariats publics-privés.
Selon le rapport de l’Union des banques arabes, qui a interrogé les acteurs financiers de la région Mena, les raisons qui les poussent à intervenir en responsabilité sociale sont à 73% pour aider la société et la communauté. Viennent ensuite à égalité, avec 41%, des motivations d’ordre environnemental, ainsi que l’amélioration des pratiques de ressources humaines. Enfin, 32% ont répondu que la RSE leur permettait d’agir en faveur de la promotion de la diversité et des droits de l’homme.

Une mission noble
La RSE consiste à gérer l’impact d’une institution sur ses intervenants, l’environnement et la communauté dans lesquels elle évolue. Elle dépasse le montant d’argent offert à des causes charitables. Il s’agit de l’intégrité avec laquelle une société se gouverne, de la façon dont elle remplit sa mission, des valeurs qu’elle a, ce qu’elle veut pour défendre, de la façon dont elle participe avec ses intervenants, évalue son impact et présente des rapports publics de ses activités. Tout cela a un impact direct sur la façon dont la direction prend des décisions. Cela signifie que les gestionnaires doivent prendre en compte un éventail croissant et une complexité de facteurs liés aux répercussions financières, environnementales et sociales des activités commerciales. Afin d’atteindre cet objectif, la RSE devient concernée par les compétences dont les gestionnaires ont besoin pour fonctionner dans cet environnement d’affaires changeant.
Pour les entreprises, intégrer la RSE dans sa stratégie globale leur permet d’accomplir plusieurs objectifs. D’abord, celui de motiver et de fédérer ses employés autour d’une cause commune. Par exemple, les banques libanaises vont s’appuyer sur tout leur réseau d’agences dans les régions pour dénicher tel ou tel talent, ou mettre en place une initiative visant à devenir « environnementalement » correcte. Avec comme gain, pour la banque, de se retrouver avec des employés fidélisés, loyaux, investis dans le groupe et de fait, dans leur travail.

Une image positive
Vis-à-vis de leurs clients aussi, l’image renvoyée par les actions de responsabilité sociale ne peut être que positive. Un client pourra être fier d’être dans une banque qui aide les talents émergents, soutient les populations défavorisées dans les régions éloignées, via, par exemple, des microcrédits accordés à de très faibles taux, ou encore, contribue à la reforestation d’un territoire. Dans le sens inverse, la banque peut ainsi sensibiliser sa clientèle à ses opérations, voire les faire participer directement. Sa réputation grandit.
D’autant que contrairement au mécénat, qui se veut être un don sans contrepartie, la responsabilité sociale permet de communiquer en toute transparence à ses clients, ses investisseurs, ses employés, et même parfois d’en tirer un quelconque profit financier. Contribuer au développement économique d’une région ne peut qu’améliorer les performances d’un acteur bancaire qui y est présent. Si des emplois sont créés, ce sont de nouveaux revenus, et donc, potentiellement, de nouveaux clients.
Idem pour l’éducation dans laquelle de nombreux acteurs financiers ont décidé d’investir. Une population mieux instruite aura théoriquement accès à de meilleurs emplois et fera progresser l’ensemble de la communauté.
Avec la responsabilité sociale, la dimension humaine est replacée au centre de l’entreprise, et non plus en marge. Des employés plus satisfaits dans leur environnement de travail amèneront une meilleure productivité et une performance de meilleure qualité.
Les entreprises, quelle que soit leur taille, ont donc tout intérêt à se doter d’une véritable stratégie en matière de RSE. Pour leurs dirigeants comme pour les employés, sans compter leur impact sur la société, c’est du gagnant-gagnant.

Jenny Saleh

La finalité humaine de l’économie
Les 25 et 26 mars prochains se tiendra à Beyrouth la première Conférence de Beyrouth, avec pour thème, La finalité humaine de l’économie. Plus de 500 dirigeants chrétiens et musulmans du monde entier sont attendus pour cette conférence, qui sera un lieu privilégié pour échanger sur les pistes de progrès s’appuyant sur la Responsabilité sociale des entreprises et ouvrir la voie à un développement économique et social, tout en respectant la dignité humaine. Les intervenants aborderont notamment la place de l’entreprise dans la société, mais aussi les attentes de la société civile.
Cet événement est organisé par l’association Ma’am, issue du Rassemblement islamo-chrétien d’entrepreneurs libanais et Uniapac, une fédération d’associations réunissant plus de 15000 chefs d’entreprises chrétiens répartis dans trente pays. Ma’am comprend  un groupe d’entrepreneurs, d’intellectuels, de professions libérales, de chefs d’entreprises et de chefs religieux.
Plus d’infos sur http://www.beirutconference.org/

 

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